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23 mai 2025

R.W. Service (1874-1958) : le barde du Yukon

Amoureux de notre pays où il a fini ses jours (1) Robert William Service devrait être plus connu en France, où, par bonheur ses enfants viennent en 2021 (2) de faire paraître une anthologie de ses œuvres innombrables :  10 romans et un bon millier de poèmes consacrés au Grand Nord canadien, mais aussi aux animaux et à la guerre. Pacifiste convaincu (son frère fut tué à Ypres), et trop vieux pour les tranchées, il se fit engager dans le corps des ambulanciers U.S. où il fut quatre fois décoré.

Anglo-écossais, émigré à 22 ans au Canada il vécut à une époque où tout était possible dans ce vaste continent, vagabondant dans tout l’Ouest : travaillant dans les scieries de l’Oregon (1896-1903), vacher en Colombie Britannique, banquier en plein milieu de la ruée vers d’or du Klondike (3) dans la ville de Dawson city qui passa de 500 habitants à 30 000 en deux ans ! A partir de 1909 il se consacra pleinement à la littérature entamant un périple de 3200 km à pied, diligence ou canoë avant de retourner en Europe (1913) pour s’y marier avec une Française et découvrir la Côte d’Emeraude en Bretagne, écrire son premier roman (The Pretender, 1914), suivi de quatre autres jusqu’en 1927, puis deux livres de mémoires après-guerre (Ploughman of the moon, 1945 et Harper of heaven, 1948).

Entre les deux guerres il voyagea encore beaucoup en Amérique du Nord, mais aussi en Russie (1938-39), côtoya la grande époque des écrivains cosmopolites de langue anglaise, ami de Joyce, Maugham, Lawrence, et surpris par la guerre dans sa villa de Lancieux (Côtes d’Armor) dut rejoindre la Grande-Bretagne puis les Etats-Unis où on le retrouva à Hollywood donnant la réplique à John Wayne et Marlène DietrIch. Après-guerre, âgé, il vécut entre Dinard et la Côte d’Azur, publiant encore l’année de sa mort  (Song of the Far North) au terme d’une vie bien remplie d’aventures et de réflexions profondes sur le sens de l’existence : une montagne porte son nom en Colombie Britannique, et le Canada a même émis un timbre évoquant Sam Mc Gee, le personnage emblématique de son oeuvre.

De celle-ci, la poésie l’emporte avec son style imagé, confraternel et humain, plein de compassion pour tous les êtres confrontés à une Nature souveraine, magnifique et cruelle notamment lors de la ruée vers d’or du Yukon « où les hommes ordinaires contribuaient au bon fonctionnement du monde ». Comme Sam Mc Gee, pauvre bougre du Tennessee, parti errer, transi autour du pôle qui, à l’article de la mort, demanda la crémation pour au moins… se réchauffer car « il y a des choses étranges faites sous le soleil de minuit par les hommes qui peinent à trouver de l’or, et les sentiers de l’Arctique ont leurs histoires secrètes qui vous glaceraient le sang ».

Dans cet univers impitoyable vagabondent « des hommes sans nom qui parcourent des rivières inconnues, et dans d’étranges vallées accueillent seuls d’étranges morts » (à l’Homme du Grand Nord) comme celui qui fit un trou six pieds sous terre pour trouver de l’or, et en moins d’un an finit au même endroit « dans une ombre sinistre dans six pieds de fond de moisissure glacée » (Le Yukoner). Il s’agissait de « mineurs fraîchement débarqués des ruisseaux, sales comme des chiens, et chargé comme des ours, vêtus de chemises en peaux de daims vernies de terre » (La fusillade de Dan Mc Grew) pétrifiés par « L’Or ! Jamais on n’a vu une armée pareille, pitoyable, futile, inapte », débarquant à Stagway, balayée par le vent » au pied des lacs Bennett, Tagish, et Windy Arm « sinistre et sauvage, présageant haine et malheur » (la Piste de 98).

Dans cette région dont on disait « que Dieu était fatigué quand il l’avait créée (…) ce n’est pas l’Or que l’on désire, mais plutôt le trouver, grande et vaste terre là-haut, forêts où règne le silence, beauté qui ravit, et calme qui remplit de paix » (L’appel du Yukon). Face à cette frénésie destructrice, il oppose la beauté du quotidien, la contemplation « le chant des oiseaux, l’extase de la rose, les cieux tachetés de nuages, le rire des sources limpides, les rayons de soleil noyés et le parfum d’avril, le blé de bronze scintillant, l’ombre violette des arbres » (Petite prière) qui offrent réconfort et gratitude au milieu du chaos.

