Browning Auto 5 : et s'il fallait le refaire ?

« En voilà une question qu’elle est bonne », aurait dit le regretté Coluche ! Selon les critères actuels des semi-automatiques on trouverait des « normes » qui, évidemment, n’avaient pas cours en 1999 quand cessa la production, encore moins dans l’après-guerre quand il trônait majestueusement et solitaire au firmament des chasseurs de gibier d’eau. Et que dire en 1903 quand JMB y mit quelque touche de génie !

Ce serait une arme ipso facto chambrée super-magnum, avec des clavettes au lieu de vis, des alliages subtils de matériaux composites ou l’usinage assisté par ordinateur aurait réduit les coûts, pour sans doute ressembler à ce que sont les nouvelles normes en matière de design et d’ingénierie, et donc peut-être regarder un peu ce qui se passe du côté de l’Italie et ses SA « spaghettis » non ?

Il y a cependant par là-bas, encore avec Cosmi, une indication sur ce que pourrait être un semi-auto d’exception sans nécessaire avoir le style « nouille » de la production actuelle genre Vinci, et ressemblant assez aux préoccupations initiales des SA de l’époque (1925 pour le Cosmi) : encore une fois le long recul toujours associé à une fabrication mécanique soignée. La comparaison s’arrête cependant là, car la firme d’Ancône est demeurée une fabrication artisanale de grande qualité quand la F.N. opta rapidement, vu le succès initial, pour celle de masse. Par pure gourmandise historique, on ne résistera pas au plaisir de mettre face à face dans nos illustrations ci-jointes, nos deux apôtres du long recul : J.M.Browning et Rodolfo Cosmi.  

Refaire l’Auto 5 reviendrait donc à sortir de ce système, mais pour qui ? Les fans du long recul revenus des novateurs à gaz ou à inertie ? Ils n’existent plus à part quelques nostalgiques dont nous sommes assurément. Dès 1970 les autres systèmes (gaz, et bientôt inertie) battaient en brèche la réputation de l’ancien. Les collectionneurs et nostalgiques du fusil de papa ? L’Auto 5 ne ressemblerait plus à rien de ce qui se fait mécaniquement de nos jours : il en émanait une qualité de travail et de finition qui n’est plus vraiment d’actualité. L’Auto 5 conserve sa popularité en raison de ses liens avec le patrimoine armurier, au génie de JMB, à l’histoire de la chasse aux canards. Et cette merveille d’ingénierie et de savoir-faire (1) a souffert au final de sa complexité et du coût de production, pourtant, depuis le temps certainement largement amortis. Même transférée au Japon, et sans jamais rien sacrifier là-bas à la qualité, (presque au contraire !), il fallut se résoudre à l’abandonner, même si on a continué depuis 2012, de jouer, avec l’A5 sur le mythe de la « bosse » et tout ce qu’elle véhiculait déjà de nostalgie et de qualité armurière…mais d’autrefois !

Faudrait-il donc refaire une arme, un peu comme dans le domaine du souvenir historique, donner dans le « revival » de ce qu’était la chasse aux canards des années soixante, quitte alors à se vêtir de Barbours et de leggins, chaussés par temps sec des « Pataugas », et en hiver de la botte en caoutchouc Baudou toujours de « première en qualité » ? L’Auto 5 était notre rêve d’enfance, assouvi bien plus tard, quelques années de chasse déjà au compteur, et le souvenir défunt d’une chasse qui ne reviendra pas. Il ne fait plus que sourire, côtoyé aux battues au bras de quelques têtes blanches, qui, comme nous, regards embués et complices, opinent sentencieusement « il faisait partie des meubles avant…mais c’était avant » ! Mais il n’est pas interdit d’astiquer encore et toujours, les vieilles armoires normandes…

1/ Nous repassons ici le schéma des bagues de montage du modèle standard (et les symboles pour les chokes) montrant bien la « promenade » de la bague acier, près de la bague bronze côté du bouchon de magasin pour les charges lourdes, et près du boitier pour les charges légères, mais attention : le côté « plat » de cette bague acier doit toujours être face au ressort.