Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
FCM 25.00
19 décembre 2021

Frank S. Glaser (1887-1974) : dans les solitudes glacées du Grand Nord

Le développement du loup, qui arrive maintenant dans nos bocages de l’Ouest incite à retourner vers les vieux auteurs et voir ce qui se passait ailleurs avec le prédateur il n’y a pas si longtemps, et ceux qui le traquaient. Frank S.Glaser, trappeur puis chercheur pour l’US Fish and Wildlife Service en Alaska fut de ceux-là, sa vie ayant été documentée  à partir de 1952 par Jim Rearden pour Outdoor Life et dans un fameux livre "Alaska's wolfman".

s-l300

 

Originaire de Boston, vétéran comme ambulancier de la première guerre mondiale il arriva en Alaska en 1915, embauché comme chasseur professionnel par la commission des routes de la Richardson Higway, et nourrir les cantonniers attelés à la construction de la route devant rallier Fairbanks à Valdez. Ce qui exigeait une condition physique hors-pair, et une technique particulière en ne tirant que deux mouflons mâles à la fois, mais en aménageant des caches bien protégées des charognards dans la glace, qu’il fallait récupérer ensuite. Il construisit de ses mains une cabane en rondins juste en dessous du relais routier des Black Rapids qu’il acheta en 1919, pour le confier assez vite à des gestionnaires et se consacrer entièrement à la chasse et au piégeage.

glaser3

Frank Glaser, fonctionnaire de 1930 à 1955, évolua particulièrement autour des rivières Savage et Black Rapids grâce à son extraordinaire condition physique. Il fit la piste de Valdez (370 miles) à pied, et pouvait suivre, en 1937 à plus de 50 ans, la migration des caribous sur plus de 200 miles, seul et avec un équipement léger de toile, cuir, blouson de laine Filson, bottes L.L. Bean. Cet équipement sommaire évoluait ensuite au fur et à mesure de son avancée et de sa collecte au 30-06, puis au 220 Swift, calibre (1) qui le rendit célèbre car il tirait tout avec la petite balle de 48 grains…même un grizzly, criblé de 11 coups avant de cesser de lui courir après !

s-l1600

 Dès septembre, et les premières neiges, il tuait quelques caribous dont il tannait immédiatement les peaux, pour se faire un abri, puis il complétait son équipement selon son avancée. Face au fameux grizzly tiré au 220, il y avait 100 miles à faire pour rentrer dans une météo impossible, et le fameux ours lui servit immédiatement à se faire des mitaines, un bonnet, et des bottes à semelles en peau d’orignal.

775ea76ff7c0b4eb12d5aac824397edc

Trappeur, il piégeait renard, vison, lynx, martre, et bien sûr le loup tenant des statistiques scientifiquement exploitées ensuite, élevant des hybrides pour étudier leurs moeurs. Le 12 juillet 1939 il prit un loup record qui tient toujours pour l’Alaska (2) de 79 kgs sur la rivière Seventymille près de la ville d’Eagle. Le poids moyen d’un mâle était de 50 kgs, et 40 pour les femelles. Son nom reste particulièrement attaché au relais routier des Black Rapids. Il était un des 30 relais échelonnés tous les 12 miles environ soit à peu près un jour de route,  sur la piste de Valdez : un des premiers à ouvrir (3), étape cruciale dans la grosse période 1904-1923, car on y passait des attelages de carrioles à 4-6 chevaux aux traineaux à cheval simple (voir ci-contre à dr.) et aux chiens dès les premières neiges pour passer la Isabel Pass, au pied d’un énorme glacier de trente miles, et particulièrement actif : il avançait encore de 1 miles par mois en 1937 !

Ces oasis polyvalents et hauts en couleur, y accueillaient les mineurs en route vers le Yukon depuis 1900, les colons et  chasseurs ou premiers pêcheurs sportifs de saumons. On voit ci-dessous, Frank Glaser avec un poisson de 18 kgs.  Ces établissements pittoresques faisaient hôtel rustique avec salles collectives et couchettes comme les refuges de haute montagne, bureau de traite pour les populations indiennes locales, avec importantes écuries et chenils attenants. A la lueur des lanternes à pétrole, la popote y était sommaire : soupe à l’orignal, ragout de wapiti, crêpes au levain, brioche à la cannelle, le tout arrosé de whisky « on the rocks »…les glaçons, il est vrai, n’étant pas loin !

488px-FWS_agent_Frank_Glaser_with_two_sheefish_caught_thru_the_ice_by_Eskimos_at_Kotzebue

L’hiver, par moins 30° il n’était pas rare d’avoir à y être bloqué un mois, et d’être obligé de monter avec les voyageurs les plus costauds, des expéditions de secours pour ramener des voyageurs égarés dans le blizzard. Leur intérêt ralentit dans les années 1925 quand routes et chemin de fer furent achevés, et les rares établissements ayant pu être sauvés, notamment des incendies (4) sont désormais des musées ou des auberges de jeunesse et autres relais pour voyageurs. Bénévolat et sens du patrimoine historique, visent à les maintenir sous forme de musées ou de tourisme dans l’esprit des origines. Citons, outre celui de Black Rapids (ci-dessous à dr.), Kantishna et Talkeeta dans le parc national de Denali, Gakona (parc national d’Elias), Eureka Lodge (chaîne des Chugach), Sheep Moutain sur la Glenn Highway.

black-rapids-rh

1/En 1935 à sa sortie c’était le calibre usine (5,56X56) le plus rapide du monde (1220m/s) qui ne fut dépassé qu’en 2003 par le 223 WSSM. A 100 m il est toujours à 1000m/s et 1600 joules, très indiqué pour le varmint (dont il n’abime pas les peaux pour les chasseurs-trappeurs) jusqu’au chevreuil à l’affût (encore 900 joules à 300m.). F.Glaser tira aussi au 250-3000, autre calibre très rapide introduit en 1915.

PH

2/En 1947, un loup de 78 kgs fut tué dans les Territoires du Nord-Ouest, mais il semble que ces poids puissent être dépassés car les trappeurs ne pesaient quasimment jamais, dépouillant immédiatement sur le terrain. De plus, les biologistes pesant systématiquement eux, relevaient souvent plusieurs jours après une prise effectuée le ventre vide, l’animal étant en mouvement à la recherche de nourriture.

3/Il fut notamment tenu par un Français, Victor Colombon.

4/Pour empêcher les bois de devenir secs et cassants avec le gel, les murs en rondins étaient souvent enduits de goudron et d’huile : les poêles à bois et les lampes à pétrole à proximité de ces matériaux hautement inflammables, étaient donc à manier avec précaution.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
FCM 25.00
Publicité
Archives
Publicité