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FCM 25.00

19 avril 2024

Sanglier en lisse : s'il fallait passer au cuivre ?

Faut pas rêver, l’interdiction du plomb interviendra bien à un moment donné. Le retour d’expérience sur le cuivre existe déjà bien sûr pour la percussion centrale, et même pour le lisse, mais pas ici, aux USA, où on tire avec les canons rayés spécifiques.

En plus il s’agit de projectiles « sabot » (1) qui ne seront pas précis en lisses, massivement employés chez nous et qui n’ont pas inventé …la poudre, c’est bien le cas de le dire, car étant des Barnes (en plus à noyau de plomb) de calibre 45, dans un godet de 50, ou de 44 pour les calibres 20. Leur prix est élevé, et le canon rayé vaut encore 300 $ de plus, et il serait étonnant de voir ce bazar faire son apparition par ici, c’est pourquoi d’ailleurs on en voit fort peu. Par bonheur, le rechargement qui a quasiment disparu ici, y est commun pour l’arme de poing et surtout les « muzzleloaders » qui utilisent des fusils lisses à chargement par la bouche disposant de tout un matériel (matrices, moules et presses Lee ou Lyman), passe-temps en soi qui permet d’accumuler de l’expérience dans le domaine du « swaging », emboutissage et sertissage et de se bricoler des projectiles « home made » à usage personnel.

A quoi se heurtent-ils donc ? Le cuivre se prête bien au formage à froid, mais nécessite de grosses presses puissantes professionnelle qui sont au-delà de l’emboutissage domestique, et même chose pour l’usinage où il faut minimum un tour. Le zinc, moins cher, le bronze, le laiton (que là il faut chauffer), et même l’acier, dans le calibre 12 ont certes une densité de section suffisamment grande pour n’avoir besoin de pas trop d’expansion pour faire tomber un sanglier standard, mais il faut quand même de l’énergie à l’impact et un minimum de déformation. Le design de la balle sera limité : il faudra stabiliser la traînée, sous-aléser pour le sabot donc des balles moins lourdes pas plus de 28 grammes) à petit méplat à l’avant, et une vitesse élevée, au risque alors d’un recul dévastateur ?

En Europe, c’est l’Italie qui a pour ça le laboratoire idoine, et pousse aux balles sans plomb, qui a le plus réfléchi à la question car disposant encore de fabricants de bourres (Gualandi, B § P) sensibilisés à la question. En fait c’est la forme qui freine car tous ces métaux plus « durs » que le plomb, qu’il faut impérativement ensaboter, au minimum dans une bourre à jupe standard (2), ne se compriment pas (3) pour passer dans les chokes. Il faut respecter le principe nez lourd, arrière léger, longueur de tube chargé à moitié, et mieux encore si joli nez arrondi et « queue » avec anneaux ductiles pour étanchéité et réduire la traînée, voire quelques « ailettes » bien conçues et placées. On le sait ces « ailerons » qu’on retrouve sur les balles Brenneke et Foster (4) ne produisent pas ou peu de rotation.

Sur la balle Corbin creuse (5) ou Rocket (son équivalent pleine) pourtant semblant idéalement profilée en forme d’œuf, et devant apporter précision et portée face à la Foster, certains problèmes de chargement n’ont pu être résolus : les ailettes se déformaient ou cisaillaient les bourres, et on tenta même des « tampons » aléatoires comme de l’amidon de maïs, durcissant sous la pression énorme et se muant en une sorte de sabot frangible ! Les ailettes stabilisatrices elles-mêmes laissaient craindre un effet lacet qui fut contourné de manière simple il y a bien longtemps, cette stabilisation par répartition de poids ayant une trop longue histoire avec Brenneke pour avoir si bien résisté au temps et à la hauteur de sa réputation.

Les « balles techniques » actuelles ont résolu pour le chasseur tous ces problèmes de polyvalence avec les armes modernes à chokes interchangeables pour dissuader le quidam de se lancer dans toutes ces opérations d’ingénierie hasardeuses et même dangereuses à trop vouloir jouer avec les pressions admissibles. « In medio veritas » il trouvera toujours de quoi nourrir son « deux coups », mais faudra encore et toujours faire des essais pour trouver chaussure à son pied, on peut quand même regretter qu’il soit plus judicieux d’adapter la balle à l’arme, que le contraire (ce qu’on fait actuellement), avant de se lancer à la poursuite de la bête noire…

1/ Trophy Copper sabot, Winchester Copper Impact, Remington coppersolid, Federal, etc. reprenant les Barnes à percussion centrale ou les Hornady de 458 Winchester Magnum.

2/ Voir vidéos sur le Net de tube de cuivre sous-dimensionné embouti (0.625 pour ensaboter avec une bourre jupe standard (0.729) bourré de plomb fondu à la torche propane, et faire une balle de 530 grains (34 grammes).

3/ Même le plomb pur a ses limites : voir les nombreux fusils d’autrefois dont le canon gauche étant prudemment estampillé « …non pour la balle » !

4/ La Brenneke apparaissant à Leipzig en 1898 fut perfectionnée en 1935, la Foster en 1930 succédait à la balle ronde ou franche du calibre dite « pumpkin » commercialisée en 1935 par Winchester, suivi par Remington et Federal, la balle sabot BRI en forme de sablier de 1968 fut modernisée en 1980 où débouchèrent dix ans plus tard les balles techniques françaises initialement étudiées pour usage maintien de l’ordre.

5/ Idée apparue pendant le conflit afghan de projectile creux pour le tir anti-matériel (citernes, véhicules), puis maintien de l’ordre en remplissant, parfois avec un « primaire » (amorce) de substances explosives ou incendiaires ou tout autre substance marquante…comme de l’encre de « toners » d’imprimantes, pour faire un nuage de couleur à l’impact !

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16 avril 2024

Les canons "Hastings-Paradox" étaient...paradoxalement français !

Tous noms incontestablement à consonance britannique (1) mais qui, pendant une vingtaine d’années (1988-2009) tinrent le haut du pavé pour le tir à balles du grand gibier nord-américain avec des canons rayés, furent, ce qui est méconnu chez nous, intégralement fabriqués chez Verney-Carron. Nul n’est prophète en son pays, tentons de voir pourquoi ce concept reste confidentiel en France.

Les années précédant le tournant du siècle aux Etats-Unis obligèrent les fabricants à s’adapter à des législations radicales : substituts non toxiques pour le gibier d’eau et les exigences des chasseurs qui, selon certains états (2), ne pouvaient plus chasser le « whitetail » avec des carabines. Cette période de transition boosta l’after-market des chokes, des optiques, des balles et des canons, et de ce côté, cocorico, certains Français du côté des balles et des canons firent honneur voici quelques décennies, à la souplesse du savoir-faire « made in France ». Hastings société de marketing et d’import dirigée par Phil Frigon, dont le siège était à Clay Center (Kansas) fut le premier, en faisant appel à la firme stéphanoise, à se positionner sur le marché des canons rayés « cantilever » pour lancer les premières balles rayées légères ensabotées s’engouffrant dans le sillage de la balle BRI.

