Le virus de la chasse est-il soluble dans le...confinement ?

Vous l’aurez remarqué, la pandémie aura été concomitante de la fermeture, et les mois de mars-avril, temps habituels de latence avant les débuts des régulations de corvidés et le chevreuil d’été…à rester enfermé à la maison selon les lois du confinement. Voici quelques pistes pour continuer de chasser…par l’esprit, sans trop tourner en rond dans la musse…

L’inventaire qui était toujours remis au lendemain du fait des beaux jours va pouvoir être peaufiné comme jamais : qu’il s’agisse des munitions, des équipements, des armes. Pour les cartouches, la priorité doit aller vers le gilet « grand gibier », ce paletot orange qui traîne tout le temps dans le fond de la voiture, abreuvé à la va-vite de balles, de « grosses » cartouches de plomb N° 2, soumis aux intempéries et qui recèle de quelques bricoles toujours utiles : de la ficelle pour un chien abandonné, des gants de jardin en rab, une petite trompette « de secours » pour le copain étourdi, un chapeau tout froissé dans le dossier si les ondées s’annoncent à l’horizon.

Depuis quelques années, dans notre région de Bocage (ailleurs c’est plus ancien), le sanglier nous amène à mieux penser le chapitre « balles ». Il est en effet fini le temps où une boite de cinq « brénèques » faisait deux-trois couples d’années. Elles se baladaient pêle-mêle dans la poche, prenaient le froid et l’humidité, ces cartouches avec leur avant ouvert à tous les vents, étant particulièrement exposées aux longs feux, désagréables certes au plus mauvais moment dans un « deux-coups », sinon dangereux dans un automatique. Ce gilet est donc à vider complètement, faire le tri, réserver les balles douteuses aux tirs de réglage d’avant-saison qui se généralisent proposés par les Fédérations ; même chose pour les cartouches « chevreuil » oxydées, dont on pourra toujours se débarrasser au pigeon en début de saison quand la végétation est encore forte.

Même mise à plat pour les autres gilets genre « ouverture » léger, ou « pigeon » pour l’auteur qui y entasse tout son petit fourbi : petit couteau pointu pour vider sur place, pinces à linge pour les filets, sécateur pour aménagement de poste, grand couteau de camp idem. S’y sont accumulés des plumes, de la terre, des feuilles, des serre-câbles (pour solidifier les postes), des bouts de sucre (pour le café), des bouchons de bouteilles, des mouchoirs jetables (1) pour tous usages…Comme l’autre, ce gilet est dans la saison, ouvert à tous les vents, reste humide, les culots de cartouches prennent des teintes bizarres. La plupart du temps, toutes ces tâches sont bâclées au dernier moment, après la saison de ball-trap, dans l’urgence car l’ouverture approche. Le confinement doit pouvoir permettre de prendre tout ça patiemment à son rythme, refaire le point sur le capital cartouches à trier, repositionner par numéros de plomb et surtout destination d’emploi : un casier grand gibier, un autre pigeon, le « bille d’acier » pour le gibier d’eau, et le « tout venant » (ici du « 6 » de tout acabit, ARX, semi-mag, chambres 65-70-76, peu de 86) pour la chasse devant soi. Les plus motivés pouvant même se rouler leurs propres cartouches, un petit plaisir supplémentaire pour faire tomber la palombe avec un dispositif qu’on aura choisi !

Nettoyer les leurres. Voilà encore un labeur peu prioritaire auparavant, que la retraite forcée va bien occuper. Sans trop savoir si ce sera possible, s’occuper en priorité des corvidés dont le flocage prend particulièrement la poussière. Les anatidés sont à réparer, souvent percés par un tir maladroit, à repeindre avec des couleurs mates, à réparer, toutes les attaches submergées s’usant vite avec les frottements. Aiguiser les couteaux : la grande dague à servir souffre elle aussi beaucoup pendant toute la saison, godillant, pendue à la corne d’appel, rouillant doucement dans son fourreau malgré sa gangue de graisse qui doit aussi aider à la pénétration, le sang étant en outre très corrosif. Le couteau de camp est, en théorie mieux protégé, tout comme celui de poche qui sert à beaucoup de choses dont la collation, sans oublier le sempiternel tire-bouchon à ne jamais oublier !

Les armes qui sortent souvent devraient être entretenues au jour le jour. C’est bien souvent à leur aspect que l’on juge du chasseur. Etant le rappel de tant d’aventures communes, c’est malgré tout plus qu’une corvée, un véritable plaisir de remettre le nez dessus. Au repos désormais, elles doivent être entreposées au sec, jamais graissées, sauf peut-être les canons, mais plutôt juste filmées d’huile fine, tous les ressorts et percuteurs détendus. Les « automatiques » plus fastidieux, qu’on n’a pas trop le temps d’ouvrir en saison, doivent entrer comme les bateaux en « carénage » : canon ôté, ressorts et mécanismes, ceux qui sont à la portée de l’usager lubrifiés. Ce sont des armes de service, des outils particulièrement exposés qui devront fonctionner le moment venu, les armes fines (quand on a un râtelier bien fourni) pouvant sortir, elles, plus chanceuses, seulement « aux beaux jours ».

La lecture. Aux temps d’Internet et des chaînes télé dédiées, se replonger dans les vieux auteurs sera une autre manière de chasser par la pensée, et de se ressourcer. La liste est longue (2), de Magné de Marolles au vieux Foudras, en passant par Le Coulteux de Canteleu, de ces auteurs qui ne devraient pas être réservés à la connaissance de seulement quelques érudits. On se rendra compte que leurs préoccupations n’étaient guère différentes des nôtres : autres temps, autres moyens certes, mais les chiens étaient les mêmes et le gibier déployait les mêmes ruses. Comme ce dernier, contournons ce temps, pour nous un peu c…finement !

1/ Voir notre article explicite (Faire…dans les bois !) du 8 juin 2017, pour ceux qui, inopinément, sont dans le...besoin !  

2/ Les Editions de Montbel rééditent tous ces vieux auteurs. Voilà une belle idée de cadeau, et pas que de Noël !