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29 septembre 2018

L'esprit des bois

Vous l’avez vu, la chasse, « grâce » si l’on peut dire, aux outrances de certains écolos (anti-spécistes, vegans, etc.) retrouve peu à peu sa place près des activités « Nature », et rencontre donc des affinités avec des courants nouveaux qui pourraient, de prime abord nous faire sourire.  Voici que se lancent, des « stages et bains de forêt méditatifs » que nous autres chasseurs pratiquons tous, sans le savoir, comme Monsieur Jourdain autrefois la prose, depuis des années.

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Cet esprit relève du succès de best-sellers (1), mais aussi d’un courant de pensée très ancien comme le shinrin yoku ou « bain de forêt » issu de la tradition ancienne japonaise du shinto où la Nature est intimement liée au monde des esprits. Nous sommes les enfants de nos paysages, et ce sentiment n’est pas étranger à celui qui chasse à l’affût et au poste où il s’agit d’être « présent » avec tous ses sens au monde qui nous entoure, et au premier chef l’olfaction dont Freud a montré qu’il était une des premières victimes du développement et de la civilisation, étant refoulé par l’accès à la posture verticale.

C’est un sentiment étrange que l’on peut ressentir quand on est en bout de ligne, à « Couillonville », qu’on n’entend plus les trompes ni le récri des chiens, au bout du monde, en quelque sorte, et en territoire inconnu. Passé le temps de la découverte du poste s’installe une sensation de calme, de complétude, celle d’être pleinement vivant, d’être « conscient » de tout ce qui nous entoure : le ruissellement d’une source toute proche, caché auparavant par le vent qui couche par moments la cîme des chênes, l’approche silencieuse d’un chevreuil qui se défile. N’étant plus sous le regard d’autrui, on peut se contenter de seulement regarder et apprécier…

Plus fortement encore, c’est à l’affût aux palombes que l’on apprécie toutes ces heures volées aux tracas du quotidien. Tant qu’on place les formes, aménage le poste, on reste dans le flot d’une pensée active dans le cadre d’une stratégie que l’on bâtit par expérience. Mais quand tout est en place, au bout d’une demi-heure, on se rend compte que la Nature nous enveloppe : passent les premières corneilles, le geai des chênes vient faire son tapage, la buse vous survole dans son vol majestueux et son cri plaintif. Le corps se minéralise, les gestes sont rares, instinctifs, les sens s’aiguisent, un œil aux formes, puis au ciel contre le vent par où va survenir le vol bleuté des palombes.

 Cette sensation est assez difficile à faire partager, même à des chasseurs anciens et aguerris que l’âge et les « rumatisses », puis la disparition d’un fidèle compagnon à deux ou à quatre pattes songe à faire poser définitivement le fusil au râtelier. Ils ont été habitués à ce que ça bouge, derrière les chiens, et ils ne prisent guère rester ainsi calé « sous les grands chênes » à attendre que le soir tombe. C’est l’antithèse de ce qu’ils ont toujours fait, « à cor et à cri » dans une Nature au contraire, perturbée, foulée, pour en faire jaillir, les bêtes de chasse, le terme est fort, mais dit bien ce qu’il veut dire… qu’on « force ». Dommage pour eux qui ne peuvent comprendre le sens profond de ces journées dehors où l’on se satisfait de peu : une sensation apaisée, maîtrisée, d’être un être pleinement vivant, car même avec des moyens physiques diminués, cette perception sublime la possibilité de pouvoir encore et toujours chasser, presque jusqu’au bout du bout…

1/Voir par exemple les ouvrages de Garcia et Miralles, la sylvothérapie (J.L.Defossez), « la vie secrète des arbres » de l’allemand Peter Wohleben, ou « ces arbres qui nous veulent du bien » (L.Monce).

 

 

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