Ces balles de style « headhammer » (3) à bourre attachée et canon rayé, permettaient face à la balle « pumpkin » ronde (4) tirée en lisse, ou à la Foster, de rivaliser avec les carabines jusqu’à 100 mètres et plus. Mais il fallait monter sur la carcasse des semi-autos et des fusils à pompe des scopes risquant d’être soumis à rude épreuve et de perdre en précision. Le montage cantilever ou porte à faux y palliait pour l’armada des armes grand public bénéficiant aux USA d’un important réseau de préparateurs « custom » : canons jusqu’à 34 pouces, bandes ventilées surélevées, détentes améliorées Timney. Se fournissant donc en France, Hastings couvrit d’entrée toute la série des Remington 870 Wingmaster à pompe, les 11-87 et 1100, le modèle 11 clone de l’Auto 5 (ce dernier couvert également jusqu’aux modèles magnum), les pompes Ithaca 37, BPS, et Winchester 12.

Les canons rayés des grandes marques existaient certes déjà, mais là, la précision était au top, et Hastings ajouta à sa palette, avec l’aide de Rottweil sa propre balle (Hastings laser slug puis Rottweil laser accurate sabot), et toujours Verney-Carron un dispositif « Metro » de réducteur de son pour zones urbaines. Il y eût également des chokes spéciaux acier pour dindes-oies, et un canon « Wadlock » à six rayures (0.005) sur tout du long, mais cette fois droites. Elles étaient censées arrêter la rotation des bourres, et une densité de la gerbe améliorée de 7 à 10 %.

Le canon rayé Hastings pour les balles possédant six rayures de même profondeur (0.005) à droite, au taux de torsion de 1/34 en calibre 12 et 1/26 en calibre 20, préconisait les montages Weaver et Burris, et déconseilla jusqu’en 1999 les balles cuivre Remington copper solid amenant chaleur et déformation des canons. Le cantilever permit aussi la démocratisation des scopes, points rouges et lunettes bon marché fabriqués dans les pays du tiers-monde, tant il apparaissait inconcevable de monter les optiques européennes hors de prix, sur des armes valant quelques centaines de dollars. Ce mouvement se tarit de lui-même au début des années 2000 car, aux USA, nombre de « deerhunters » restèrent fidèles non seulement aux antiques balles « citrouilles » ou Foster, mais aussi aux balles classiques européennes car, pour le tir de près concernant quand même la majorité des chasseurs, la différence n’était pas si critique face aux rayées ensabotées qui, en plus coûtaient un bras : 3 à 4 dollars la bête…c’était vraiment le coup (ou le coût ?) de fusil comme on dit au restaurant quand l’addition est salée !

Peu à peu, les usines inclurent dans les « combos » leurs propres canons cantilever et Remington sortit en 2008 son 870 « super slug » pour sa balle sabot Accutip au taux de torsion 1/35. Pour les adeptes du tir de loin (5) jusqu’à 150 mètres (précision 6 cm !), le Savage 220 à verrou s’avérait encore plus stable pour 450 dollars, soit à peine plus que le simple canon (200 dollars) du combo Remington. Dans le même temps, les grandes enseignes comme Cabela’s se firent également fabriquer (comme le « Badger » par American Barrels) des canons coûtant moitié moins, et Hastings cessa son activité fin 2009. La situation s’équilibra un moment entre les trois grandes familles du tir à balles du grand gibier au fusil de chasse avant que le cochonglier ne rebatte les cartes, les balles ensabotées rapides pour le whitetail n’étant plus opportunes dans le bush au Texas où le « razorback » peut dépasser les 150 kg. Etrangement nous sommes restés à l’écart de tout ça, mais il est rassurant de constater que nos industriels, présents dans ce mouvement sont toujours là pour adapter armes et surtout munitions (6) aux évolutions de la situation du biotope.

1/ La célèbre bataille du même nom (1066) porta le duc de Normandie à la tête de la perfide Albion, et le système Paradox de rayures profondes en bout de canon est attaché à la célèbre firme londonienne Holland/Holland.

2/ Tous ceux où la chasse du cerf de Virginie est une institution : Pennsylvanie, Maryland, Delaware, New-Jersey, Massachussets.

3/ Voir archive du 12 novembre 2023.

4/ Voir archive du 11 avril 2024.

5/ Le célèbre rocker devenu « influenceur » NRA a même sorti via ATI (American Tactical Imports) sa propre cartouche dans ce domaine. Voir ci-dessus.

6/ Les balles Sauvestre et Fier que nous employons tous, datent pour leur conception de ce mouvement, ayant été au départ prévues pour leur usage par les forces de sécurité notamment pour stopper les véhicules aux barrages routiers.

13 avril 2024

22 LR et Remington : "Goldfinger" et "opération tonnerre" !

Les deux munitions « Golden bullets » et « Thunderbolt » du « géant vert » (1) qui nous intéressent en France où elles sont disponibles et « cheap » dans leur vaste gamme (2), ont fait l’objet aux USA d’une longue polémique car massivement populaires avant que CCI n’entre en scène au mitan des années 70 avec la « Stinger »(3). Soit disant sales, mal foutues et imprécises, le débat en Amérique, fut intimement lié à la pénurie du petit calibre au tournant des années 2010 où elles, au moins, étaient disponibles.

Largement dépassées maintenant  à la chasse par toutes les « mini mags » (mais valant moitié moins en prix), elles étaient la fin de course du mouvement hautes vitesses amorcé un peu avant-guerre, et vendues par seaux entiers pour les adeptes du « plinking », car un peu plus puissantes que les autres munitions vrac, elles étaient censées mieux faire cycler les semi-automatiques, par exemple Ruger 10/22 et Remington 66 « Nylon » (voir ci-dessous cette carabine en démonstration). Par contre elles suscitèrent une immense incompréhension en qualité de fabrication par rapport aux percussions centrales de la marque (face par exemple au best-seller « Corelokt »), et un sentiment amour-haine de la part des fans du petit calibre : la saleté empêchait parfois les chambres flottantes…de flotter, la dispersion verticale indiquait des variations de vitesse (qui furent mesurées de 10 à 40 m/s), et le sertissage aléatoire amenait deux catastrophes. Dans les carabines semi-auto l’angle d’alimentation raide du 22 LR empêchait les balles de s’aligner correctement (voire les pliait en deux au verrouillage !), et le « jour » entre les deux, si mal stockées, laissait passer l’humidité vers un choix de poudre et un amorçage aléatoires.

Dans le domaine des hautes vitesses (4) la combinaison est difficile avec le poids de balle, ici abaissé à 36 grains (2,33 grammes) pour la version pointe creuse. Ce, afin d’aller plus vite, mais sachant que passés les 360 m/s, la précision risque fort d’en pâtir. Celle-ci dépend alors dans une large mesure de la qualité de fabrication que l’on trouve dans toutes les marques « compétition » alors largement européennes : un processus lent, avec suivi qualité tout du long, et tests par lots de niveau décroissant sur toute la chaîne. Là, au contraire, l’usine de Lonoke (Arkansas) accélérait la machine, avec des tolérances plus larges, misant sur la quantité plus que la qualité, le conditionnement (le fameux vrac) étant même bâclé, voire shunté lors de l’emballage final soit sommaire soit par "seaux" entiers comme ci-dessus. Les balles qui s'entrechoquent sans cesse y étant fragilisées.

