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FCM 25.00
24 juin 2023

Quel avenir pour les magnums courts ?

Après le premier accès de fièvre « magnumite » inoculé dans les années cinquante par Roy Weatherby, la « rechute » des années 90 fut plus dirimante encore, car ajoutant aux « longs », une prolifique descendance de « courts » au tournant du siècle, mais qui risque bien d’être sans lendemains. On va tenter de comprendre pourquoi.

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Le concept de magnum courts initié par le 300 Winchester Short Magnum en 2001, le 270 WSM en 2002, puis les 222-243 Super Short Magnum en 2003 et le 25 en 2004, a été immédiatement suivi par Remington avec ses Short Action Ultramag en 300 et 7mm, et plus tard (2008) par les 300 et 338 Ruger Compact Magnum, tout ça pour dupliquer, dans des boitiers courts, les performances du 300 Winchester magnum. Pourquoi subitement une telle éruption de petits… « boulons » ? Les « majors » américaines à quelques décennies de distance furent saisies du même prurit que celui initié par Roy Weatherby après la guerre. Celui-ci ayant réussi son coup et désormais tenant pignon sur rue, fit un émule bien plus tard, en 1993 avec John Lazzeroni, l’histoire à la sauce US étant de nouveau fort belle, puisqu’il s’agissait d’un passionné de rechargement certes et donc ardent « wildcatter » de Tucson (Arizona), mais surtout, au départ prospère vendeur d’accessoires de motocyclettes ! Ce n’est pas tout à fait la même chose, mais on reste toujours dans le domaine de la vitesse !

Le « mur » des 1000m/s dépassé

Ayant lui aussi le sens du marketing et du « buzz » médiatique, il sortit deux gammes de magnums longs et courts aux noms pittoresques, et aux performances extraordinaires qui rendirent les grandes marques disons « nerveuses ». Ses produits phares, tous en « 30 », le calibre américain fétiche (c’est le 7,82 Nato) étaient en « long » : le 308 Warbird, et en « court » : le 308 Patriot. Ces derniers, avec des longs canons de 26 à 28 pouces propulsaient sur base 416 Rigby, des balles de 150 à 180 grains autour de 1100 m/s ! En fait on ne faisait que redécouvrir un mouvement initié par Roy Weatherby avec ses 257, 270, 7 mm, mais dont le premier produit « grand public »  et non cartouches "propriétaire" si on veut fut, en 1964, le 350 Remington Magnum. Ce dernier proposait des performances similaires au 35 Whelen, mais dans un boitier court.

Warren page

L’affaire était dans l’air du temps, car P.O. Ackley déjà, en 1962, dans son célèbre « manuel pour les tireurs et rechargeurs » en recensait déjà quelques-uns comme le 30 Howell, et surtout les 300-378, ou 7mm Supermag Mashburn fruit du travail d’un armurier d’Oklahoma City, partant d’étuis de 300 Holland-Holland raccourcis avec épaulement de 30° pour tirer une 150 grains affichant déjà une fort belle vitesse de 969m/s. Bob Hagel, et surtout Warren Page (1910-1977)  ci-contre à g. rédacteur en chef de Field and Stream, auteur en 1973 de l’ouvrage de référence « The Accurate rifle » en firent l’éloge : celui-ci étant le premier, avec sa célèbre « Old Betsy » en 7mm Mashburn Supermag à s’emparer des neuf principales grandes antilopes à cornes en spirale d’Afrique. Tout cet été, nous allons développer, en trois épisodes, la saga de cette arme légendaire.

300 WM et 7,82 Patriot

John Lazzeroni relança donc un mouvement qui était on l’a bien compris, latent, correspondant aussi à l’air du temps des années 2000 : des carabines plus compactes et donc précises à boitiers courts initiées par le succès du 308 Winchester, les poudres modernes étant également mieux utilisées dans des étuis ramassés à fort épaulement et en forme de petites « bouteilles ». Son 308 Patriot (7,82X52) en 1997 était le plus rapide des Magnums courts en « 30 », mais comme pour les longs (du 257 Scramjet au 416 Meteor), il en déclinait en courts toute une gamme aux noms aussi exotiques que percutants : 243 Spitfire, 264 Phantom, 284 Tomahawk, 338 Galaxy (performances identiques au 338 Winchester Magnum), 416 Maverick. Tout ce petit monde dépassait allégrement les mille mètres par seconde, l’astuce étant, à poids égal de projectile sans vraiment jouer sur sa forme ou son aérodynamique, de le sous-dimensionner et de le recouvrir d’un alliage lubrifiant augmentant le diamètre pour l’adapter à des fusils personnalisés à la chambre particulière qu’il fabriquait. L’hyper vélocité était obtenue par le volume et la pression de la chambre, laquelle restait assez contenue du fait de l’élasticité de ces projectiles particuliers. Exemple : face au 308 Winchester si la vitesse augmentait de près de 30%, la pression ne passait que de 62 000 à 65 000 psi. Une paille donc. Bien sûr, il était inutile de chercher de telles munitions si particulières sur les étagères des armuriers : il fallait directement les commander, et au prix fort bien sûr, directement chez le fabricant : 3 à 7 dollars le bout, selon le calibre ! Le 7,82 Patriot ci-dessus face au 300 Winchester Magnum, et ci-dessous face au 300 Winchester Short Magnum.

