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FCM 25.00
3 août 2020

"Buffers" et autres charges dites "tamponnées"

La sortie d’une nouvelle cartouche « révolutionnaire », la Winchester « long beard », pour le tir à longue distance, et la menace sur le plomb dans nos cartouches, fait revenir à la surface une longue histoire, celle des additifs, ajouts, et améliorations nombreuses pour améliorer la qualité de la gerbe de nos cartouches. A l’époque où on rechargeait (chut, ce que certains par ici font encore…), cela relevait quasiment de l’alchimie !

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C’est une histoire un peu vieille comme le tir et la balistique, le chargement par la bouche de la poudre noire mélange également capricieux, s’était déjà penché là-dessus, ajoutant aux plombs de la poudre d’os, de la sciure de bois, du liège râpé, et la fameuse tireuse de la Belle Epoque « Annie du Far-West » (1), pour être sûre de casser plateaux et cibles plus durs que ceux actuels, veillait à tirer sa poudre personnelle qu’elle cachait au passage de la frontière sous sa crinoline pour tromper nos gabelous, et du plomb de 6, plus gros que celui du ball-trap naissant. Nos anciens avec les chevrotines (ci-contre à g.) usaient également de toutes sortes d’artifices, cire, paraffine, pour tenter d’empêcher les ballettes de s’enfuir dans toutes les directions.

Dans les années soixante quelques vieux grimoires recensaient des recettes qu’on se passait sous le manteau où entraient en lice la fécule de pomme de terre, les flocons d’avoine, et surtout le talc (2) pour densifier les gerbes, et en théorie, rendre le tir plus « fluide » au passage des chokes. Il s’agissait, en comblant les vides entre les plombs, de rendre la charge plus homogène et efficace avec cependant un effet pervers que l’on va détailler plus loin : une augmentation des pressions sollicitant tout à la fois les armes, mais aussi les composants de la cartouche, et particulièrement la bourre à jupe. C’est aussi pourquoi, toutes ces petites « manips » (…à surtout pas faire au coin du feu quand on se les roulait à la main !)) datent un peu, de l’époque du plomb et des bourres grasses…

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Dans les années soixante, aux USA, selon une étude CONSEP où le tir des oies s’effectuait en moyenne à 67 mètres et des canards à 53 (là-bas l’emploi d’appelants vivants est interdit) 10% des chasseurs utilisaient ces petites combines, mais les farines diverses étaient une fausse bonne idée, l’humidité ne faisant pas bon ménage avec, les éventuels « grumeaux » augmentant considérablement la pression ! Dans les années 70-80, Tom Roster, un chroniqueur connu (pour Shooting Sportsman Magazine, Skeet shooting review, American shotgun) fit œuvre de précurseur dans l’étude sur le chargement de la grenaille d’acier avant que les premières charges « premium » utilisant comme « garnissage » ou « tampon » des microbilles plastique fassent leur apparition (3). Ses ouvrages, néanmoins plusieurs fois réédités, même controversés, surtout aux USA pays procédurier, font toujours autorité pour tous les amateurs de balistiques…et de la dosette !

Dès 1980 les industriels mirent sur le marché des « compléments » à base de téflon, de mica, de graphite loin d’être donnés (10 dollars le pot, plus frais d’expédition), dénoncés déjà pour l’environnement et dont l’utilité était discutable. Le « liant » pour parler en terme de tambouille ne pouvait avoir que peu d’action sur l’acier qui, contrairement au plomb ne se déforme pas, et absorbe mieux l’énergie que le premier surtout répercute : voir le fameux balancier de Newton. De moindre densité, la colonne plus longue pour arriver au même poids avait moins de place déjà pour se déplacer dans le canon, les constructeurs annonçant au moins 500 psi (et sans doute plus ?) de surpression. De toute façon, on n’échappait pas à la simple arithmétique que l’on employait déjà du temps de grand-père : 28 grammes de bon plomb, plus autant de « tampon » faisait bien 50 grammes à pousser « dans le tuyau » ! Fallait aussi le répartir uniformément (avec des vibreurs de prothésistes dentaires, des nettoyeurs de bijoux à ultrasons…voire avec le rasoir électrique de papa) pour qu’il soit efficace, et impérativement mettre moins de poudre pour ne pas trop solliciter les bascules.

