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3 février 2018

Com...prendre la poudre...d'escopette ! Episode II : l'invention du fulmicoton ou "il n'y a pas de fumée sans feu" !

Suite du précédent envoi, voici que le fulmicoton bouleverse la donne armurière et renvoie aux calendes grecques la bonne vieille poudre noire.

Schönbein

 

Vint alors la poudre…sans fumée ! Un nom assez trompeur vous en conviendrez car cette fameuse poudre n’est pas cent pour cent…sans fumée, sinon sans fumet, odeur persistante de produits chimiques aidant comme on va le voir dans quelques instants. On parle souvent de Paul Vieille comme inventeur de cette poudre miracle, mais avant d’en arriver là, il faut signaler les travaux du chimiste français Henri Braconnot qui, le premier, en 1832 constata que le mélange d’acide nitrique et de fibres de bois produisait un matériau explosif perfectionné quelques années plus tard par Théophile Pelouze en remplaçant le bois par du papier et du carton. Encore instables, ces découvertes ne purent passer à la pratique avant la trouvaille accidentelle du suisse Christian Schonblein (ci contre à g.) qui, en renversant une combinaison d’acide nitrique et sulfurique essuyée à la hâte (avec le tablier de sa femme qui se plaignait amèrement de ses « expériences » faites sur un coin d’évier dans la cuisine !), et voulant le faire sécher près du feu (ni vu ni connu avant que sa mégère ne découvre le pot aux roses !), le vit brûler comme un éclair sans laisser aucune trace. Il venait, sans le savoir de créer le fulmicoton ou nitro cellulose ! Ce mélange, pour le même volume de poudre noire, produisait six fois plus de gaz, mais beaucoup moins de fumée et de chaleur et était donc promis à un bel avenir.

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Schonblein envoya des échantillons de sa découverte en Angleterre en 1846, mais garda le secret sur sa méthode de préparation susceptible d’être brevetée, d’autant que d’autres chimistes allemands notamment (Rudolf Bottger, F.J.Otto) parvinrent à peu près dans le même temps avec des variantes au même résultat. L’Angleterre, en pleine industrialisation fut la première à tenter de développer le procédé, mais l’usine Hall de Faversham explosa malencontreusement (14 juillet 1847), tout comme d’ailleurs l’usine du Bouchet près de Paris un an plus tard (17 juillet 1848). Les pays en cause, dans l’expectative et leur enthousiasme douché de sinistre manière car il y eût des morts, suscitèrent des commissions qui, six ans plus tard bottèrent en touche, le procédé semblant certes  intéressant…mais aussi  sinon plus dangereux pour les civils que pour les militaires ! Mais ces funestes expériences ne furent pas perdues pour tout le monde : les Autrichiens avec le baron Von Lenk, menèrent leurs propres expériences dès 1849. Ce dernier, qui était artilleur, élabora un processus de fabrication plus sûr et rentable, et en 1862 les Anglais envoyèrent à Vienne un comité de trois chimistes et trois ingénieurs (dont J.Withworth inventeur du fameux fusil du même nom) qui pondirent un rapport présenté en 1863 à Newcastle et préconisant l’emploi d’un produit fortement nitré mais sur une base très propre et sèche, des acides le plus solidifiés possibles, un trempage de 48 h, et un lavage soigneux à la potasse. Il se présentait sous l’aspect de fils tressés, ne nécessitait que le quart de la quantité de poudre noire utilisée auparavant et n’était pas affecté par l’humidité. Outre le fait qu’il était plus sûr que ses devanciers, ce fulmicoton pouvait même être maintenant produit en grandes quantités. La découverte était d’importance, Von Lenk fut même décoré pour cela de la légion d’honneur par Napoléon III !

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Malgré quelques déboires à l’étranger  (explosions dans deux usines autrichiennes en 1862 et 1865) comme en France (1)  la réflexion était lancée partout, aux USA (Thomas Rodman), chez les Prussiens (J.E.Schultze), en Angleterre (sir Frederick Abel), mais une explosion en 1871 remit encore une fois tout à plat, et bien sûr en France, ce qui nous amène bientôt à Paul Vieille. L’intérêt pour la nitrocellulose avait un peu faibli chez les militaires, mais pas chez les civils, notamment les chasseurs intéressés par le procédé Schultze moins coûteux qui devint peu à peu leader sur le marché mondial sous des marques désormais bien connues de nous tous : Eley, Kynoch, par exemple, la publicité étant assurée par des « vedettes » de l’époque comme la légendaire tireur d’élite Annie Oakley, (ci-contre à g.) une des étoiles du Wild West Show de Buffalo Bill. Tout ce battage médiatique ne pouvait qu’attirer de nouveau l’attention des militaires…

1/En France plusieurs accidents furent –c’est le cas de le dire, retentissants ! En plein Paris, place de la Sorbonne, en 1869, l’atelier Fontaine qui préparait une expédition pour les torpilles de la Marine fit 6 morts. Le 14 mai 1878, toujours en pleine ville de Paris le magasin Blanchon, dépôt d’amorces au fulminate de mercure (pour les pistolets d’enfants !)  fit  15 morts et 40 blessés. Les militaires pourtant mieux habitués au maniement de ces substances dangereuses ne furent pas épargnés : une explosion le 10 mars 1887 à l’arsenal de Belfort fit 9 morts.

A suivre : Paul Vieille et les Français trouvent la faille

 

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