Implicitement chasseur ce « compagnon des arbres, quand la Nature est notre ancrage » (Rolling stone), était critique sur la cruauté de certaines traques des oiseaux chanteurs (Allouette), et sur la moralité des battues « sportives » de l’époque victorienne où des « bouquets de plumages sanglants » du tir aux pigeons vivants (Monte-Carlo). Son amour des chiens nous touchera tous, du début à la fin quand on va au refuge chercher un compagnon « dont on pense que le cœur est brisé, mais dont l’œil faible s’ouvre » pour partager avec nous (chien abandonné) jusqu’au bout, une vie heureuse. « Nous les aimons mais c’est aussi bien pour nous tous que les chiens ne le sachent pas » (conversation canine), surtout quand il faut les quitter pour de bon. Nous avons tous connu ça, quand il faut se séparer, comme lui, du vieux Dick sur la piste enneigée où il ne peut plus tracter le traîneau, et ralentit l’ensemble : « un coup rapide et soudain, vois-tu. Voici ma main à lécher, un câlin avant de partir. Mon Dieu, ça me rend malade, vieux chien que j’aime tant. Pardonne-moi, pardonne-moi Dick. Un coup rapide et soudain…» (Mort dans l’ Arctique).

« Si occupés à pêcher, chasser, vagabonder, si occupés à vivre qu’ils n’ont jamais le temps de mourir », les homme d’action voient cependant inexorablement arriver ce temps « où la vie est adoucie par une brume, les visions désagréables ne sont plus claires (…) la paix semble s’infiltrer dans nos pores, sachant que l’hiver est proche, et qu’il faut attendre décembre avec le sourire » (Eté indien). Avec lui (Chaque jour, une vie) on peut tous conclure avec l’émotion de la nostalgie de l’âge qui s’avance : « Oh si seulement toute vie n’était qu’un jour ensoleillé doux et sain. Et qu’au soir je puisse dire : je dors pour me réveiller ».

1/ Dans le petit village de Lancieux (22, voisin de chez l’auteur de ce site, (qui vit « de l’autre côté de la mer » dans le 35, comme on dit dans la région malouine, là où Colette écrivit « le blé en herbe », chanta Léo Ferré et où est enterrée la comédienne Tania Balachova), une rue porte son nom depuis 1947, et une école (2002).

2/ Voir le joli site de sa descendante (C.Longepe-Service) que l’on trouve facilement sur le Net.

3/ Entre 1896 et 1899, elle mit en marche plus de 100 000 pauvres hères dont à peine la moitié arriva à bon port, et 4000 seulement trouvèrent la fortune, l’hystérie collective, le scorbut, le territoire hostile, le froid intense faisant des ravages.

 

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20 mai 2025

22 LR : pourquoi l'Amérique n'a pas de munitions "match" ?

Paradoxe au pays du bench-rest, des compétitions ARA, NRL et PRS, des prestigieux canons Shilen, Kidd, Volquartsen, dont les usines déversent sur le monde entier 2,5 milliards de cartouches par an, pas une seule là-dedans est « match » ! Pire même les fans du « proudly US » qui s’accrochent au beau souvenir des J.O. 92 et les deux médailles obtenues à Barcelone apprennent, consternés, que la fameuse Federal Ultramatch UM 1, était conçue en collaboration avec RWS…

Cette initiative relevait en fait d’un sursaut national pour prouver que les tireurs américains n’avaient pas besoin de munitions étrangères, (en fait européennes !) pour briller, et fit en fait long feu, fusillée comme on va le voir, toujours en encore, par les coûts de production. Né aux Etats-Unis en 1887, après plusieurs années de tribulations entre les Short, Long, Long Rifle et quelques autres, le petit calibre fut sans cesse amélioré, et Remington-Peters comme Winchester produisirent immédiatement des munitions pour les concours comme Winchester-Western avec la Super-Match pour les fusils Remington 37 et Winchester 52.

C’était une 40 grains bénéficiant de la lubrification Lubaloy qui se déclina en plusieurs séries Mk II (1950) puis Mk III-IV et Gold puis arrêt en 1984 comme la T 22 utilisées dans les modèles 52 D/E à crosse lourde et 52 E pour le tir aux trois positions, mais c’était déjà une époque où Anschûtz et Walther ou Suhl commençaient à damer le pion aux marques américaines sur les stands. Les deux géants d’Ilion et Newhaven depuis 1930 vendaient deux catégories de munitions : standard pour usage général-training, et match (voir affiche ci-contre). La T 22 relevait de la première, et la WW Supermatch et Gold de la seconde étant encore massivement employée aux compétitions de Camp Perry pour le tir à 100 yards, mais Eley Tenex et RWS étaient déjà là avec des gammes bien plus étendues et compétitives.

Le phénomène est bien sûr concomitant de la fameuse année 1964 et du contexte américain dans le 22 LR qui est bien différent de l’Europe. C’est un marché fort consommateur en armes de poing, et en carabines semi-auto à forte capacité tirant un maximum de munitions bon marché de qualité médiocre, où même la compétition (silhouettes métalliques par exemple) n’a pas forcément besoin d’une grande précision. Par ailleurs le capitalisme US ne doit pas générer que du simple profit, mais après les taux de rendement du capital habituel pour les actionnaires, générer des primes d’amortissement pour les risques de fluctuation de la demande. Et là, le retour bénéfice-investissement n’est pas suffisant sur les 1 à 5 % que représentent les munitions haut de gamme qu’on emploie massivement au stand.