Ces munitions permettant de s’entraîner et tirer à grand volume aussi à l’arme de poing arrivaient à satisfaire les utilisateurs de revolvers et carabines à verrou et même ceux qui, pour le varminting, pouvaient se contenter d’une précision de 3 pouces (7cm) à 50 mètres dans du tout-venant, voire bien sûr beaucoup mieux avec une arme au top. Leurs grands concurrents de l’époque étaient les Winchester Dynapoint et Xpert. La pénurie de 2013, née quelques années plus tôt des énormes besoins de la métallurgie chinoise alors en plein essor (5), conjuguée à la vogue du « survivalisme » (autour de célèbres séries TV apocalyptiques comme « The walking dead ») virent les tireurs se jeter en masse (6) sur ces munitions alors partout disponibles, et évidemment se diviser sur leur intérêt actuel, des décennies après leur lancement sur le marché.

« Golden bullets » et « Thunderbolt » sont finalement assez similaires en vitesse, puissance et flèche à 100 mètres : les balles de 40 grains ne sont cependant pas identiques : la « goldie » est lavée cuivre, la Thunder est en plomb, mais on reste autour de 387 et 380 m/s et 178 et 190 joules tombant à 111 et 118 à 100 m. dans une flèche classique pour le calibre de 15 cm à cette distance. Où la différence peut être sensible c’est pour la version HP ou pointe creuse de la Goldie, est plus légère pour conjuguer expansion et puissance de frappe. C’est d’ailleurs un des atouts de ce projectile bon marché dans les disciplines aux silhouettes métalliques, mais qui sera contrebalancé en discrétion sur le terrain par toutes les HP subsoniques avec lesquelles, en plus, un silencieux sera bien plus efficace.  Comme la plupart de nos collègues américains on se consolera en se disant que disponibles chez nous et accessibles, c’est déjà suffisamment intéressant de pouvoir tirer quelque chose d’universellement disponible dans des armes pas exclusivement faites pour les Eley Tenex qui ne sont pas au même prix ! Comme dit l’autre, peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse…

1/ Racheté par Vista, maison-mère de Federal, les deux munitions que tout le monde autrefois « aimait détester » si on en croit les forums « rimfire », sont désormais au niveau de la concurrence

2/ La Golden bullet se fait aussi en 22 Short 36 et 29 grains, toujours lavée cuivre.

3/ Voir archive sur la « Stinger » du 14 avril 2021.

4/ Voir les « années d’or » Remington, archive du 12 mai 2021

5/ Voir sur Norinco et consorts, archive du 9 juin 2022.

6/ En quelques jours, en 2013, on pouvait voir, selon les arrivages dévalisés en 48 heures, le pack de 500 passer de 14 à 25 dollars, les tireurs n’hésitant pas à passer d’un état à l’autre pour se réapprovisionner !

 

 

11 avril 2024

Un "ballon rond" pour dribbler le sanglier ?

Juste retour des choses, le sanglier qui dévaste à l’occasion nos terrains de foot, pourrait bien pâtir bientôt d’un retour en pleine poire du « ballon rond », formule rarement utilisée chez nous à part la fameuse balle sphérique « Prévot ». Un type de projectile assez largement étudié dans nos colonnes (1), mais qui bénéficie d’une vaste littérature aux USA où plein de gens rechargent et où surtout il y a le vaste retour d’expérience des balles « pumpkin » et surtout des « muzzleloaders » qui chassent à la poudre noire avec de gros boulets.

Vu que tout le monde autour de nous se passionne pour l’envahissante bête noire, au point qu’on envisage même le retour de la « terrible » chevrotine, pourtant massivement employée jadis par nos pères, tentons de donner quelques clefs de compréhension sur la balle sphérique et ses « rebonds » inattendus. Cette forme géométrique est, de fait la plus difficile à déformer et à détruire, et dans l’absolu, sa force de destruction et pénétration considérables, au point que dans le « deep south » elle est privilégiée pour y tirer les alligators ! Mais il faut aussi avant, franchir quelques écueils…

La tradition américaine de la balle « pumpkin » ou franche sphérique du calibre est aussi vieille que celle du mousquet Whitney (alésage 0.690) émis avant la guerre de Sécession pour le service de l’US Navy avec le couteau baïonnette Dahlgren lequel, avec 730 grains (47 grammes) devait certes faire de jolis trous ! Bien avant que la balle ne Foster fasse son apparition au milieu des années trente, (concomitante ded la popularité du … « 30-30 »), la « round ball » dite aussi « pumpkin » (citrouille !) grâce aux surplus disponibles, facile à recharger, représentait l’archétype de l’arme de cellier, ou d’arrière-cour du ranch. Cette balle ronde ancienne était en effet difficile à battre pour lancer et charger facilement à moins de 50 mètres si on était loin de tout. La précision et la portée passait au second plan quand il s’agissait de repousser tous les indésirables :  coyote s’attaquant aux veaux, renard dans le poulailler, même si en rebondissant, le gros boulet pouvait emporter deux ou trois belles poules rousses, de tante Maggie qu’on voit ci-contre, prête à tirer, derrière !

Avant que les canons rayés Hastings ne se développent, l’arme classique dans ce domaine c’était le HR « Topper », (une sorte de Simplex si on veut), coupé à 26 pouces avec pour effet radical de le rendre ipso facto définitivement « Cylinder » soit lisse, impératif pour passer dans l’alésage nominal du « 12 gauge » soit 0.729. Les balles devaient donc être sous-dimensionnées autour de 0.662 (2) en s’inspirant du temps de la poudre noire (3) de ses artifices de calepinage et de lubrification pour résoudre les deux grands critères régnant sur la propulsion de la sphère : une bonne étanchéité et le centrage dans l’alésage.

La « boule » semblait facile d’utilisation si on suivait la théorie du poids de charge identique de grenaille pour les mêmes composants (4), mais il fallait une balle relativement « dure » qui ne se déforme pas et l’asseoir comme il faut dans une bourre grasse ad hoc, soit percée en forme de « donut » (le beignet…cher à Homer Simpson !), ou à la caler dans des petits coussins moëlleux fleurant bon la cuisine de tante Maggie susnommée : graines de lin, farine d’avoine ou la fameuse COW (cream of wheat) qui avait l’avantage de ne pas durcir au coup de feu. L’arrivée en 1963, du plastique et des bourres à jupe Remington facilita encore la chose pour tous les « rednecks » qui continuaient de prélever le cerf de Virginie avec leurs vieilles pétoires en lisse (5) et qui trouvaient la « pumpkin » meilleure en pénétration que la Foster.

