Les limites de la polyvalence (part II, suite et fin) : le TC Contender

De 1967 à nos jours, (reprise en 2007 par S et W),  voilà bien semble-t-il l’arme polyvalente par excellence puisqu’elle tire tout : du 22 LR aux calibres africains, du lisse et du rayé,  à la fois arme de poing et d’épaule, pionnière d’une modularité (« versatility » disaient les premières affiches) ne faisant pas oublier comme premier atout la précision. Et pourtant, malgré le succès du concept, c’est resté une arme « de niche ». Tentons de voir pourquoi.

En 1945, Kenneth Thomson installe à Long Island (NY) un atelier d’usinage qui fournit des pièces pour les armuriers et une fonderie qui cherche des débouchés, rencontrant en 1965 Warren Center, qui avait travaillé avec Iver Johnson et Harrington-Richardson. En 1967 le prototype pensé autour du 22 LR et du 38 special se voit adjoindre le 22 Hornet, le 22 Mag et le 22 Jet dont nous venons de parler dans l’article précédent. La conception de l’arme est assez simple, à brisure, mais un défi à la solidité et à la précision avec un seul gros verrou inférieur (voir flèche rouge ci-dessous) comme la plupart des armes à un coup que nous connaissons. La pression admissible d’origine est assez « conservatrice », seulement 48 000 psi (à comparer aux 45 000 psi de l’antique 30-30 par exemple), mais commencera à tutoyer les limites dès qu’il s’agira de dépasser le 44 Magnum. En 1969 les canons SSK, puis les munitions Herrett (1) autour du 30-30 poussé, et du 45-70 étui à parois droites, tous deux très populaires, illustrèrent un dilemme d’armurier et aussi, un peu plus tard comme nous allons le voir, de légalité.

Les travaux de B.Milek ayant montré que pour être précis, un canon court devait être lourd, plus la tête de culasse était grande, plus la pression de crête était multipliée par la section transversale, et donc plus de poussées latérales sur le cadre qui ne pouvait être aussi solide qu’un fusil classique à verrou. On risquait donc des flexions et étirements, encore plus préjudiciables dans une arme à brisure. C’est la raison pour laquelle les pressions élevées étaient plus facilement tolérées dans des cartouches à parois minces comme le 222 Remington que sur les « grosses » 45-70, et que le TC Contender G1 fit surtout la joie des utilisateurs de wildcats populaires comme le 221 Fireball, 7 TCU et autres petits calibres rapides vus précédemment.

Les séries Encore (1998) et G2 (2003) ont bien sûr solutionné ces problèmes, une fois le contentieux freinant la commercialisation de cette plate-forme polyvalente idéale, réglé en sa faveur aux USA allant jusqu’à une intervention de la Cour Suprême en 1992. En effet, sans même parler de la législation particulière de certains états qui n’autorisent le tir rayé qu’avec des munitions à parois droites, c’est un délit d’avoir une arme d’épaule au canon inférieur à 16 pouces (40,64 cm) car alors assimilé à une arme longue à canon scié. C’est la raison pour laquelle les canons les plus courts sont de 16 pouces ¼.

Or, malgré les 23 pouces (58,42 cm) certains calibres comme le 45-70 par exemple ont besoin de plus que ça pour éviter souffle, flamme, recul, boucan, et trajectoire en cloche. Ce qui était donc une plate-forme polyvalente idéale a donc souffert d’être trop légère dans le calibre, trop liée à l’image originale d’une arme de poing pour les chasseurs de cette discipline, ou trop instable et fragile quand le premier (et ici seul) coup est de la plus haute importance.

En Europe, hormis sur les stands de tir, elle est rarissime à la chasse, certains pays comme l’Allemagne, n’acceptant pas les armes de poing à un coup à la chasse. Même au pays de l’Oncle Sam, elle va au bout du spectre des plus longues armes de poing, compromis de petite carabine à canon court, maniable, modulaire, certes précise, mais sans vraiment supplanter l’immense marché de la chasse au whitetail où les armes d’épaule « classiques » sont aussi devenues maintenant pour beaucoup, légères et modulaires.

1/ Voir archive du 18 novembre 2020.