Les marques européennes, elles, avaient un niveau de capitaux engagés plus faible sur des chaînes bien amorties et des marques historiquement viables, améliorant sans cesse l’existant avec derrière un fort contrôle qualité. Les fabricants américains n’ont jamais pu proposer des cartouches comparables de niveau intermédiaire aux européens, car ils testent (1) juste la sécurité, le fonctionnement, les pressions, emballent et expédient, et en cas de problèmes envoient du remplacement si l’incident se reproduit. En fait c’est le client qui fait le contrôle qualité…Et tant que les Européens, en raison des coûts de transport eurent du mal à atteindre leur marché, pourquoi se casser la nénette ?

C’est donc bien un sursaut d’orgueil national qui aboutit en 1990 à se tourner vers RWS pour fabriquer la fameuse Federal UM 1 A et B, 40 grains (327 m/s) qui permit à Launi Meili (voir photo en tête d'article), de remporter le 50 mètres 3 positions. La cartouche fabriquée à l’usine d’Anoka (Minnesota) possédait une « dimple butt » ou cuvette à fond alvéolé (ci-contre à dr.) pour améliorer la régularité de l’allumage à l’instar de ce que faisaient les Soviétique avec la série « Olymp ». Une fabrication spéciale pour ces armes aux canons spéciaux à taux de rotation de 1/17 au lieu du classique 1/16. Le surplus de ces étuis alvéolés se retrouva ensuite plus ou moins sur la série UM 22 « Gold Medal » surfant sur cet éclatant succès fabriquée dès lors par RWS dans son usine de Fürth (2), et qui était en fait une R 50 bien connue des tireurs sportifs.

En 1997, Federal étant racheté par un fonds d’investissement, dans le brouillard de la dispersion des stocks, on brada début 2000 à prix intéressant toutes les séries 900, 711 (3), très recherchées dans le milieu collector car ce sont des munitions match du niveau R 50 (qui sert pour les cibles test Anschütz) ou Rifle Match dans ces années où elles étaient plus facilement disponibles que les européennes. La CCI « Green Tag » qui serait en ce moment la seule munition match américaine est, en fait une vitesse standard aux mêmes performances que la Pistol Match (40 grains, 324 m/s) reconditionnée et mieux triée-testée, mais qui coûte deux fois plus cher (13 $).

Reste, la nostalgie de ce nom « Ultramatch Gold Medal » qui fut sûrement la meilleure munition à percussion annulaire américaine…à prix d’or certes, mais au pays où le stéréotype du tireur est habitué au plinking à 4 $ la boîte ! Ah certes le capitalisme de l’Oncle Sam peut avoir du bon, mais la cupidité de l’Oncle Picsou est sans doute sa faille…

1/ CCI par exemple teste sa vitesse standard tous les 15 lots, et la Green Tag à chaque lot.

2/ C’est un classique des marques qui veulent maintenir commercialement leurs gammes, si elles sont momentanément prises par autre chose (commandes militaires par exemple) de faire continuer la fabrication par d’autres : CCI l’a fait pour Fiocchi, Eley pour Remington.

3/ Il ne reste plus actuellement en Gold Medal qu’une HV-HP 40 grains.

16 mai 2025

La "chasse tranquille" de Francis Sell (1902-1993)

Sur près de 20 millions de chasseurs en 2021, la « buck fever » avec 47% du marché (dont 65% à la carabine) écrase depuis plus d’un siècle la chasse américaine, et sa longue antériorité peut nous donner des pistes, notamment face aux nouveautés que sont, pour nous, les chasses approche-affût, timidement entrevues depuis 20 ans sous l’influence du « pirsch » venu de l’Est. Une vaste littérature couvre l’étendue du territoire, adapté à la diversité du terrain, et surtout des animaux : cerf de Virginie, cerf mulet, wapiti et autres caribous.

Tous les grands auteurs furent marqués par la philosophie d’Emerson et Thoreau, techniquement établie quelques décennies plus tard, par Aldo Leopold qui inscrit plus que chez nous la Chasse dans une démarche « Nature », même chez les chasseurs professionnels assurant la venaison pour les colons, mineurs, forestiers. A côté de la mythologie du « camp » générant le vaste mouvement « bushcraft » (1) autour de « Nessmuk » (G.W.Sears, 1821-1890) puis Horace Kephart (1862-1931), au tournant du siècle T.S. Van Dyke (1842-1923) avait théorisé en Californie la notion de « still hunting», ou chasse tranquille, reprise par George Mattis (1905-1982) à l’autre bout du pays et le Wisconsin dans « Whitetails fondamentals and fine points for the hunter ».

Cette chasse en solo, avec les carabines à levier en calibre 30-30 commençait à s’opposer au « gang hunting » en équipes de plusieurs chasseurs, bruyants et moins sélectifs, philosophie qui s’affina un peu plus à la génération suivante autour de deux grandes plumes qui se répondirent « coast to coast » : Larry Koller (1912-1967) étant le pendant sur la côte Est de Francis E.Sell (1902-1993) dans le jungle humide du Nord-Ouest de l’Oregon.

Ce dernier au début de sa carrière assurait la venaison des camps de bûcherons dans cet environnement hostile hanté par le « Columbia black tail », un cerf à queue noire plus petit que le cerf de Virginie, surtout difficilement accessible au tir long et posé. La notion de « bush rifle » existait déjà pour tirer lourd et de près, plus encore que le 30-30 avec par exemple le 35 Remington, ou pour le tout-venant ne disposant pas de carabines, le plus souvent au calibre 12 bourré aux « buckshots » (chevrotines), ou à la balle ronde et franche « pumpkin » (citrouille).

