La chasse est-elle un sport ?

Et vous, dans vos chaumières, comment voyez-vous ça ? La question s'est toujours posée. Nous sommes en effet, en nombre de pratiquants, seconds derrière le football ! Mais sans avoir tout à fait les mêmes critères de pratique sportive. Il n'y a pas de limite d'âge (1), ni de certificat médical à fournir, et on en peut pas vraiment dire qu'on affiche la parité...95 % des chasseurs sont des hommes !

Malgré tout, qui pourra dire que les traqueurs derrière les meutes, les chasseurs de montagne, ceux qui pratiquent le safari, longtemps considéré comme « chasse sportive », sans doute parce qu'on y côtoyait plus d'animaux dangereux que par chez nous, ne sont pas des sportifs ? La chasse en effet nécessite de telles qualités sportives : de précision (2), d'efforts répétés et violents, de patience, d'endurance face à la nature et aux éléments déchaînés. Ne pourrait-on pas, au moins la considérer comme un sport de loisir de pleine nature, au même titre que la randonnée, la chasse photo, la varappe, et autres diverses activités de cueillette ? Dans l'esprit des gens, la pêche (3) elle même, se différencie grandement de notre activité favorite, inconsciemment sans doute, parce qu'elle implique le fait, moment certes pénible, mais nécessaire, de tuer le gibier et donc de donner la mort.

Ce qui nous renvoie, il faut le reconnaître, à une réflexion un peu plus profonde que celle qui consiste à seulement courir derrière un ballon ! La chasse est, en effet une pratique qui donne à « penser la mort », au moment même où notre société tend à bannir son masque hideux de tout notre champ social. La chasse est une passion qui l'inclut systématiquement dans son activité, qui la pense par son éthique (celle de la donner vite et bien), et c'est ce qui explique sans doute sa perception plutôt mouvante dans l'opinion publique. Visez la tête des gens, et la moue effectuée quand ils apprennent « ...Ah, vous êtes chasseur »...C'est aussi pourquoi, en termes d'image, les chasseurs eux-mêmes, et notamment la fameuse chaîne TV qui leur est dédiée, devraient se méfier des folles gambades et congratulations bruyantes de leurs animateurs quand gît à leurs pieds, un malheureux chevrillard , tiré à 100 mètres, au creux du vallon et dans les derniers spasmes de l'agonie. Certains éditorialistes de revues spécialisées, s'en sont eux-mêmes offusqués...alors imaginez les « écolos » de tout poil ! Si la chasse implique de donner la mort, il y a toujours, derrière, une certaine gravité non ? Et on ne vient pas de marquer un but au foot avec les copains...

 Ci contre à dr. chasseurs et pêcheurs sont proches, mais ne sont pas perçus pareillement par la population

Malgré son poids économique (4), son intense production de sens social (5), son atout incontestable de développeur de territoires ruraux, cette face « mortelle », peine à la faire décoller dans l'opinion. Les chasseurs se sont même risqués en politique il y a quelques années, créant un « parti » (CNPT) dont le meilleur score fut de 4,15% des voix aux européennes de 1989, avant de retomber piteusement à 1,18% aux présidentielles de 2007, soit plus de moitié moins que tous les porteurs de permis de l'hexagone réunis ! La preuve que non seulement les chasseurs ne s'identifient pas à un groupe, et encore moins à un parti politique, mais aussi qu'ils peinent eux-mêmes à se positionner dans le champ social.

On comprend donc que les chasseurs donnent une image floue, peu attractive auprès des jeunes (6), toujours rétive à la mixité, alors que la parité s'impose partout : dans la politique, l'entreprise. C'est sans doute vers la ruralité que la chasse trouvera sans doute à se ressourcer, car c'est là qu'elle se rendra le plus utile, et où il y a désormais des « trous à boucher » en matière sociale. Par bonheur, elle a su garder le contact avec une agriculture en grade mutation, accompagner certaines de ses actions (aménagement de l'espace, lutte contre les espèces invasives), et tout simplement assurer une présence dans des territoires qui se diversifient.

1/ Age moyen 49 ans, et 42 % de plus de 55 ans.

2/ Toutes les disciplines du tir

3/ La pêche passe mieux dans l'opinion car elle apparaît moins violente, surtout depuis l'apparition du « no kill » qui fait immédiatement relâcher le poisson pris.

4/ Plus de 3 milliards et demi de chiffre d'affaires, 26 000 emplois.

5/ 7,6 millions d'heures de bénévolat

6/ Un sondage (des opposants à la chasse il est vrai...) donnait 83% de jeunes contre la chasse en 1999, laquelle n'intéressait que 3% des moins de 15 ans.