243 Winchester : le bon exemple du double emploi

Quand on s’intéresse aux armes et aux calibres, dans leur longue histoire, on va souvent chercher midi à quatorze heures, et il est facile de se perdre dans le tourbillon médiatique qui nous abreuve de nouveautés affriolantes alors qu’on a souvent, sous notre nez, bien souvent, chaussure à son pied.

En 1952, quand le 308 Winchester (1), sortit des entrailles du 30-06, il ne faut pas s’étonner que les préparateurs US aient aussitôt tourné autour et relevé le défi de l’améliorer soit par le haut et les calibres « 35 » (358 Winchester), « 33 » (338 Federal), ou par le bas et les 6,5 (260 Remington). C’est là, en 1955 que naquit le 243 Winchester. On le voit ici à gauche comparé au 308. L’objectif, comme toujours était le tir du whitetail ou cerf de Virginie que chassent 8 des 10 millions de chasseurs américains, tout en tendant la main au « varmint » vaste catégorie d’animaux allant en gros du chien de prairie au coyote et donc du 22 Hornet au 30-06.

De la même manière que la bonne fée Jack O’Connor d’Outdoor Life se pencha sur le 270 Winchester, le 243, un bon coup de marketing aidant toujours un peu, bénéficia du coup de baguette médiatique de Warren Page de Field and Stream. Ce dernier (1910-1977) était moins bon écrivain (2) que son aîné, mais un innovateur adepte du calibre « 24 » dont l’éphémère (1895-1899) 6-Lee Navy très en avance sur son temps où les aciers n’étaient pas suffisamment résistants et la PSF pas encore à son maxi de potentiel, était le meilleur représentant. Il avait bénéficié d’un travail considérable des arsenaux gouvernementaux et de la part de Winchester, et prépara d’abord le terrain pour le 220 Swift (1935). Page (ci-dessous au stand) qui connaissait tout cela était parti du 244 Holland-Holland pour la préparation de son 243 Page-Pooper, stimulant une demande que suivit avec succès Winchester.

Marchant sur les brisées du 257 Roberts et du 250-3000 Savage limités aux balles de 80-120 grains filant à 900m/s, ce jumeau balistique du 22-250 mais avec plus de punch à courtes distances offrait un poids de balles (55 à 115 grains), plus étendu vers le bas, la bonne moyenne se situant autour de 90-100 grains. Dans ce poids, une balle « premium » de nos jours approche la balistique d’une balle de 270 Winchester et 140 grains (chute de 0,5 pouce à 300m et 1,5 à 400m), seule l’énergie cinétique du 270 est plus forte (+ 816 joules), mais on est encore dans les 1000 nécessaires, et d’ailleurs , qui tire encore juste à 400 m ? Par contre le 270 recule deux fois plus, et le 300 Winchester Magnum trois fois ! Même le 6,5 Creedmoor pourtant réputé bénin à l’épaule recule deux fois plus, c’est dire…

Le placement cœur-poumon, derrière l’épaule est plus facile et les excellentes balles actuelles travaillent bien mieux qu’en 1960 où on ne tirait que des munitions d’usine genre Corelokt 100 grains avec des fusils à canons cours de 16,5 pouces qui abaissaient la vitesse d’une soixantaine de m/s. Parmi les dix cartouches les plus populaires au monde il propose un énorme choix de balles particulièrement en varmint, et le rechargement profite des mêmes balles que ses concurrents qui ne sont pas encore parvenus à le supplanter : 6 Remington, 240 Weatherby Magnum, et tout récent 6,5 Creedmoor. Il y a là toutes les Barnes (LRX, TSX), les Berger VLD, Hornady, Sierra, Swift Sirocco et A-Frame.

Armes neuves ou d’occasion, c’est le fusil léger idéal pour débutants ou personnes sensibles au recul, pour tous gibiers jusqu’à moyens, Warren Page prit même avec un trophée de l’état du Wyoming pour le pronghorn.

1/ Voir notre archive du 30 mars 2017 : « le 308 Winchester et ses enfants ».

2/ Contrairement à J.O.C. il n’écrivit que deux livres « One man’s wilderness » et surtout « The accurate rifle » (1973). Il fut aussi un des introducteurs en 1962 du 7 Remington Magnum.