Francis Sell était tout à la fois un charpentier qualifié vivant seul au bout du monde dans sa cabane en rondins, pêcheur, photographe s’intéressant à tout dont les petits calibres comme le 20 en lisse et qui avait débuté en tuant 125 cerfs avec le 25-35 Winchester. Ce calibre (6,5x52 R) fut, avec le 30-30, conçu en 1895 comme le premier américain accédant d’entrée aux poudres sans fumée, avec seulement deux chargements d’usine : 117 grains en soft nose et FMJ. La vitesse était mesurée 569m/s à 100 mètres et encore 1230 joules, donc un peu au-dessus du minimum requis pour les cervidés en Amérique du Nord (1088 m/s) mais bien suffisante car comme le spécifiait Francis Sell « …à 40 mètres, la cartouche a peu d’importance ».

L’avantage de ce calibre résidait surtout dans les 50% de recul en moins que le 30-30, et il fut suffisamment populaire pour que Remington s’en inquiète et sorte précipitamment lui aussi son « 25 » depuis longtemps oublié…alors que le 25-35 WCF se fait étonnamment encore de nos jours avec les deux projectiles précités ! Il n’est pas trop impressionnant par exemple face au 243 Winchester, mais fait toujours mieux que le 357 Magnum ou le 44/40 qu’on trouve assez souvent dans les répliques à levier de sous-garde facilement accessibles de nos jours. Larry Koller, guide local dans les années trente autour d’Eden Falls dans les Catskills, à deux heures de Manhattan, dans « Shots at whitetails » définissait ainsi cette chasse : « …se déplacer doucement à travers bois et marais en regardant, s’arrêtant, et regardant encore avec soin et patience ».

Autre témoin de cette époque des débuts des optiques à faible puissance le Texan Vernon Megee (1900-1992), ancien général des Marines collaborant pendant sa retraite à différentes revues de la NRA fut un autre grand témoin de la période des « woods loafers », mot difficile à traduire autrement que par « pantouflards des bois » ou des adeptes des « trail guns » (fusils de piste) qui n’étaient pas vraiment les fusils légers ou « mountain rifles » super allégés à la mode actuellement. Francis Sell parlait plutôt de « fusils piétons » ou « ambulants » lui qui tâta un moment sur un modèle 31 modifié du 358 Winchester (extrapolation du 308 vite tombée en désuétude pour la battue) et du 30 Ackley Improved Magnum sur une carabine Husquvarna custom. Il s’agissait de fusils de précision à tir plat pour « enfiler les balles dans des petites ouvertures et des optiques basses pour voir ces trouées sous faible éclairage en sous-bois ». Voir cliché ci-dessous. La plupart du temps, ces vagabonds tiraient sans optiques, avec les « visées fer », des guidons carrés (Sourdough bead » de chez Redfield comme pour les armes de poing) ou des œilletons comme le « Cascade snapshooter » à la conception duquel participa également Francis Sell.

A la fin de sa carrière, il utilisait une Marlin personnalisée à recul réduit et participa avec Ackley et Chuck Donnely à la saga des tentatives de relancer ou booster le 25-35 WCF dont nous venons de parler. Dans sa kyrielle « d’améliorations » plus ou moins réussies P.O. Ackley « l’armurier de l’Amérique » n’avait pas fait la plus mince avancée en lui faisant gagner 181 m/s et 787 m/s au final. Le 25-35 Tomcat qui suivit, dans des armes à levier Winchester, Marlin et Savage, titillait les performances du « vieux Bob » (le 257 Roberts) des armes à verrou. Les recettes étaient toujours les mêmes :  plus de place (2,96 cc contre 2,31 cc) pour la poudre en remontant le cou avec plus d’angle, pour donner plus de vitesse, mais à des pressions grosso modo similaires. Technique qui se poursuivit (1988-2019) avec Fred Smith un armurier de l’Utah, pour le 25 Bullberry.

Ces carabines courtes légères et bien équilibrées n’étaient pas des fusils de traque, ni des armes alpines, le canon court devait mettre du poids à l’avant au coup d’épaule, et de ce côté, les magasins tubulaires remplis à ras bord des armes à levier répondaient bien à cet emploi, et pour les classiques à verrou, les versions « stützen » étaient appréciées sur des « customs » en toutes sortes de petits calibres. Larry Koller, plus tard rédacteur-en-chef de « Handloader » employait ainsi du 30-40 Krag, le premier calibre PSF pour l’US Army lequel étant également prisé chasse, tint un bon demi-siècle le record mondial du wapiti des Rocheuses. Plus près de nous Leonard Lee Rue (1926-2022) dans le Delaware, puis comme guide au Canada fut le dernier héraut de cette chasse solitaire, silencieuse et précise. Son « The world of the whitetail deer » (1961) a connu 11 éditions et 200 000 exemplaires. « Si vous jetez à l’épaule, disait Larry Koller, c’est comme si le réticule se trouve soudainement là où il doit être sans interruption de la continuité de la concentration sur cette zone vitale, et si vous ratez le premier coup, il n’y en aura pas de second…»

1/ Voir archives des 11 mars 2023, 15 mai 2021, 25 septembre 2023.

