Rich Knoster (1946-2021) et la balle "Hammerhead"

L’ère des grosses balles « usine » pour canons rayées se termine dans tous les états où les cerfs étaient autrefois limités aux seuls fusils de chasse : Lightfield n’écrase plus le marché, Remington ne fait plus la « Buckhammer », restent les rechargeurs fidèles aux travaux de Rich Knoster, chasseur passionné, éleveur de setters anglais et irlandais, et concepteur de la fameuse balle « Hammerhead » qui donna le tempo des années 90.

Les canons rayés en « combos » pour les fusils de chasse s’étaient développés dès 1987 pour les fusils Ithaca et Mossberg, liés à la législation des états de l’Est des Etats-Unis qui interdisaient pour des raisons de sécurité, la percussion centrale à proximité des agglomérations. Une grande partie des chasseurs de cervidés (1) utilisant déjà pour ce faire les balles « pumpkin » (rondes du calibre), puis à partir de 1935 Foster (2), l’idée de Rich Knoster  fut de les faire tourner à l’aide de canons rayés à des taux de torsion oscillant entre 1/18, et 1/36 , 1/24 (ou un tour complet de la balle en 24 pouces pour l’Ithaca Deerslayer par exemple), surtout grâce à un dispositif de bourre spéciale qu’il fit breveter, et qui inspira ensuite plusieurs marques l’exploitant sous licence : Hastings, Hevi-shot, Ruag-Ammotech, mais aussi Lightfield, Remington, Rotweil Laser.

La balle, bien sûr ensabotée, était solidaire de la bourre et qui participait de l’expansion en s’enfonçant comme un coin dans le projectile. Elle restait attachée jusqu’à l’impact et augmentait la précision jouant aussi un rôle d’empennage en vol. Le principe fut validé par une intense collaboration au départ entre la petite firme de R. Knoster (Sabot Technology Inc.) photo ci-dessous et le PDG des canons rayés Hastings, Robert Rott, qui les importait de France où ils étaient fabriqués par Verney-Carron au taux de torsion 1/34. Il y eut compétition au départ entre les calibres 12 et 20, ou vitesse-trajectoire-pénétration qui se termina par un match nul, mais des résultats plus que probants. En polymère spéciale, le sabot saisissait la charge de 425 grains filant en 12 à 606 m/s, et un peu plus vite (627m/s et 410 grains) en 20, avec autant d’énergie à la bouche (presque 5000 joules) que le 300 Winchester Magnum ! La flèche n’était que de 9 pouces (23 cm) à 200 m, et l’énergie encore plus que suffisante pour renverser le grand gibier 1668 joules.

Mais c’est surtout la précision qui était stupéfiante, obtenue avec des lunettes de début de gamme comme la Burris 2X7 Fullfield qui servit d’ailleurs au développement de la cartouche 20 supermagnum (3,5 pouces) montée sur un single Harrington-Richardson à canon lourd au taux de torsion 1/28. Pour la revue Outdoor Life, Jim Carmichel obtint ainsi une précision de 2,062 pouces (5,23 cm) à 100 mètres quand la Winchester Rackmaster (3) fit trois fois plus : 7,136 pouces ou 18,12 cm.

Les problèmes financiers d’Hastings accablé par la baisse des taux de change dollar-euro, n’empêchèrent pas la petite entreprise de Pennsylvanie de continuer sous plusieurs noms (STI Custom Sabot Slug, Accuracy Innovations, Slug’s R Us) la production sous licence avec plusieurs grandes marques, ou au détail avec des formules personnalisées client selon son arme avec la balle Hammerhead, les coques Cheddite, des formules de poudres, principalement la Pro Reach Alliant qui est assez proche de la Red Dot, et donc de notre A1. Sa santé déclinant, Rich transmit l’entreprise à  son épouse Pamela, puis aux Texans de Freedom Ballistics Lab.

Paradoxalement, c’est le succès de ces munitions précises et puissantes qui ramena la percussion centrale dans le giron des états qui l’avaient bannie, mais en lui imposant de nouvelles contraintes (obligation des parois droites) qui en ont suscité pléthore de nouveautés : 350 Legend, 450 Bushmaster etc. (4). Comme chez nous, c’est l’apparition du sanglier qui fait qu’elles sont toujours prisées des rechargeurs, et qui sait, si aux prix restreint des canons en « combo », elles ne pourraient pas faire leur apparition un de ces jours en France ?

1/ En 1992, sur 8 états, et certaines parties de 12 autres, 40% des territoires étaient interdits aux « rifles », et donc 80% des chasseurs utilisaient le fusil de chasse, le reste étant dévolu à la poudre noire (muzzleloaders) et aux archers.

2/ Voir archives des 22 avril 2017, et 6 novembre 2021, sur les balles « slug » et Foster.

3/ Voir archive du 6 avril 2022. Cette balle américaine typique Foster, est une des seules disponible en France, lourde et puissante, surtout de près, avec son effet « donut » impressionnant.

4/ Voir archive du 9 mai 2023