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La vitesse et la pénétration chutaient, en plein dans une époque (1997) où les constructeurs (Hogdon, Lyman) ne préconisaient plus ces additifs, même pour le bismuth dont la densité s’approche pourtant le plus de celle du plomb. En 2013, un célèbre magazine US, reprenant les études d’un de ses journalistes datant de 40 ans sur les « buckshots » (chevrotines) n’ayant pas trouvé de différences de concentration, mais plus de pénétration des munitions standard, (plus chargées en poudre et allant plus vite), fit la même réflexion entre les magnum chambrés 76 et les super chambrés 86. A 40 m. la différence de concentration (72,6 contre 71,8%) était infime…mais 50% de recul en plus à encaisser pour le super magnum ! Les chasseurs, pragmatiques, en tinrent compte, les subtilités du « tamponnage » se cantonnant aux irréductibles bricoleurs ou utilisateurs du calibre dix où ces artifices, sur les très grosses charges, peuvent encore se discuter. A ces niveaux, l’amélioration de la concentration pouvait atteindre parait-il 20 % ?

De nos jours, les charges « premium » aux USA, pour des gibiers particuliers qui n’existent pas chez nous (dindon sauvage, oie des neiges) exigeant d’envoyer loin, une forte concentration de (gros) plomb épargnent aux chasseurs ces longs tâtonnements, et l’arme à double tranchant du « tamponnage » de la charge qui, seule, pouvait se comprendre chez nous du temps des bourres Gabel ou Iris, du plomb non additivé (4), et du sertissage demi-rond moins dur à vaincre que celui en étoile. Par ailleurs, le manque de place, et surtout de données publiées contrairement au 12, exclut de facto les petits calibres à la mode actuellement (20-28-410) dont la plus grande solidité structurelle en proportion, pourrait envisager cependant de « jouer » un peu plus avec les pressions.

Longbeard-XR_Shot_Dispersion

Toutes ces considérations font le miel des forums visant à obtenir « à la planche » comme on disait dans le temps, de belles concentrations certes, mais pour se rendre compte au final que c’est la vitesse qui doit parfaitement s’adapter à la charge. Bien sûr, tout ce que vous mettez dans un fusil peut faire tomber à 20-30 m. et c’est fort évidemment après que tout se joue. La longue portée est un domaine spécialisé qui a ses exigences et ses lois qui, même étudiées scientifiquement depuis le temps du général Journée, garde encore bien des mystères. Dix chasseurs-rechargeurs utilisant la même « recette » même soi-disant bonne, pourraient bien obtenir dix résultats différents pour peu qu’ils utilisent autant d’armes et de chokes…

1/ Annie Oakley (1860-1926). Compagne, à la Belle Epoque, de la fameuse tournée de Buffalo Bill en Europe.

2/Ce minéral (silicate de magnésium) en cristaux est plus léger et encaisse mieux la chaleur que les produits organiques : fécules, etc. Son emploi, des fesses des bébés, à celui des armes pour faciliter le glissement des plombs, peut sembler pour le moins  inattendu. Son tir, en outre peut…parfumer agréablement le sous-bois !

3/ Winchester Supergrex en 1986, produit 2-3 ans. Actuellement la « longbeard » est une résine au départ liquide qui durcit, et part en poussière au moment du tir. Un processus industriel difficile à maîtriser : il faut empêcher que le liquide suintant aussi vers la charge, adhère aux parois. Tom Roster effectua des travaux de développement de charges pour Remington Hevi Shot, Winchester et bien d’autres. Egalement spécialiste balistique pour l’US Fish and Wildlife Service, et le North American Shotgunning Education Program.

4/ Le plomb extra-durci, ou nickelé ne se dilatant pas, dispense, in fine, de tenter améliorer sa charge.

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