Le retour déjà ancien sur la formule « Paradox » de rayures profondes en bout de canon, et les canons rayés Hastings ne parvinrent jamais à entraver la popularité de la balle ronde car, cette fois, il fallait se rapprocher dangereusement de l’alésage nominal. On connaissait pour les anciens 12 se chargeant par la bouche le taux de torsion de 1/104, et là les sabots demandaient bien plus rapide (1/34) et un couple énorme dans le sens contraire des chokes vissés qui commençaient à se populariser. Rester en lisse où tout le matériel existait ainsi que des centaines de formules de chargement permettait à la balle de 0.662 de passer tous les chokes avec une précision acceptable de 9-12 cm à 50 m, mais une meilleure pénétration (6), et tout en continuant de bricoler dans son coin. Avec les bourres à jupe plus épaisses de l’acier il s’agit alors juste d’ajuster au petit poil la colonne en garnissant la base avec des « cartes nitro » (voir ci-dessous) ou éléments de bourres grasses coupées à la bonne hauteur dans des étuis transparents donnant une immédiate identification visuelle. Le demi-rond avec coupelle rigide transparente pulvérisée au tir étant recommandé pour la même raison, mais aussi parce qu’il tient plus fermement le ballon pour rendre la combustion plus achevée que le sertissage étoile.

Maintenant, où voulons nous en venir ? Aux USA, le pragmatisme cynégétique ne s’embarrasse pas de préjugés : face au sanglier tout va plus vite que chez nous où on ergote sur tout au pot de fin de battue autour d’un verre de « jaune » sans rien vouloir connaître des règles de la balistique. Même s’ils ont inventé le concept des petites balles rapides ensabotées précises à 100 m et plus, la tendance américaine est maintenant, aux fusils « smashdown » ou (traduction libre !) « la grande claque qui fout par terre », sur le tir rapproché de gibiers de grande taille et (ou) dangereux, et donc d’un design de balle différent de ce que tirent les chasseurs de cervidés, et pas non plus vraiment un sabot « lourd » qui obéirait à d’autres contraintes.

Des travaux de John Linebaugh, (pourtant inventeur d’armes de poing rayées de fort calibre) il ressort qu’à égalité de poids de balle et de calibre, la rotation n’a que peu d’importance sur la pénétration, le lisse ayant même beaucoup moins de friction. Les dommages tissulaires sont causés par les zones de méplat (où la bille ronde n’est pas trop mal lotie), la vitesse et la pénétration étant liées à la densité de section, et pas seulement au rapport poids-vitesse. L’idéal serait entre les deux et un compromis qui reste à inventer : une sphère ronde traitée dure thermiquement prolongée par un cylindre à la taille exacte de l’alésage en forme de « queue » stabilisatrice. Nos ingénieurs français en pointe voici quelques décennies sur les balles « techniques » sauront-ils prendre…la balle au bond ?

1/ Voir archives du 23 mai 2022 sur la balle de plein calibre, 23 septembre 2020 et 21 février 2017 sur les balles franches, 10 avril 2020 les travaux « Shotgun from hell » de Ed Hubel.

2/ Lyman fait des moules à 0.662, RCBS en 0.678, et le rechargement des balles extrêmement documenté, voir par exemple le site « Castboolits »

3/ Le chargement par la bouche des armes de chasse à poudre noire, activité quasi inconnue en France est un art en soi qui possède ses contraintes, mais celui par la culasse en a d’autres : transitions du sertissage, du cône de forçage, des rétreints même légers.

4/ Contrairement à la balle cylindrique, la charge de grenaille peut être considérée comme un fluide qui transmet plus de friction et de pressions aux parois de la chambre et de l’alésage. La balle cylindrique ne frotte qu’à l’équateur d’où la tentation de jouer, à tort, sur la quantité de poudre. Toute variation sur les composants d’une cartouche donnée sont dangereux : le simple changement d’amorce, de bourre, de poudre, d’étui peut faire monter la pression de 1500 à 3000 psi d’un coup. Ce qui se ressentira au recul, à l’éjection difficile, à l’état des composants.

5/ Sam Fadala, dans « The complete shooter », reconnaissait encore en 1984avoir pris un gros cerf avec une round ball de 0.535 filant à 606 m/s

6/ Sans charger au maximum, les « deerhunters » avec une précision de 20 cm à 70 mètres pénètrent 8 pouces (20 cm) de sapin !

 

7 avril 2024

Horreur, "à l'insu de mon plein gré" mon fusil porte mal la balle !

Entendue des dizaines de fois, cette petite ritournelle vaudrait surtout pour les armes anciennes, à deux canons, fortement chokées « patrimoniales » comme nous l’avons évoqué tout récemment (1) et qui demanderaient maints essais avant de trouver « chaussure à son pied », ou pour résumer « la bonne balle »…

Ces essais nécessaires s’effectuaient jusqu’ici dans un flou artistique le plus complet, les fédérations, devant la prolifération du sanglier, s’y collant peu à peu (2). Pour le tir du grand gibier faudrait un peu se soumettre au même test que quand on fait le tour du garage : quel paletot, casquette, cartouche, sont toujours pris en premier ? Eh bien, pour les armes lisses, sans trop analyser, il faudrait aller à ce qui va bien en visée rapide et instinctive, et si on veut parler d’arme « dédiée » plutôt privilégier le mono canon, et donc un semi-automatique à chokes interchangeables lisse (C) ou lisse amélioré (IC). L’ajout d’un point rouge ne sera pas la solution miracle comme pour les carabines, car il va encore alourdir l’ensemble, modifier l’équilibre de l’arme, pénaliser la maniabilité, et surtout perturber le tir habituel, celui qu’on pratique à la billebaude ou sur les planches. Les possibilités de busc réglable y sont réduites, et il faut trouver parfois péniblement la petite lueur dans son tunnel, tout en la protégeant des conditions atmosphériques.

La forme lisse rend l’arme plus facile à saisir n’importe où : pas d’arêtes vives, simple à utiliser et à recharger, la fonction semi-automatique amortissant le recul permettant de tirer toute la gamme des balles, même les plus lourdes Brenneke jusqu’à 39 grammes. Les balles, de nos jours sont censées passer dans tous les chokes, les balles « techniques » (Fier, Sauvestre, Rubin Sabot), encore mieux que les autres. La Prévôt « S », très rapide, elle aussi ensabotée, permet moins de corrections, et sa couleur « orange blaze » de nos battues, permet de les retrouver plus facilement sur le terrain une fois tirées. Enfin, il ne faut pas négliger la balle Gualandi (Tunet Tornade, Rottweil Exact, voir ci-dessous), faite d’un plomb plus dur, et pénétrante du fait de sa forme. Il y a chez nous, à part la « Rackmaster », peu de balles Foster, et les « sluggers » bon marché faites pour le « tactical » et renverser des cibles métalliques risquent de ne pas fonctionner tout le temps sur le vaste échantillon de gabarits de bêtes de chasses rencontrées. Voir à ce sujet notre archive du 21 novembre 2022.