12 mai 2025

Deer...ou beer camp ?

Nous le savons tous, et encore plus depuis la récente législation, alcool et armes à feu ne font pas bon ménage : « …on tire d’abord, puis on range les armes, et seulement après on peut enfiler les sacotins, et passer à la buvette ». Après cette tirade « politiquement correcte » (1) rien n’empêche cependant de tenter de voir ailleurs, faire quelques comparaisons et constater si certaines choses, consommées avec modération, peuvent quand même apporter quelques souvenirs impérissables.

C’est le souvenir de nos quinze ans quand, novice et «mousse » d’un rude équipage de battue, on vous en mettait une autre en main, la « pression » ayant changé de camp, et que la première bière sifflée, les belles histoires de chasse du passé surgissaient lentement en fixant les flammes de la cheminée. On avait, avec les adultes chassé la redoutable « pépie » desséchante des poussières de la traque, on n’osait dire un mot, on attendait fiévreusement le carton vert précieux sésame pour enfin chasser comme les grands, et bientôt le « baptême » de sang plus ou moins bien administré (2)…

Les traditions du « deer camp » qui, parait-il se perdent (3) en Amérique du Nord ont des similitudes avec les nôtres concernant la blonde boisson. Selon les états, la saison du whitetail arrive généralement mi-octobre, le territoire de chasse relevant de transmissions familiales ou de clans de copains en des lieux de rencontre impossibles à recenser qui peuvent aller du petit palace, au vieil autobus rouillé rescapé d’une casse voisine. S’y rendre est parfois toute une aventure avec location de chevaux ou de mulets pour le final, et une logistique importante où déjà les « anciens » se rendent en avant-garde. Il s’agit alors de réparer les dégâts des martres et des souris (4), de prévoir la logistique pour une semaine de promiscuité masculine d’où les enfants de moins de 12 ans (5) sont exclus.

Il faut repérer les coupes, faire provision de bois, le fusil sous le bras ou jamais bien loin car le faisan et tétras sont déjà ouverts, ce qui permet aussi de repérer où sont les cervidés, et de prévoir les postes. Comme le résume R. Wegner (in « Legendary deer camps » 2001) c’est la rencontre « de vieux qui racontent, de jeunes qui écoutent avec des tireurs sérieux pour prélever, des gens fiables pour dépecer, balayer, ou faire la vaisselle, puis les vieux s’en vont et les jeunes deviennent à leur tour ceux qui planifient, et font que tout marche comme avant ». Assez similaire en fait avec ce qui se fait chez nous : « bons gars, bonne chère, des souvenirs à la pelle, arrosés de quelques bières ». Traditions et protocoles évoluent d’un terroir à l’autre dans les honneurs, toasts et célébrations avec quand même généralisation dans 47% des camps américains, de bières « light » : des ales, pilsen, IPA fortement houblonnées titrant peu comme la Bud light ou la Coors Banquet.

Ce sont, comme chez nous des bières « pour la soif » des journées encore chaudes de l’automne finissant dans « l’été indien », que l’on trimballe dans la glacière, et non ces « heavy shots » à charges lourdes à l’instar de certaines grosses cartouches, ou qui « triplent » (tiens, pardi, comme mon « automatique » !). Elles y sont pieusement entreposées (car ce sont des nonnes « trappistes » !) au frais dans la salle d’armes, vieille chapelle souterraine où c’est d’ailleurs aussi souvent St-Emilion qui donne l’homélie pour les hôtes de passage. Aux USA où la consommation d’alcool dans la population est de 20 % inférieure à la France, une enquête récente a montré que 23 % des chasseurs avaient été plus ou moins pompettes à un moment donné, et que ça jouait pour 15 % des accidents. Là-bas aussi, la « collation » dicte la consommation et tous les organisateurs de battues le savent, il n’est pas prudent de reprendre la route ou les armes après avoir cassé la croûte, même en faisant preuve de modération.

Les alcools forts, dans ces séjours de parfois une semaine sont pour le soir, et sans trop en abuser, car il faudra crapahuter le lendemain, sont pour ces moments forts où il n’y a plus besoin de conduire, de porter une arme. Il ne s’agit plus que de prévoir un endroit où s’asseoir, se reposer et se laisser aller en écoutant les copains dire « c’est moi qui raconte » comme chez nous, devant une population vieillissante surveillée par les cardiologues. Ces derniers nous font les gros yeux aux bords de la pente verglacée vers la sénilité, et de vouloir courir encore la « gueuze » (mais plus celle qu’on croit hein !). Mais on peut toujours argumenter que ça fait au moins travailler les reins et la vessie (6), et qu’un rot sonore pourrait bien attirer un gros sanglier sous le mirador, croyant qu’il s’agit d’un congénère ! La Chasse c’est un tout, préparer le casse-croûte et le café, faire une « fouée » dans l’âtre, puis se retrouver avec les copains à échanger des mensonges. Hé les amis, les bons rituels méritent d’être respectés…et suivis, car c’est signe que le Bon Dieu et son acolyte St-Hubert nous aiment, car ils ont eu pitié de nous par ces temps de grande sécheresse, puisqu’il ont inventé la bière !

