Chasser au 44 Magnum ?

Le sujet de l’arrivée des carabines à levier de sous-garde en battue a déjà été effleuré ici dans un cadre plus général. Il peut concerner les traqueurs, mais aussi les postés pour peu que l’on tire pas trop  loin, ce qui est largement le cas dans nos battues hexagonales.

Chez nous en France, où la culture armurière n’est pas très développée même chez les chasseurs, on aborde surtout ce calibre par le fameux « Inspecteur Harry » incarné par Clint Eastwood  à l’écran, empoignant ce qui était à l’époque « le revolver le plus puissant au monde ». Depuis, ce calibre a été largement dépassé par nombre de nouveautés (500 et 400 Smith and Wesson, 454 Casull, etc.) assez effrayantes à tirer. Disons que cela reste comme « camp gun », c’est-à-dire comme arme de survie que l’on emmène dans le sac à dos quand on va en randonnée dans les Appalaches, le calibre limite acceptable pour une main moyenne…et tenter de stopper à quelques mètres un ours qui vous fonce dessus ! Ne riez pas ça arrive tous les ans là-bas (1).

Au départ il s’agit d’une extrapolation du 357 magnum (qui est rappelons-le un 9 mm ou « 38 » selon l’appellation US dopé) lié au truculent tireur, journaliste et écrivain Elmer Keith (ci-contre à dr.) dont nous vous narrerons bientôt les bisbilles avec  son alter ego Jack O’Connor « pape » du 270 Winchester et qui firent des décennies durant, les choux gras du milieu chasse et littérature « wild » que l’on peut traduire par « vie sauvage » aux Etats-Unis. Assez proche du 45 Colt qui existait depuis un demi-siècle il fut assez facile aux grandes marques américaines, dans les années cinquante, de s’intéresser à ce 44 Special bodybuildé et un peu plus long. L’avantage (comme pour le 357 magnum par rapport au 38) étant de pouvoir passer dans le sens descendant de l’un à l’autre en vertu de l’adage connu  selon lequel « qui peut le plus peut le moins ».

L’offre en munitions étant très large avec des balles de 180 (11 grammes) à 300 grains (19,44 grammes) lui donne une polyvalence et des performances qui ne peuvent qu’intéresser les chasseurs car elles sont bonifiées en plus dans un canon long. Le choix de balles, même en France est énorme, de la balle en plomb pour le plinking (tir sur gongs ou canettes !), à des classiques projectiles de défense, et même, la chasse aidant, des ogives techniques (A Frame de Swift, Barnes XPB) de près de 350 grains pour tirer les plus gros animaux. Pour les chargeurs tubulaires que l’on rencontre souvent sur les armes traditionnelles américaines, Hornady a fait une balle de 225 grains (Leverevolution FTX) dont la pointe en polymère évite toute percussion accidentelle.

Les catalogues et déjà un peu les armureries proposent plusieurs marques dans ce calibre dont il convient d’analyser un peu les performances pour constater qu’il est éventuellement utilisable facilement pour le chevreuil, mais aussi des petits sangliers de moins de 50 kgs à moins de 50 mètres. Il souffre seulement  en France (2) d’être un peu « assis le c…entre deux chaises » comme on dit : trop puissant pour tirer à l’arme de poing, et un peu juste comme arme d’épaule à la chasse. Il règle sans correction (DRO) autour de 100 mètres où sa grosse balle (en France une core-lokt classique de 17 grammes) ne va pas très vite (moins de 400m/s) mais garde encore une énergie de plus de 1300 Joules. On le voit c’est une arme maniable,  au recul particulièrement doux, apte à  tirer de près, particulièrement indiquée pour le traqueur du fait des capacités sécuritaires de ces armes où l’on peut armer le chien, du pouce, au tout dernier moment. Ci-dessous à dr. une Ruger classique à verrou en 44 et version camo, spéciale traqueurs avec canon court. 

1/En 2016, un randonneur du Montana a subi deux attaques d’ours dans la même journée. Il avait pour seule défense du spray au poivre qui n’a pas suffi pour repousser une femelle flanquée de ses deux petits. Le pire c’est qu’elle est revenue à la charge un peu plus tard. Il s’en est sorti en faisant le mort, ce qui est toujours conseillé en pareil cas. Entre 1900 et 2009 ces attaques ont fait en Amérique du Nord 63 morts. 86% des assauts mortels ont eu lieu après 1960, conséquence de l’augmentation des activités de plein air…et donc de rencontrer des bêtes sauvages qui sont, elles, sur leur terrain.

2/Aux USA il est d’un usage courant pour tirer le cerf de Virginie (qui est bien plus gros qu’un chevreuil !) et l’ours. Face à l’arme lisse qui, seule, peut lui être comparée dans le « tir court » généralisé chez nous, il fait mieux que toutes les balles de notre marché : Brenneke, Fier, balle-flèche etc.  car sa capacité de pénétration est bien plus élevée.