Comme on ne tire bien que ce qu’on voit bien, il faut suivre les grands auteurs qui préconisaient 16 yards donc une quinzaine de mètres, bien calé depuis un banc, l’assiette en carton, (celle qui sert aux « cahouèttes » au pot d’après-battue !), donnant à cette distance une bonne idée de la zone vitale d’un goret. Avec chaque arme, il faut aller au bout de la balle trouvée, et puis après sans cesse s’y tenir et ne pas oublier, en fin de saison, de réformer celles qui ont souffert de la manutention. A ce tir posé, de mettons 3 fois 5 balles dans l’assiette, tirer ensuite à bras franc, dans les conditions du poste, et après éventuellement reculer un peu en corsant l’affaire, avec trois assiettes de suite espacées de 3-4 mètres, simulant à moindres frais le lourd appareil de sanglier courant. Le but étant de tirer en cadence et en suivi comme si déboulait à la corne du bois une petite compagnie.

Le tir lui-même n’est jamais vraiment bien analysé comme le font les sportifs qui hantent les stands, la détente la plupart du temps « spongieuse » des semi-autos n’incitant pas trop non plus à s'épancher sur ces soucis du détail. Si on « fane » une fois que la balle est trouvée sur le tir posé (3), c’est qu’on ne tire pas de la même manière, ou que la visée n’est pas cohérente d’un coup sur l’autre. C’est-à-dire que sur le premier, (mettons un ragot qui se dérobe discrètement), on va se concentrer sur le guidon, l’autre (par exemple une compagnie qui franchit la ligne pleins pots), sur la cible, ou qu’on n’est pas stable, ce qu’on devrait avoir prévu dès l’arrivée au poste. Si on entasse les balles en bas à gauche c’est signe du « coup de doigt » classique et du manque de contrôle de pression et qu’on appuie d’un coup sec.

En haut à gauche (9-12 heures) c’est signe d’anticipation et de crainte du recul en resserrant la prise au moment du tir, ce qui pousse l’arme vers le haut. C’est bien sûr nuisible aux coups de suivi qui risquent tous ensuite de passer au-dessus du dos des bêtes noires qui s’enfuient à toute allure, surtout avec un « automatique » incitant à enchaîner rapidement avec les « sauts » de canon (4) à prévoir. C’est dans cet esprit que sur le chevreuil, animal bien plus fragile que le sanglier, on incite à tirer bas pour « démonter » l’animal ou le faire chuter. Les tirs bas, tous à 18 heures indiquent une mauvaise maîtrise du suivi, un relâchement après chaque tir, notamment des débutants qui doutent, constatent ce qui se passe, et reprennent comme ils peuvent dans l’émotion, la ligne de visée en soupirant « caramba…encore raté » !

1/ Voir archive du 15 février 2024.

2/ C’est souvent loin et fastidieux, pour revenir d’une formation sécurité battue, on nous dit que ces séances pourraient être décentralisées chez nous, pourvu qu’on ait l’autorisation du propriétaire, toutes les conditions de sécurité et légales (PC, etc.) étant évidemment assurées. D’autres infos disent qu’en plus du propriétaire il faudrait réunir le ban et l’arrière-ban de la localité :  mairie, gendarmerie, et même assurances de la société…

3/Toutes ces observations valant bien sûr pour un tireur droitier.

4/ Ce qui explique les freins de bouche à évents dont sont dotés les chokes spéciaux de tir à la sauvagine.

 

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5 avril 2024

22 Creedmoor : un 22 à percussion centrale de plus

C’était à prévoir, la popularité fulgurante du 6,5 (2007) puis du 6 mm (1) Creedmoor a amené à penser pouvoir réduire ce dernier à .224, et concurrencer, avec des balles modernes à fort coefficient balistique les « vieux » calibres varmint, à percussion centrale très rapides : 220 Swift, 25-06, 22-250. D’accord nous sommes encore là dans des spécificités américaines dont nous sommes friands, mais qui avait été effleuré chez nous par la relative popularité du 222 Remington dans l’effacement des nuisibles, puis les débuts des campagnes printanières dites du chevreuil d’été.

C’est un passionné texan Derrick Rattcliff (2) qui, en 20013 a amorcé cette transformation donc assez récente et encore légère en retour d’expérience de la part des chasseurs de cervidés et antilopes pronghorn, qui veulent ajouter au menu les « ennemis des cultures » (marmottes « rockchucks », lapins, écureuils terrestres) et surtout les coyotes, ennemis coriaces des ranchers harcelant le bétail via une régulation nocturne utilisant des « calls » (appeaux), et surtout des lunettes thermiques. Un service apprécié des éleveurs qui peut, derrière, ouvrir aux chasseurs, l’entrée à d’immenses territoires pour tout le reste. Un peu comme chez nous les régulations de corvidés qui nous font « bien voir » des agriculteurs, obligés sinon de sans cesse refaire leurs semis de maïs…

Bien sûr nous sommes dans des vitesses (plus de 1000 m/s) qui concurrencent la référence 220 Swift, mais avec des balles plus lourdes : on passe de 50 à 85 grains voire plus (3). Avec une balle de 68 grains, à 200 mètres la vitesse est encore de 857 m/s et une flèche d’à peine 5 cm, et encore 1450 joules donc une énergie suffisante si placement, sur un whitetail. Tout ça dans des actions courtes et légères, au recul insignifiant, et un rechargement plus facile n’ayant pas à passer par la fastidieuse formation au feu (4). Par rapport aux anciens calibres, on relève une conception plus moderne et efficace des munitions avec des balles plus lourdes et aérodynamiques conservant bien plus d’énergie dans la zone 0-300 mètres sans trop jouer avec les tourelleaux de réglage des scopes.

Très vite, ce petit calibre a pu intéresser les tireurs sportifs PRS et les plates-formes AR 10 avec quand même l’écueil de la durée de vie des canons (un classique avec ces monstres de vitesse), et du taux de torsion qui n’a plus rien à voir : 1/8 ou 1/7 face aux 1/12 du 22-250 Remington (ex 22 Varminter). A cela s’ajoute le choix de la longueur du canon, puisque à des vitesses similaires (969 m/s et 1090 m/s) on passe d’une balle de 55 grains du 220 Swift à 80 grains, plus lourde, mais surtout plus longue et dont le « spin » (les tours/minute si on veut) lié à une nouvelle forme bien plus aérodynamique, est très différent. Ci-contre à g. les trois calibres Creedmoor proches de g. à dr.  : 6,5 puis 6 mm et 22.

Bien évidemment tout cela est loin d’être arrivé chez nous, et en plus pour tirer quoi :  les ragondins à 300 mètres ? La vitesse et la puissance sont là, et dans des armes légères et modernes, la filiation avec le 6,5 Creedmoor est évidente, mais le succès de ce dernier n’est pas garanti dans notre pays où le poids des habitudes est fort, et, en plus, le développement des modes de chasse limité. Allez convaincre votre chef de ligne que vous allez tirer de la bête de compagnie avec du « 22 », même si celui-ci est largement dans les clous en joules !