1/ Avis aux ivrognes, pas question d’aller au poste ou sur le terrain avec un coup dans le nez, on parle ici des fins de journées quand on discute au coin du feu, loin des clichés du fameux sketch de la « galinette cendrée » qui nous fait encore tant de mal.

2/ Une coutume qui date des débuts du culte ancien (VIII è siècle) de St-Hubert, plus ou moins bien subie par les néophytes, la théorie voulant qu’on marque du sang de l’animal de prise, les organes des sens si utiles sur le terrain : nez et sourcils.

3/ Le nombre des chasseurs est passé de 16,7 millions en 1982 à 14,4 millions en 2010, la tradition du « deer camp » subissant les aléas des coupes forestières, et des nouvelles pratiques individuelles comme le tir à l’arc qui se pratique plus longtemps : quatre mois sur la saison, au lieu d’une semaine. Dans le Wisconsin qui a perdu 33 % de ses bois en vingt ans les archers sont passés de 24 % à 48 % des prélèvements de cervidés entre 2002 et 2019.

4/ Piégés le plus souvent avec un seau d’antigel que l’odeur suave attire.

5/ Les enfants n’y sont les bienvenus qu’en apprentissage des us et coutumes permettant que le camp se perpétue ensuite.

6/ Voir archives consacrées à certains « besoins » impliquant la vie au grand air des 8 juin 2017, 8 janvier 2024, 4 décembre 2023.

10 mai 2025

Faut-il regretter la bonne vieille poudre "T" ?

A tout seigneur tout honneur, il nous fallait bien parler un jour de la fameuse poudre « T », abandonnée de nos jours mais dont les vieux bidons de 125 grammes de couleur verte et noire trônent encore un peu partout sur nos étagères. A partir de 1900, et quasi jusqu’à nos jours elle fit tirer des millions de cartouches, révolutionnant l’univers du rechargement au moment où la poudre noire n’avait pas encore définitivement disparu du paysage. Moins progressive que les poudres modernes développées après -guerre, elle s’employait avec de la bourre grasse ou liège, et un sertissage rond plutôt qu’en étoile générant trop de pression.

Le saut qualitatif par rapport à la poudre noire était conséquent : pour propulser la charge standard de 28 grammes de bon plomb il n’était besoin que d’1,7 grammes en 16 (1,90 grammes en 12), contre près de 3 grammes en poudre noire ! La vitesse de combustion, et donc la réponse de rapidité au tir (sans même parler des « longs feux » fréquents avec l’ancienne poudre noire !) était divisée par trois. La poudre T fournissait deux fois plus de chaleur, trois fois plus de gaz, mais doublait le niveau des pressions sur les bascules ce qui engendra le développement des aciers spéciaux, et, par voie de conséquence, les progrès armuriers que nous avons évoqués plus haut.

Ils étaient associés aux poinçons d’épreuve ad hoc : PT pour St-Etienne, PV pour Liège, sauf que la mesure des pressions des cartouches de l’époque était faite avec une autre méthode (crusher autrefois, piézo-électrique de nos jours). Malgré tout on peut toujours leur faire confiance, ils doublent, au pire, la capacité d’encaissement de toutes nos cartouches communes : 900 kg pour l’épreuve normale, 1200 kg pour la supérieure quand une cartouche classique ne dépasse pas 600 kgs. 

Après la seconde guerre mondiale, parallèlement à la fameuse poudre T, de nouvelles poudres virent le jour (Ba 3, Ba 2, Ba 6) classées selon la notion de « vivacité », il faut comprendre par là son comportement en fonction de sa surface et du volume de gaz produit. Une poudre vive indiquant une grande surface de poudre par rapport à leur volume, et donc plus de gaz, et ce plus rapidement. En face, une poudre lente aura des grains plus petits, moins de gaz, mais combustion plus longue. Tout ça devant être adapté à l’arme, et en ce qui nous concerne, nous chasseurs, la masse de plomb à envoyer vers le gibier.

Dans le cas d’une masse lourde, on le comprendra facilement, vaut mieux employer une poudre lente, progressive et un canon long pour que la combustion aille au bout pour faire son effet. Parmi celles-ci, en principe vendues exclusivement aux encartoucheurs par la SNPE, la gamme A reste la plus utilisée pour nos chargements classiques. Ce qui va de la A 0 lente et souple d’emploi pour les charges lourdes (exemple la Tunet « haut-vol » et 391 m/s), aux semi-vives A 1, A2, A3 de la Verney-Carron Flash ou Fob super 36. A l’inverse, pour les armes de poing on utilise des poudres sphériques vives (S2 et S3) pour que toute la combustion soit achevée avant que les projectiles ne quittent des canons par essence courts, voire ultra-courts.

