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17 décembre 2017

Du gibier pour le repas des fêtes ?

Voici Noël qui approche à grands pas, on va garnir la cheminée et le sapin, préparer la bûche et le rôti...peut-être de gibier ? Mais vieille question, faut-il auparavant laisser un peu « faisander » ou « mortifier » ? A l’heure du frigo et du congélo ce sont certes des termes qui sentent un peu –c’est sans doute bien là, le cas de le dire- le rassis, mais c’est quand même, les fêtes aidant, un peu d’actualité non ?

cuistot ancien

 

Entre la mortification qui constate un début de décomposition, et le faisandage, le fait de garder quelques temps le gibier, il y a des subtilités et des nuances qui sont bien oubliées de nos jours. Mais il ne s’agissait en rien de putréfaction, même si cette rétention pouvait durer de quelques jours…à deux semaines ! C’était l’époque que nous sommes ici quelques-uns à avoir encore connu, du « garde-manger» suspendu contre l’appétit des rongeurs dans des celliers biens frais, à l’abri de la lumière où ils côtoyaient les vieux chapeaux, les cottes usées, les souliers crottés…et quelques bonnes bouteilles, à épousseter soigneusement avant de les ouvrir religieusement, quand frappaient à  l’huis,  quelques vieilles « connaissances » cynégétiques.

plumaison

Au nez, la cuisinière, traditionnellement affectée à la « plumaille » savait détecter la légère odeur fétide s’exhalant de la perdrix dont les plumes ventrales commençaient à venir facilement à la main. Plus classiquement on suspendait la pièce magistralement tirée auparavant par le maître de maison avec son bien nommé « Lefaucheux » par une patte à une poutre du plafond en attendant de voir perler au bout du bec, une goutte de sang. Les cuisiniers, à l’époque où le gibier concentrait la majorité de l’offre en viande, faisaient l’inverse en suspendant la pièce par la tête, au-dessus d’une assiette de porcelaine.

oiseaux eau

Pour la bécasse (1) les puristes allaient plus loin attendant  qu’ainsi suspendu, l’oiseau…tombe tout seul ! Inutile de dire qu’il devait y avoir par là du « sentiment »…sachant qu’en sus, celle-ci ne doit, au grand jamais, être vidée ! On considérait en effet que ce délicieux fumet, était, avec la cuisse le morceau de choix, contrairement au perdreau ou au colvert dont l’aile semblait la plus appréciée. Rares sont donc de nos jours ceux qui se hasarderaient pour le repas de Noël à  procéder comme nos cuisiniers d’autrefois. On ne dépasse plus guère la semaine dans le bac inférieur du réfrigérateur avant de servir à la table d’hôtes, un gibier dont on n’est pas sûr d’ailleurs qu’il soit autant apprécié qu’en ces temps bénis où il était aussi abondant dans les landes et les guérets…que sur nos tables.

On le dégustait  le plus souvent en cocotte, mais surtout en salmis, terrines, pâtés, croustades, lesquels avaient l’avantage de ne rien perdre et de se conserver, véritable aubaine également pour retaper les chasseurs, fourbus de fatigue après avoir escaladé les buttes, traversé les fondrières, récolté les épines de tous les ronciers du voisinage ! Car comme le disait si bien Horace Raisson (2) au XIXè siècle, « le chasseur doit manger son gibier, et son repas doit être le but de sa passion favorite ».

auberge

Ce qui valait aussi bien sûr pour les fameux «  repas de chasse »  dont nous perpétuons tous la masculine fraternité : « c’est alors –conclut Raisson- que se déploient dans tout leur grandiose, ces soifs immenses, ces appétits gigantesques dont nul apéritif commun ne peut alors fournir la contrefaçon. Chaque convive devient un tonneau des Danaïdes que l’amphitryon doit désespérer d’emplir, avant que le sommeil ait fait trêve aux longs récits des actions brillantes dont chaque chien a été le héros, et aux libations copieuses qui se succèdent en l’honneur des hauts faits de la meute » ! On comprend sans peine, à cette description de sybarite...que nos épouses en soient le plus souvent exclues…

 

1/ Celle-ci, rappelons-le, est interdite à la vente depuis 1978

2/ Horace-Napoléon Raisson (1798-1854) écrivain, journaliste, critique fondateur en 1824 du Feuilleton littéraire auquel collabora Balzac. Extraits ici de son « code gourmand » (1827).

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