1/ Voir archive du 26 janvier 2024.

2/ Sa firme Horizon Firearms, puis Peterson Cartridges, et Texas Ammunitions en 2019 ne le proposaient que pour le rechargement, et depuis 2023 Hornady s’y met.

3/ Federal est monté à 100 grains pour un calibre 22, soit trois fois la percussion annulaire (22 Stinger) la plus rapide.

4/ En utilisant des étuis de calibres proches, dans lesquels on tire une charge légère de poudre mettant, par effet de souffle, le collet aux dimensions souhaitées de nouvelles cotes. Un système « Improved » ou amélioré, popularisé par P.O.Ackley « l’armurier de l’Amérique ». Voir archive le concernant du 29 mai 2019. Ci-dessus : une belle carabine 22-250 de ce type sur base Remington 700.

 

 

2 avril 2024

20 contre 12 : handicap ?

Les petits calibres (20-28, le 16 étant abandonné aux nostalgiques du « vintage » dont nous sommes) étant à la mode, le débat reste vif à leur sujet entre chasseurs. Fins et légers ils étaient l’atout des « épées » il y a quelques décennies, mais maintenant, il y a du « light » partout en 12 ! Autour de la même charge, mettons 32 grammes, est-ce match nul et balle au centre ?

A ce niveau, la densité est principalement contrôlée par la nature de la cartouche (bourre grasse ou à jupe), et par le niveau du rétreint qui n’est pas du tout le même : une constriction de 0.020 en 20 est de 83,25% contre 74% en 12. Une différence qui a été analysée par exemple sur un Browning Citori tirant à 30 mètres la même cartouche 28 grammes de Winchester AA # 8 en demi-choke (M) : 74 % du motif pour 83 % chez le 20. Par contre le principal facteur déterminant en faveur du 12 dans ces deux calibres finalement sur le papier, assez polyvalents, c’est qu’il met, du fait de son plus fort alésage (.729 contre .615) bien plus de billes à 40 mètres, augmentant la taille du motif et sa longueur, donc bien plus de chances d’atteindre sa cible.

Comme l’écrivait le balisticien B.Brister « c’est la charge qui tue et pas le calibre », et le Dr Jones (in Sporting Shotgun Performance) après d’innombrables tests conclut également que passés 40 mètres le 12 l’emportait toujours. Point par point, chaque aspect mérite d’être analysé : à la billebaude, devant soi, où on porte plus qu’on tire vraiment, le 20 ne sera pas plus léger car les 12 « light » le sont aussi tous maintenant mais plus « fin ». Par contre, il ne pourra pas aller jusqu’aux charges 1 5/8 (46 grammes) qui peuvent être utiles en fin de saison ou à la passée. Au gibier d’eau, justement, l’acier le désavantage encore car le 12 pour dépasser les 480 m/s quand le 20 doit réduire de beaucoup à 350 m/s et ne plus tirer que 7/8 soit 24 grammes et donc se limiter au tir à courte distance sur les leurres. A la battue, en lisse qui représente la majorité chez nous, net avantage aux grosses balles, seul le rayé pour balles exclusivement ensabotées réduit l’écart, mais avec le même recul.

C’est au niveau du sporting que les analyses furent le plus poussées, car le skeet où on tire de près avait tendance à niveler les problèmes de distance vus plus haut. Les notions d’avantage à la légèreté déjà s’y discutaient côté swing, confort et recul sur le tir dans des séries soutenues il est vrai assez rarement rencontrées à la chasse. Au parcours de chasse des spécialistes (1) furent obligés, pour ne pas cantonner les petits calibres à des sites exclusivement dédiés, furent obligés de dresser des statistiques précises pour calculer des « handicaps » censés mettre plus ou moins tout le monde sur un pied d’égalité, la base restant quand même le 12 comme calibre « principal ». On donna donc des plateaux en plus (2) aux uns et aux autres, considérant que ces calibres « secondaires » étaient moins familiers aux tireurs et avec des charges généralement plus faibles : 24-26 grammes contre généralement 32.

On stoppa assez vite l’expérience car dès que les tireurs maîtrisaient le calibre, le 20 nanti de son avantage de + 5 plateaux l’emportait tout le temps, illustrant bien que ce n’est pas l’équipement qui compte mais plutôt l’habileté au tir ! Ce qui vaut assurément pour la chasse, où les adeptes du petit calibre n’ont qu’une seule solution si les distances s’allongent, que de serrer d’un ou deux crans vers le haut, pour tenter d’atteindre des motifs approchant ceux du 12.

1/ Après deux ans d’observations de la part de Bruce Buck du Connecticut Travelers.

2/ Plus 3 plateaux pour le 16, 5 le 10, 10 le 28, ou encore 5 pour les juxtaposés et fusils à pompe, le tout avec les charges identiques NSSA de 28 grammes du 16.

30 mars 2024

Levier de sous-garde : ceux qui donnent...la réplique !

Avec la prolifération du sanglier, la question de passer à la carabine offre bien plus de possibilités qu’il y a seulement 20 ans, en calibres, comme en modes d’action. Les carabines à levier pour toutes sortes de raisons déjà évoquées ici (1) ne vous feront plus passer pour un hurluberlu fan du Far West : après, reste le choix de la marque et de l’arme. Et la différence de prix significative entre les grandes marques historiques et les « répliques » en calibres d’armes de poing à moitié moins cher peuvent vous faire réfléchir.

Lorsque Winchester a arrêté de produire le mythique modèle 92 en 1945, Rossi et quelques autres ont intensifié leurs efforts, (comme ce fut le cas pour le Colt 1911), de produire des copies sous licence. Winchester avec le millésime suivant (Mod 94) avait misé sur le calibre 30-30 plus long, tout comme Marlin quand se développa le Cow-Boy Shooting Action (2), même dans sa version 44 Magnum, mais à un taux de torsion trop court (1/38 quand il aurait fallu 1/20). Le génie de Rossi, outre l’ajout d’une sécurité transversale supplémentaire c’est d’avoir conservé l’idéal du mod.92 conçu par J.M.Browning d’une version plus petite et plus fine du modèle 86 chambrant des calibres compatibles armes de poing et d’épaule utiles pour cavaliers et ranchers. De 1892 à 1945 il s’en vendit un million d’exemplaires !

Rossi était une vieille marque brésilienne qui opéra son entrée aux USA en 1968 (Garcia puis Firearms international) et fit un tabac en 1975 avec la carabine « Puma » à prix modéré, mais aux cotes encore rudimentaires, compensées par l’usage de ressorts lourds pour maintenir l’ensemble, mais déjà appréciée au CAS. A la mort de Sam Cummings (1999) ses anciens employés continuèrent avec le Brésil puis l’Italie jusqu’en 2008, quand Rossi se réorganisa un peu avant avec Taurus (3) et de nouvelles machines donnant, après 2000, une meilleure copie. Désormais, tous ces fusils de reproduction (4) sont en aciers modernes, à la limite bien plus solides que les originaux en laiton ou fer forgé qui valent cependant une fortune sur le marché de la collection.