Cette nouvelle donne rendit un peu désuète l’omniprésente poudre T, moins progressive, et ouvrit la voie à des « cocktails » mieux adaptés aux nouveaux marchés que l’on dirait « de niches » actuellement : tir sportif (charges moins lourdes, plus de vitesse), gibier d’eau (là, a contrario charges lourdes), et plus récemment, substituts au plomb. La cartouche elle-même, autrefois sempiternellement à bourre grasse et sertissage rond évolua vers la bourre à jupe et le sertissage étoile qui permet, en plus, selon le nombre de plis, de jouer sur les pressions. Les encartoucheurs ont bien sûr parfaitement assimilé les avancées techniques de la chimie qui, il y a un peu plus d’un siècle pouvaient encore faire peur à cause des explosions inopinées. A titre d’exemple, une petite marque italienne d’articles de chasse comme Romagna Caccia en Italie put proposer un début de gamme en 1970, puis à partir de 1988 ne plus se consacrer qu’à ça, produisant 130 millions d’unités par an, disponibles dans 60 pays. Dans son usine de Forlin, non loin de Ravenne et de San Marin, trois machines produisent 270 000 unités par jour dans un contexte très moderne et automatisé, mais avec un contrôle rigoureux de 4 cartouches tirées pour essais par série toutes les trente minutes.

Malgré toutes ces avancées, et tous les mérites discutables à l’infini de nos cartouches préférées leur qualité reste dépendante de la fameuse loi de Piobert , toujours d’actualité malgré son âge stipulant que « la poudre la plus convenable pour une arme déterminée, est celle, qui brûlant d’une manière complète dans le temps que met le projectile à parcourir l’âme de la pièce, lui imprime non instantanément, mais graduellement, toute la force de projection dont elle est susceptible ». A l’emploi, nous qui avons conservé pieusement, à la fois, plusieurs boîtes « collector », et le contenu des fameux bidons verts, notons peu de différences à l’emploi, sinon le claquement plus sec de la fameuse poudre à employer, pour la nostalgie, dans les cartouches en carton et le calibre seize, comme autrefois et que l’on reconnaît de loin dans l’arrière-saison hivernale, quand tout est fermé, sauf la palombe et la bécasse…

 

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6 mai 2025

Faulkner toujours actuel ?

Comprendre ce qui se passe dans l’ Amérique de Trump oblige à se pencher sur la remise en cause du « good ol’times », ce « bon vieux temps » que l’on retrouve d’ailleurs un peu chez nous en ce moment partout chez les politiques.

Prix Nobel (1950), mais surtout chasseur, toute l’œuvre de Faulkner relève de ce contexte (ou complexe ?) du « c’était mieux avant » caractéristique de toute société en crise. Ce qui ne manque pas d’analogies avec notre paysage actuel, sauf qu’il n’est pas, en France aussi bien analysé qu’il ne le fut tout au long du siècle dernier par une abondance de « nature writers », lesquels n’ont jamais existé chez nous. De Vialar à Pagnol en passant par Vincenot, la littérature n’a jamais remis en cause les intenses bouleversements paysagers des années 60 (mécanisation), puis 70 (restructurations foncières, remembrements) qui ont totalement chamboulé la Chasse française. Mieux même, le Dr Delisle, celui là-même qui introduisit la myxomatose, fut décoré par les pouvoirs publics pour ce haut fait d’armes !

William Faulkner (1897-1962) fut élevé « dans les grands bois, plus grands et plus anciens que nous », où la Chasse fait rentrer l’homme dans le cycle de sa maturité du fait du maniement des armes : le 22 long rifle à 8 ans, le 410 à dix ans, et le calibre douze à 12 ans en 1909, là où il fit son premier cerf whitetail, pas très loin d’Onward (Mississipi) où naquit Aldo Leopold (1) premier promoteur du « land ethic ». Ce fut un écrivain du Sud, pendant de Nash Buckingham (2) côté sauvagine, et grand illustrateur de la « camp culture » et ses lieux emblématiques comme le furent la cabane de Thoreau à Concord, le ranch Elkhorn de Teddy Roosevelt dans le Montana, la masure d’Horace Kephart (3) dans les Smoky Mountains.

 

Le « camp » n’est pas en effet qu’un toit, un repas chaud, mais une micro-société où les rôles évoluent avec l’âge. Quand il reçut l’annonce de son prix Nobel, déjà âgé, il n’y faisait plus que la vaisselle même s’il en était le responsable avec déplacement en chariot des armes, de la literie à dresser sous la pluie et entretenir le feu, cuisiner et raconter des histoires en buvant sec (4). Il avait chassé de 1915 à 1930 sur le camp Stone, le long de la rivière Tallahatchie nécessitant une demi-journée de cheval pour rejoindre 2000 acres (800 ha) qu’il fallait aussi défendre contre les ours qui attaquaient le bétail ou ravageaient les champs de maïs.

Comme Gordon Mc Quarrie (5) pour le gibier d’eau, brouillant les pistes sur ce « comté apocryphe » inventé et une base de chasseurs fictifs mais que tout le monde alentour savait reconnaître, il lança les bases du journalisme « gonzo » (6), popularisé bien plus tard avec Hunter S. Thompson. Les premiers succès dans les années trente lui ouvrirent les portes d’Hollywood comme scénariste (7) mais en abordant déjà les thèmes « nature » ayant été obligé de déplacer son camp, dévasté par les compagnies forestières de 200 kms au Sud-Ouest sur la rivière Big Sunflower. Plusieurs de ses nouvelles montrent comment les activités de plein air chasse-pêche sont des éléments essentiels de la société rurale, ce qu’on défend tous d’ailleurs de nos jours comme on va le voir plus loin.