Patriot et 300WShrotma

Même chose, on s’en doute pour les armes réalisées à partir de 1995 (série L.2000) sur mesures, parfois à l’aide de rapprochements avec quelques marques (Savage, Sako) concurrentes des deux « grands » on l’imagine fortement titillés par le battage médiatique qui se fit autour des performances annoncées : précision d’une minute d’angle à 600 verges soit 15 cm à 500 de nos mètres ! L’entreprise sortit en 2005 (série L.2005) de nouvelles versions plus légères, les premières armes étant plutôt lourdes (autour de 5 kg) pour contenir le recul dans les hauts calibres, mais la cure d’amaigrissement n’ayant aucune incidence sur le poids de la facture : prévoir quand même 6 à 8000 dollars…Dans ces hautes vitesses, il fallait aussi anticiper une usure rapide des canons autour de 7-800 tirs quand un classique 308 Winchester en étalait 3500 ! On boxait là, dans une catégorie d’utilisateurs fortunés, motivés par les performances et la balistique pure. Mais il n’en manque pas aux Etat Unis… La marque de l’Arizona allait néanmoins vite trouver avec Weatherby déjà solidement installé sur ce créneau, mais surtout avec la réaction de Winchester SM, SSM, ou la myriade des Remington RUM voire RSAUM, rapidement des concurrents à qui parler. Il n’empêche que Lazzeroni existe toujours, et conserve ses fans aux USA, ce qui montre qu’il existe là une voie, mais sans doute désormais très étroite et même sans issue, du moins au niveau de la chasse pure.

La fin des… « barricots » ?

En France, ce sont surtout les 270 et 300 Winchester SSM qui nous ont fait déguster, à petites doses,  reconnaissons-le  selon les armuriers, ces petites « fillettes», et la diffusion des autres grands crus (RSAUM, Ruger Short Action Ultramag) est restée confidentielle. Primo, très vite les différences de performances n’ont pas été si évidentes que ça : le 270 Winchester Short Magnum fait certes avec une balle de 160 grains, ce que son ancêtre (né, le pauvre vieux, en 1925) assume avec le calme des vieilles troupes, pour une 130 grains. Et dix ans plus tard, le vétéran, blanchi sous le harnais, que l'on avait un peu vite enterré, est même maintenant en passe de pousser dans les oubliettes de l’histoire armurière, le nouveau venu. La comparaison vaut d’ailleurs pour le 300 WSM face au 300 WM ce dernier ayant amplement fait ses preuves, dans la battue française et ailleurs, avec la Browning Bar. Avec un recul de dix ans maintenant, toutes ces nouveautés qui étaient censées apporter un « plus », n’ont jamais été décisives dans un milieu d’utilisateurs qui n’a aucune raison de jeter aux orties, des calibres qui ont pleinement montré leur efficacité depuis des décennies.

7_82_Patriot-7_82x52-2

Dans l’architecture même des armes et des munitions, on semble même avoir atteint là une limite car, contrairement aux WSM et RUM qui, encore, arrivaient à se glisser dans des actions courtes genre 308 modifiées, les « Supershort magnum », semblent inadaptées aux armes à verrou traditionnel qui demeurent, quand même, le fond de la chasse mondiale à l’arme rayée. Les coûts de conception et d’outillage nécessaires pour aller plus loin dans ce domaine semblent désormais rédhibitoires pour les fabricants, et il fallait s’attendre à ce qu’ils arrêtent assez rapidement les frais. Comme par hasard d’ailleurs, ils ont tous très vite regardé ailleurs, à peu près au même moment, pour rebondir, avec le 6,5 Creedmoor vers des solutions anciennes (le 6,5X55 Suédois) si éprouvées qu’elles sont toujours d’actualité en Europe du Nord, même pour les plus grands animaux comme l’élan. Car c’est dans les vieux pots, dit-on, qu’on fait la meilleure soupe…balistique s’entend ! Et il ne serait donc pas surprenant que toutes ces « petites bouteilles » aguichantes et capiteuses, vite éclusées, et qui firent tourner la tête des tireurs passionnés, tout émoustillés par leur parfum étrange de millésimes rares, ne les retrouvent plus hélas, en magasin…Peu importait en effet le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse : ici, bien sûr, celle de la très grande vitesse. Elles ont été dégustées certes, mais selon la sagesse des chasseurs hexagonaux, plus connaisseurs bien sûr en matière viticole que nos amis yankees…et donc avec prudente modération !

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