Maintenant voyons en quoi, à moins de 1000 euros, leurs calibres, du 22 LR au 454 Casull, peuvent nous intéresser. Les deux 9 mm (38 Special et 357 Magnum) bénéficient désormais aussi de la technologie Monoflex de chez Hornady, et le fait de les tirer dans un canon plus long donne toujours un gain moins spectaculaire mais significatif quand même chez les calibres Magnum. La balle de 125 grains passant du canon de 4 pouce (revolver) à 16 pouces (carabine) monte à 301-382 m/s pour le 38, et 453-642m/s dans le 357 Magnum. On peut bien sûr monter en poids de balles et la chute du 357 n’est que de 13 cm à 100 mètres. Ci-dessous : 357 et 44 Magnum.

Plus conséquent, le 44 Magnum (de l’inspecteur Harry !), qui approche les performances des cartouches de 30-30 « usine » à moins de 100 m est souvent opposé au 45 Colt beaucoup moins connu notamment pour la chasse en France où il est cependant lui aussi utilisé au CAS. Ce dernier souffrit de n’être breveté au départ que pour l’US Army, puis d’être ensuite barré par le binôme pistolet-carabine en 44-40 et à l’expiration de ses brevets il y avait plein de gros pruneaux pour lui voler la vedette : 44, 38-40, 45-65 et surtout bien sûr le 45-70 Gvt (que l’on voit tout à droite ci-dessous) et la Marlin 81. Il fut fabriqué jusqu’en 1940, et revient grâce au CAS où ses 484 m/s et plus de 2000 joules à la bouche aident à renverser les plots en fonte, et au besoin, bien sûr, un éventuel beau ragot de passage…

Il existe (aux USA bien sûr) une vaste littérature sur le peu de différences entre les deux pour prélever wapiti, élan, ours ou encore porcs sauvages souvent considérés comme aussi coriaces que les précités. Elmer Keith dans son dernier livre (Sixguns) préconisait les balles lourdes à fort méplat, Brian Pierce dans « Handloader » prit en travers un gros wapiti avec une grosse (250 grains) balle lente (300 m/s), et John Linebaugh a écrit « tout ce que le 44 Magnum fait, le 45 Colt le fera mais avec moins de pression » et aussi semble-t-il avec un recul plus gérable, voire un petit gain de vitesse supérieur dans la carabine. Enfin plus récemment, ces armes tirent aussi le 454 Casull, calibre créé en 1983 par Dick Casull et Jack Fulmer pour le (gros !) revolver Freedom Arms, et dont la balistique est proche du 45/70 Gvt. On peut y loger des balles de 325 grains et 550 m/s qu’il serait peut-être stupide d’utiliser avec des petites carabines légères aux crosses dures reproduction de l’époque où les plaques de couche étaient en laiton-acier et dont le recul sera sans doute assez punitif ! Malgré les réserves déjà évoquées, jusqu’à 50 mètres la maniabilité et le maniement sécuritaire de ces armes opérationnelles et relativement bon marché, ne manque finalement pas d’attrait à la battue où le gibier moyen n’excèderait que rarement le quintal.

1/ Voir archive du 31 mars 2018 et du 11 mars 2024.

2/ Compétition en costumes d’époque créée en 1979 aux USA (2007 en France) aux trois armes : revolver, shotgun (fusil de chasse), carabine à levier, et 120 000 compétiteurs dans le monde.

3/ Taurus fut fondé en 1939 et se fit connaître par ses copies de revolvers SW exportés à partir de 1968 aux USA, la firme américaine entrant au capital ce qui lui permit d’étoffer son bagage industriel avant de reprendre son autonomie en 1977, puis se développer avec l’aide de Beretta pour fournir l’armée brésilienne. Une filiale proprement américaine permit, à partir de 1984 de pénétrer cet immense marché, et absorber Rossi en 1997 et devenir le 3è fabricant mondial de revolver derrière Ruger et SW.

4/ Pour ces armes devenues culte il existe aux USA  des armuriers spécialisés réglages et polissages.

 

27 mars 2024

Sanglier : le 243 Winchester est-il trop court ?

La question ne se pose pas encore chez nous, mais pourrait tenter avec les nouveaux singles ou kipplauf qui arrivent sur le marché (Bergara B 13 par exemple), alors qu’aux USA où ce calibre demeure un passe-partout varmint-whitetail commun, il est aussi beaucoup utilisé depuis l’invasion des « cochongliers » petits et gros, mais dans des conditions qui ne sont pas celles de la battue hexagonale.

Blessé, il y est considéré comme un « dangerous game » car, il va dans le Midwest au « bush » qui est partout, et dans le Texas aux épineux pleins de cactus…où il vous attend de pied ferme pour se venger ! Né en 1955 (6,2 x 52) du 243 Pooper de Warren Page (1), et de la lignée des « 30 » dans le double usage nuisibles-cervidés il a remplacé le 257 Roberts et le 250-3000 Savage et reste plus populaire que les 22-250 Remington, 243 WWSM, 6 Rem, 240 Weatherby Magnum. Très précis (0,5 MOA à 100 M), vitesse (plus de 900 m/s) et énergie initiale (2652 joules) semblent coller aux critères grand gibier, avec des armes compactes, légères et surtout sans recul…9 fois moins que le 300 Winchester magnum, massivement employé dans nos battues ! Ci-dessous comparaison entre le 243 (à g ) et le 270.

C’est justement c’est cet aspect de fusil « de camion » bon à tout faire un peu comme le 30-30 qui l’a amené à cartonner sur les sangliers américains où surtout avec les balles modernes, tout certes peut tomber à moins de 100 mètres, mais tout se complique face à la diversité des sangliers selon les états. Dans le Midwest on trouve de tout, dans le « vieux Sud » plutôt des moyens comme chez nous, et en Floride des 50-60 kg. Mais au Texas, ce sont plutôt les plus de 150 kg qui pullulent, et c’est là que le débat a fleuri (2) car le calibre y était déjà considéré au départ comme un fusil d’expert et non de débutant pour les cervidés avec un bon placement critique, la balle de 100 grains semblant tout en bas du spectre de la puissance de destruction.

Elle n’y est pas employée de près, en chasse devant soi le tir pouvant atteindre 500 mètres où il y a encore autour de 636 m/s et 1100 joules, mais où le choix de balle est déterminant. Evidemment toutes les balles varmint qui démarrent à 55 grains sont à proscrire et les choses sérieuses démarrent à 85 grains, mais la confusion a été entretenue par les experts qui utilisent les balles modernes très précises mais fragiles popularisant les tirs de tête et de cou, un peu à la manière des guides des Highlands qui employaient le calibre pour le cerf rouge des Highlands. Mais on vient bien d’employer le terme d’experts, ces tirs étant parmi les plus difficiles avec une cartouche qui, comme tous les petits calibres ne laisse pas beaucoup de marge d’erreur en terme de performance des balles.

