Le "trench gun" arme d'avenir face aux drones ?

L’Histoire est parait-il un éternel recommencement, et ce qui se passe actuellement ressemble étrangement avec ce que documenta si bien Maurice Genevoix dans « ceux de 14 ». En Ukraine, et des deux côtés on s’enterre et on « bricole » pour s’adapter à de nouveaux dangers venus de toute part, et comme autrefois, dans les « moyens du bord » on retrouve le fusil de chasse, et la sempiternelle chevrotine.

Face au danger qui cette fois, vient du ciel envahi par les drones, le « trench gun » (1) devient le dernier argument face à ces petits engins malveillants de toute nature, mais suffisamment fragiles pour être accessibles au fusil de chasse, sans gros pouvoir d’arrêt, mais dont la large dispersion augmente les chances d’atteindre la cible. Le volume considérable employé (100 à 200 par jour selon les endroits du front) explique presque à lui seul, le gel des opérations, en rendant l’exploitation impossible toute percée, d’ailleurs dans les deux sens.

Le fusil à pompe ou semi-auto, parfois en version courte « bull pup » est revenu en ligne massivement des deux côtés : l’Ukraine a acquis dans l’urgence 4000 fusils Hatsan, et les Russes ont fait la même chose avec le Vepr 12, mais une utilisation bien plus rationnelle et organisée (2) pour les défenseurs qui les positionnent au centre des patrouilles, en dernier recours et engagés au dernier moment dans une prise de décision cruciale à quelques dizaines de mètres, ou à partir de l’arrière de véhicules en mouvement. Les petits modèles réduits chinois vrombissants faisant largement appel au plastique sont faciles à endommager, et on utilise la chevrotine dans des cartouches de trois pouces ou plus emmenant plus de billes. Les agriculteurs ukrainiens eux-mêmes, dans l’urgence utilisent leurs vieux fusils de chasse contre ces inquiétants volatiles, le record étant de 80 abattus par un de ces derniers avant d’être malheureusement touché alors qu’il circulait en voiture sur ses terres près de Kherson.

Un adolescent ukrainien, trop jeune pour s’engager sur le terrain au début des hostilités en tentant d’améliorer les munitions a même redécouvert les mérites des projectiles ramés qui faisaient nos délices dans les vieux catalogues du Chasseur français, et se retrouve même désormais à la tête d’une start-up florissante mais discrète car ces dernières sont d’office dans le viseur des missiles russes dès qu’elles deviennent visibles sur la toile. Norma vient dans le même esprit des anciennes cartouches « Centimetri » (3) une cartouche de # 6 qui envoie 34 grammes de tungstène à 405 m/s dont les essais ont touché six fois sur 7 à 50 mètres.

Ce monde nouveau et dangereux n’est cependant pas sans rappeler les débuts de l’aviation légère quand les armes de chasse furent les premières à être embarquées sur des aéroplanes (4), mais cette fois en les montant sur des drones pour en faire des « nettoyeurs » de tranchées ou d’immeubles volants, en combattant le recul susceptible d’endommager ces fragiles libellules par l’emploi de contres charges tirant dans l’autre sens. Il n’y avait en effet aucune raison qu’emmenant déjà des grenades ou petits obus de mortier, voire des RPG lance-roquettes, que le fusil de chasse puisse être employé contre les drones de reconnaissance ennemis dans un premier temps, mais aussi en anti-personnel !

Pour sourire un peu, peut-on envisager qu’il faille un jour légiférer pour envoyer de notre bon vieux « deux coups » faire son « baptême de l’air » et traquer en vrombissant le lièvre au gîte sans avoir à bouger de notre siège ? Eh bien, curieusement, ce temps n’est peut-être pas si loin que cela. Tout en rappelant qu’assimilés à des avions, il est interdit bien sûr de tirer dessus, l’auteur de ces lignes, il y a fort peu de temps, y fut confronté…poursuivi par un tel engin muni de caméras et piloté par des « écologistes » qui venaient de barbouiller nos panneaux de battue de quelques amabilités contre la Chasse. Nous nous sommes bien gardés de faire simplement même mine d’épauler pour éviter de se retrouver immédiatement livré en pâture sur les « réseaux sociaux » comme on dit…

1/ Voir sur ces armes archives des 4/2/15 et 27/1/20.

2/ L’Ukraine, le dos au mur, a toujours eu un temps de réaction bien plus rapide que les Russes qui misent sur la masse et sans aucun respect de la vie humaine, et entraîné ipso facto 8000 hommes dans ce type de défense.

3/ Voir archive du 22/4/13. Ces cartouches autrefois dites « à concentrateur », ou à dispositif de bourre retournée sont interdites à la chasse (article 3. De l’arrêté du 1^er août 1986, version en vigueur du 1^er septembre 2025.

4/ Les premières armes employées sur les premiers aéronefs furent des fusils de chasse ou des carabines contre les pilotes ennemis, les zeppelins, et même dès 1910 le dispositif Cleland Davis avec contre charge de chevrotines enveloppées de graisse pour pallier au recul. Voir photo ci-dessus.