22 LR Stinger : pour en finir avec le mythe...

Notre article comparatif du 14 avril dernier ne pouvait qu’amener des commentaires, surtout de la part des collègues de notre génération qui ont connu la même ferveur,  quand cette munition fut introduite chez nous en 1977. Tout le monde en voulait car on semblait pouvoir tout à coup boxer dans la catégorie au-dessus, celle du 22 Magnum…

Sans revenir en détails sur ce petit prodige (1), elle n’offrait rien de comparable dans l’impact explosif. Pour l’avoir tiré dans plusieurs carabines, même dans des semi-autos à l’époque où c’était encore possible, l’attrait de la trajectoire plate pour aller à 100m. n’était pas vraiment le critère. Malgré sa longueur d’étui plus longue elle était facile à nourrir et extraire dans les nombreuses « single » de l’époque, du fait de son alliage plus fort en nickel la rendant plus lisse au toucher, et remplissant les vides microscopiques en surface accessoirement aidant à une moindre traînée.

Outre la détonation bien plus sèche et puissante, sans trop s’embarrasser de précision autour de 30-50m. c’est l’effet expansion spectaculaire « blastant » les rats musqués (eh oui, nous n’avions encore que peu de ragondins par chez nous à l’époque) et toutes les cibles rigolotes de plinking qui boostait le « fun » comme disent maintenant nos petits jeunes. Il était initié par une pointe creuse au départ classique, mais dès sa sortie en pentagramme qui fut abandonnée très vite (en 1981), car la cavité plus complexe donnait des problèmes de séchage de l’apprêt final. C’est quand on s’intéressa vraiment à la balistique, et que survint la concurrence (toutes les balles « jaunes » de Remington dont nous avons parlé le 12 mai dernier, et les Hi-Vi généralisées Winchester X-Pert, et maintenant les hyper véloces genre Vélocitor), qu’on se rendit compte que la balle de 32 grains était finalement une fausse bonne idée.

Le taux de torsion de 1/16 était inadéquat pour la petite balle de 32 grains (2) car si l’énergie était à peu près similaire (autour de 280 joules à la bouche) les nouveaux-venus de 40 grains, avaient un coefficient balistique meilleur (0,125 contre 0,085) offrant moins de ralentissement, résistant mieux au vent pour tirer aussi à plat, mais plus longtemps. Cette moins bonne précision avait déjà été remarquée au stand, mais moins dans la campagne où on se rendit peu à peu compte que les Hi-Vi conservaient une énergie retenue et champignonnaient parfaitement à la distance d’emploi idoine pour le 22 LR de 75 mètres où la Stinger commençait à être larguée en précision, et explosait littéralement à l’impact.

Autant qu’il m’en souvienne, les semi-autos à l’époque (Reina, Gevarm, Unique X 51) où elles étaient encore en vente libre avalaient parfois difficilement des munitions (3) dont il fallait parfois raboter un peu la pointe et qui, de toute façon, par leur puissance, faisaient souffrir les ressorts des culasses non calées, voire les boitiers en zamac durement cognés par les levers d’armement en retour. C’est la raison pour laquelle elle n’était pas toujours bien digérée par les armes de poing, d’où les avertissements explicites sur certaines boites. Voir ci-dessus.  Et puis, c’est surtout le prix qui vint durement estourbir lui aussi le porte-monnaie bien peu garni des teenagers de l’époque. Ceux qui avaient plus l’esprit « chasseur-tireur» montaient rapidement au 22 Magnum qui doublait la distance d’emploi, et puis maintenant, le 17 HMR vient cocher toutes les cases qui avaient marqué cette époque : plus rapide, plus plat, plus précis, et encore plus explosif !

La Stinger est toujours disponible mais à un prix qui est celui, hélas, de nos souvenirs de jeunesse : un bon quart plus cher (14, 20 euros les 50 !) que les autres Hi-Vi haut de gamme qui font mieux le job. On trouve même à 6 euros les 50, en grande surface, une 36 grains à 385m/s, et encore 315 et 157 joules à 50 m, efficace à cette distance et qui permet de tirer plus et plus souvent. « Les temps changent » pour rester dans l’ambiance seventies, comme chantait Bob Dylan…

1/Voir notre archive du 12 juin 2019.

2/Il se fit aux USA, pour la Ruger 10-22, des canons spéciaux Green Mountain au taux de 1/18 pour la 22 Stinger.

3/ Les étuis furent plaqués, laitonnés, et même zingués. Exemple ci-dessus face (au centre et en bas) à une 22 classique.