Cartouches : vous les aimez "grasses" ou "à jupe" ?

Un beau débat qui anima voilà une trentaine d'années des générations de chasseurs et qui revient au goût du jour, de nombreuses recherches balistiques récentes ayant balayé pas mal d'idée reçues à ce sujet. La question se repose aussi du fait désormais, de la mise à disposition par les grandes marques d'encartoucheurs, de nouvelles bourres grasses performantes et efficaces.

Me revient en mémoire, dans les années 60 mon grand-père qui, sous la lampe de la cuisine s'affairait en tirant la langue, à bien doser sa poudre, remplir les cartouches carton alignées, forcer sur le sertisseur, car jusqu'au bout, il n'aima jamais les « toutes cousues » déjà fournies par les armuriers n'étant jamais vraiment sûr de ce qu'il y avait dedans pour bien « faire peuuter » comme il disait avec son accent traînant des Dombes ! Un peu comme parler de chasse... c'est déjà chasser, on était déjà avec ces préparatifs dans ce que serait l'ambiance de la saison à venir...et c'est ainsi sans doute que naquit pour beaucoup de ceux de notre génération, une vocation qui n'est pas prête de s'éteindre !

A cette époque nos anciens ne tiraient pas autre chose que des bourres grasses avec des canons à chokes fixes, la plupart du temps en demi et en full, ce qui n'excluait nullement les coups de longueur sur tous gibiers. Les vieux armuriers acceptaient de parler chokes que là dessus, tout comme les chasseurs  britanniques qui tiraient peu serrés, mais avec des canons longs de 76 sur d'antiques juxtaposés qui descendaient parfaitement ramiers poussés par le vent ou faisans "stratosphériques", filant à 50 à l'heure à la cime des arbres. 

La bourre à jupe, notamment sous l'effet du sporting (ball trap et ses nombreux dérivés) s'est peu à peu imposée en même temps que les munitions plastique, d'une standardisation et d'une industrialisation plus facile. Voici quelques années il fallait pas mal éplucher les catalogues pour trouver quelques fabricants offrant encore, et de manière parcimonieuse, ces belles cartouches carton colorées à bourre grasse qui avaient enchanté notre enfance.

Leur retour s'explique par des considération d'usage de nombreux chasseurs qui ont bien compris que si l'une (la BG) « pousse » le plomb, l'autre (BJ) le « porte ». De nombreux essais, notamment dans la presse spécialisée ont bien montré que choké ou non, il y a peu de différence de portée. A 35 métres, les plombs vont dans la cible, mais pas de la même façon.  La jupe empêche les plombs d'être en contact avec le canon, ils gardent donc du fait de l'étanchéité meilleure, de bonnes qualités balistiques en régularité des vitesses et des pressions, concentrant la gerbe au centre pour un tir puissant, serré, rapide. Elle reste un gage de sécurité pour les coups lointains, offrant de surcroît une multitude de chargements et de grammages, de 28 (sporting) à 42 grammes pour les "mini magnum". Et puis, comme on dit "qui peut le plus peut le moins" ! 

La bourre grasse va aussi loin mais d'une autre manière avec une gerbe qui couvre mieux la périphérie, mais qui est surtout plus longue, plus homogène, et donc idéale pour tout gibier volant, particulièrement « traversard ». Les chasseurs aux chiens d'arrêt, les premiers, se sont bien rendu compte qu'aux portées utiles, disons jusqu'à 30 métres, (mais est-il raisonnable, même avec une « grosse » cartouche à jupe de tirer au delà ?) la bourre grasse gardait tout son intérêt. L'écueil au départ fut le prix de ces refabrications plutôt confidentielles, et le fait que les semi-automatiques désormais légion dans nos campagnes « digéraient » mal (surtout ceux à emprunt de gaz) ces cartouches cartons, souvent aussi moins chargées.

Alors, bourre grasse ou à jupe, la question se repose à l'identique comme il y a trente ans, mais maintenant avec plus d'équilibre sinon d'avantage pour la première, sachant que pour l'une comme pour l'autre, disait encore mon grand père « quand on met le bout dedans, ça tombe » !