Forces et faiblesses de l'action Mauser (II) : crus et millésimes
L’action Mauser 98 a eu un tel succès (lequel d’ailleurs se poursuit toujours), qu’il y a eu des productions commerciales aussi bonnes que celles d’Oberndorf DWM : Sauer d’une part, ou ne serait-ce qu’à Brno et Liège. Le marché du 98 a donc toujours été très animé du fait également de la présence de bons surplus militaires fabriqués après contrats gouvernementaux sous l’œil sourcilleux de la maison-mère. Brésiliens, mexicains (ci-dessous) , argentins, péruviens il en est comme des bons vins avec des réputations de grands crus pour les connaisseurs…
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Les deux actions « kurz » et « lang » sont les plus recherchées, les dizaines de modèles de surplus militaires ayant même éclipsé parfois la Winchester 70 pré 1964, son avatar civil le plus abouti aux USA où ils furent amplement customisés. La filière belge qui avec la tchèque et la yougoslave pour le civil offrent encore de nos jours le plus grand gage de qualité permettent de comprendre ce phénomène. La F.N. d’Herstal avait été créée en 1889 par un consortium de financiers pour fabriquer le 98 sous licence, le transfert de technologie s’opérant même sous la directive de Ludwig Loewe concepteur du fameux pistolet automatique Luger. La marge bénéficiaire prévue n’étant pas atteinte s’opéra une diversification qui amena en 1890 les premiers contacts avec J.M. Browning (1) ce qui n’empêcha pas l’arme d’être rapidement au catalogue de la F.N. dès 1910, et de sous-produire pour d’autres (Marlin, Winchester, Weatherby dans ses débuts après-guerre) ou en vente directe à des armuriers spécialisés.
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Après l’Occupation où la firme fut obligée bien sûr comme en Yougoslavie et Tchécoslovaquie de fournir pour la Wehrmacht, la vente des surplus fut un moyen rapide de relancer l’entreprise et le marché, la haute qualité de finition permettant de concurrencer le marché civil (Winchester 70, Ruger 77, Remington 700, Savage 110) mais au prix dans les années 45-50, de modifications considérables pour les adapter au monde renaissant de la chasse. On refit le levier d’armement, supprima le trou de pouce de gauche pour solidifier le boitier, on simplifia l’action et la sécurité à drapeau pour pouvoir poser des embases Weaver et des lunettes. En 1949, la version civile « Deluxe » servit de base aux premières Weatherby, aux modèles 1640 Husqvarna (production jusqu’en 1970 voir ci-dessus), aux premières Sako. Puis en 1957 le modèle 300 ou « Suprême » supplanta pendant quinze ans tout le reste avec une magnifique gamme de fusils fins semi-personnalisés, précédant en 1960 la gamme Browning Hi-Power en trois versions : Safari, Midas, Medallion.
Le bond technologique des années soixante qui avait déjà rendu obsolètes les « bonnes » armes (Garand, PM Thomson, etc.) du récent conflit mondial fit un peu de même pour les anciennes actions Mauser 98 issues des surplus militaires. Même si Walther et Heym reconditionnèrent encore dans les années 60-70 en 8X60S des actions achetées en Yougoslavie, ne surnagèrent plus que les belles actions civiles de cette époque qui font encore la joie des chasseurs du monde entier. En 1977, F.N. Browning proposait trois déclinaisons différentes : un modèle léger (canon de 56cm) en 243W, 308W ; un moyen (toujours canon de 56cm) en 270W, 30-06, 8X57JS, 8X60S, 9,3X62 ; enfin un modèle lourd (canon de 61 cm) en 7 Rem Mag, 300 HH Mag, 300 WM, 308 Norma et WM, 375HH, 458WM, 404 Eley et 10,5X68.
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A cette époque les versions civiles furent à leur apogée, en Espagne avec l’Empresa national Santa Barbara (qui fournit également Parker-Hale en Angleterre), en calibres moyens jusqu’au 300WM, en Tchécoslovaquie avec la série Brno ZKK dont le fameux « long » ZKK 602 encore « customisé » de nos jours pour les plus gros calibres africains et bien sûr aux USA dans tout un tas de variantes artisanales, sans même parler des grands fabricants. La Remington 700 possède une culasse typiquement Mauser mais un peu différente avec éjecteur genre Garand, et magasin en tôle plus solidaire du pontet mais pris en sandwich entre ce dernier et le boitier de culasse. Winchester avec son modèle 70 proposé en 4 versions (Standard, African, Magnum, Varmint) a juste simplifié le magasin par mesure d’économie et opté pour une détente réglable. Les modèles 770 et 670 furent des versions encore plus simplifiées et meilleur marché, certaines (Target, International Match, Ultramatch) étant très axées tir. C’est peut-être Ruger avec le modèle 77 (ci dessus à g.) qui a le plus revu l’action avec un mécanisme simplifié améliorant le démontage rapide et une sécurité placée dans l’axe de la bride supérieure du boitier naturellement opérationnelle. Harrington-Richardson utilisa la culasse belge F.N. pour ses modèles 300-301-303.
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Aux Etats-Unis, des sites entiers sont consacrés à toutes les déclinaisons militaires et civiles du système Mauser 98 où certains « thésaurisent » même certains modèles pour personnalisations éventuelles derrière, les armuriers qualifiés et les fabricants de « goodies » (crosses et améliorations diverses) étant légion pour se concocter, au même prix que les « packs » issus de la mondialisation, du « sur mesure », d’un tout autre niveau. C’est plus difficile, et surtout plus onéreux chez nous, à part bien surveiller et connaître le marché de l’occasion qui ne manque pas de « pépites », pas toujours d’ailleurs mises en valeur par les armuriers de base, parce qu’ils ne « margent » pas là-dessus ! A vous d’avoir l’œil et le bon sur ce qui circule, notamment sur le Net…
1/J.M. Browning en brouille avec Winchester au sujet de royalties entama une relation fructueuse avec la F.N. de Liège qui aboutit en lisse au fameux B.25, à l’Auto 5, puis de nombreuses armes de poing. Il mourut d’ailleurs à Liège en 1926 d’une crise cardiaque lors de l’ultime mise au point de son grand superposé.
A suivre début août : forces et faiblesses de l'action Mauser (III) : les calibres 50 sur boitier long