Ces balles modernes ont engendré une suspicion qui n’existait pas avec les anciennes balles « collées » (Corelokt 100 grains, Interlock), et on considère que s’il n’est pas idéal, il est néanmoins suffisant en conditions moyennes, à moyenne distance avec des balles à expansion moyenne garantissant pénétration et développement chaque fois en tir placé. Selon la taille de l’animal le vaste choix actuel de balles modernes impose (mais cela vaut aussi chez nous) en fonction des hautes vitesses, de bien analyser ce qu’on tire, et on peut redouter l’effet « grenade » sur les épaules avant très épaisses, et après bonne chance si on doit s’aventurer dans les épinettes, sur la piste de sang sans chien, avec en plus le risque de se retrouver nez à nez avec le fuyard qui vous attend tapi dans l’ombre, voire un ours attiré par la détonation (3).

A la battue française, où les compagnies courent partout dans tous les sens, pas sûr que le placement soit au rendez-vous, et même si à ces distances courtes, la balistique peut dire que le 243 fera aussi bien que les 270 et 308, il faudra quand même réfléchir à deux fois pour celui qui montera pour la première fois à l’arme rayée. Si ici, on pense qu’on va quand même souvent trop loin chez nous avec les « gros fusils » pour un poids de sanglier somme toute moyen (4), le 243 Winchester ne sera pas l’arme « passe partout » à laquelle on peut certes penser dans les vastes contrées américaines où on peut passer allégrement de l’antilope pronghorn au grizzly, et du coyote à l’orignal. Quoi qu’on en pense « qui trop embrasse, mal étreint » et on abandonne toujours quelque chose en route…

1/ Voir archive du 21 juillet 2023

2/ Dans cet état où abondent les gros spécimens, ils sont prélevés, du 22 LR et 17 HMR (tirs de nuit, de près à l’œil ou l’oreille), jusqu’au 416 Remington !

3/ Les ours en maraude font vite le rapprochement entre les coups de feu, et la perspective des restes de venaison à glaner à peu de frais. Les chasseurs ont intérêt à faire vite et à être sur leurs gardes.

4/ Dans notre région de bocage de l’Ouest le plus gros bonhomme était à 146 kg, et comme partout en France, ces grosses cibles sont tirées les premières, où la moyenne d’âge est de trois ans quand un grand vieux solitaire est ainsi dénommé selon la tradition à 6 ans. Du fait de la pression de chasse, très peu de grand vieux sangliers atteignent cet âge canonique en France.

 

 

24 mars 2024

La casquette "Jones", l'emblème du sauvaginier

Rien à voir avec le fameux designer britannique Stephen Jones, ni le célèbre chapeau d’Indiana "Jones", la renommée de cette casquette partie en 1881 de St-Joseph (Michigan) connut son apogée dans les années 60 chez les chasseurs de canards américains avec le camouflage « frogskin » des surplus des Marines, employé principalement dans le Pacifique (1).

Elle fut éclipsée par la popularité soudaine, un peu partout dans le monde de la casquette de base-ball à longue visière, d’ailleurs pas toujours adaptée au tir et à la chasse. Sa visière longue et rigide gêne la tension de la corde des archers, et elle ne s’adapte pas toujours bien à la montée rapide de l’arme au visage, ni au camouflage car, quand on tourne la tête, elle montre plus de mouvement qu’une coiffure à bord régulier. Visage et mains qui bougent sont en effet ce qu’on voit en premier, et il faut s’efforcer de garder un profil cohérent qui « casse » la silhouette humaine.

La « Jones cap hats » se fit connaître notamment via les grandes marques comme L.L. Bean dans le célèbre coloris « buffalo plaid » (2) en laine en couleurs dont l’alternance de lignes et carrés font office de rupture et se montrent plus efficaces que les petits motifs imbriqués donnant une grosse masse sombre à distance, mais aussi en coton, toile cirée de toutes les couleurs : kaki, jaune sable, vert sombre. Son bec avant semi-rigide protégeait les yeux des intempéries, l’arrière empêchait les gouttes de glisser dans le dos, et par temps froid, on pouvait dérouler la doublure pour se protéger les oreilles. Elle pouvait être doublée de la couleur orange blaze, et en la retournant on pouvait ainsi se conformer à la législation particulière de chaque état en matière de visibilité des chasseurs. Sa forme effilée la faisant ressembler au bonnet de Robin des Bois ou à celui contemporain d’Elmer Fudd (3) permettait même de se faufiler plus facilement dans les roselières, et pouvait intéresser les adeptes « upland » ou de chasse devant soi, quand il faut évoluer à la bécasse pour se protéger du mauvais temps mais aussi dans le chablis, des basses branches ou des débris de végétation qui vous fouettent la face.

On retrouve donc ce couvre-chef dans toutes les publicités de l’entre-deux guerres, mais guère en Europe, plus fidèle à la tradition pour le chasseur citadin de la casquette plate irlandaise, ou dans le France rurale, du béret basque. Ce sont les surplus de nos guerres coloniales qui ont amené les treillis dans le paysage cynégétique pour les chapeaux la copie du modèle australien « Anzac » qui servait en Indochine et en Algérie, et pour les bonnets les « beanies » des conducteurs de Jeeps, et des tankistes. Les archers, catégorie individualiste et s’affranchissant plus facilement des codes vestimentaires, également plus influencés par les tendances nord-américaines notamment en matière de camouflage, ont redonné corps au retour de ces artefacts « vintage » qui deviennent tendance comme les « boonie hats » si pratiques. Ils sont proposés dans un tas de coloris et de matières déformables qu’on peut glisser dans la poche avec les tours de cou également indispensables à la fois pour le camouflage et le coup de froid inopiné. Une bride en fait un accessoire "tous temps" en cas de bourrasque, et des boucles sur la bande ménagent des possibilités infinies d'ajout de camouflage. 

 Quand, avec l’âge, la calvitie menace, les couvre chefs deviennent importants dans la vie. L'amateur de plein air expérimenté porte sa coiffure avec la fierté qui "pose" le vieux nemrod...et surtout les cheveux trop tôt disparus font que le dôme brillant s’imposant dans le paysage, sert de miroir pour situation d’urgence à tout ce qui vole, et de piste d’atterrissage à tout ce qui pique, mord et démange quand on est au poste ou à l’affût ! Il faut donc porter ce que la météo dicte, mais on s’attache parfois assez fortement à certains objets familiers (4) qu’on empoigne à la va-vite par habitude, en forme de superstition car s’attachant au souvenir de quelque éclatant succès, naguère à la passée. Il n’est pas toujours question de fonctionnalité ni d’élégance, car comme l’habit ne fait pas le moine, et ce n’est pas le galurin qui fait le chasseur !

1/ Quelques méprises tragiques en Normandie où les Waffen SS commençaient à employer le camouflage à pois,  bannirent rapidement du front européen ce camouflage en 1944.

2/ Voir archive du 7 janvier 2022.

3/ Personnage de bande dessinée (1937), c’est (voir ci-dessus) le grand adversaire de Bugs Bunny !

4/ Voir archives des 19 décembre 2020 et 10 février 2018 .

 

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