La nouvelle répartition imposée par la modernité des pratiques est perçue comme une double déperdition tout à la fois du territoire et de l’âme du pays : dépossession et dissolution. La Nature autrefois abondante est maintenant chiche, sinon en espèces invasives, et prouve par là qu’elle est une force rebelle, et que même avec de gros tracteurs, on n’en vient pas à bout. Elle possède sa sauvagerie inhérente, un désordre foisonnant qui repart dans toutes les directions comme on le voit dans notre Bocage où les aberrations du progrès ont fait dévaster les plants de pommiers sur lesquels se basait autrefois la valeur du « clos », aplatir les talus et les haies (pour en refaire ailleurs !), changer les cultures ancestrales pour d’autres…asiles bienveillants pour la prolifération du sanglier et bientôt le retour redouté par tout rural, du loup. Il n’y a que les bobos écolos pour penser que ce sera le régulateur naturel de toutes les nuisances.

C’est cette froide logique qui fait la théorie du « grand remplacement », pas forcément celui que brandissent actuellement certains politiques dans les villes, mais qui frappe les vieux paysans, les vieux chiens et les vieux chasseurs. La Nature bien que forcée de céder du terrain oppose force et résistance et elle échappe aux efforts vains du temps et à l’emprise des hommes. Nous venons de le voir dans notre région où l’arasement d’un ancien barrage, en moins de dix ans, dont l'ancien lit a été laissé à l’abandon par les pouvoirs publics (Etat et collectivités se rejetant la balle pour savoir qu’en faire), offre une véritable jungle modifiant fondamentalement le paysage cynégétique de toute une région.

Le président Schraen, le 17 mai, propose une action de sensibilisation dans les municipalités qui vise juste : patrimoine et tradition sont au cœur de nos actions, pierres angulaires d’une Culture qui donne sens et finalité à nos vies. Nous autres chasseurs, sommes des personnages inexorablement liés au destin des paysages qui nous ont patiemment structurés, bien loin des « rurbains » écolos à peine arrivés, vite partis, ou des « brexiters » jamais là, mais qui pontifient ou persiflent  dans notre dos sur les réseaux sociaux. Sans vouloir trop faire de pub à certains refrains entendus lors de meetings, à nous aussi de montrer qu’« on est là »…

1/ Voir archives du 28 juin 2022.

2/ Voir archives des 1 mars 2022 et 27 février 2022.

3/ Voir archives du 16 mai 2021.

4/ Avant guerre, il n’était pas rare de voir d’imprudents « hillbillies » tués par empoisonnement dû au « moonshine » (voir archive du 25 septembre 2023) l’alcool de contrebande distillé dans un radiateur auto, moins cher que l’alambic de cuivre. Faulkner était adepte du « julep-menthe » (une cuillère à café de sucre et quelques brins de menthe écrasés dans le bourbon) et pouvait siffler une bouteille lors d’une virée Calexico au Mexique- Los Angeles (320 kms) avec Clark Gable. Dès 1938 il s’était centré sur la chasse au renard combinant chien et cheval, et il mourut d’ailleurs des suites d’une chute aggravée par un mauvais état de santé dû à ces excès, en Virginie où il passa les 5 dernières années de sa vie.

5/ Voir archive du 11 juin 2022.

6/ Genre journalistique développé par Hunter S Thompson (1937-2005) mêlant faits réels et fiction pour donner plus de punch au récit. Mais on n’en était pas encore aux « fake news » et autres « vérités alternatives »…

7/ Il travailla pour MGM et 20 th Century Fox notamment avec Howard Hawks, et même un long script sur la vie du général de Gaulle, pour un film qui ne vit jamais le jour.

 

3 mai 2025

En lisse, on ne vise pas, on pointe !

On a tous entendu ça : « on vise avec la carabine, on pointe avec le fusil de chasse » avec lequel, d'ailleurs, on ne regarderait pas le canon, mais la cible. Le tir instantané est déjà un processus qui demande du temps et des efforts, et une qualité de timing œil main dominante où déjà chez l’armurier, lors d’un achat, on cherchera à contrôler quel est votre œil « dominant ». Mais justement, pour le tir au vol, et même sur la planche on préconise de tirer les deux yeux ouverts…alors, que faire ?

Nous avons tous appris la méthode de base « queue-tête-pan », encore employée si on en croit certains sondages par 75% des chasseurs. Elle demanderait donc de viser, et de mesurer l’avance à donner au canon qu’on doit donc plus ou moins percevoir ou situer dans l’espace par rapport au faisan qui s’envole avec fracas non ? C’est ce qu’on nous apprenait quand on débutait avec parfois plus ou moins de mal à mettre cela en pratique notamment avec les vieux juxtaposés qui s’entassent dans notre râtelier (1). Et avec l’âge, il n’est pas sûr que ça s’améliore ?

Pourtant, dès 1887 existait déjà le correcteur de tir à deux yeux Gilbert pour empêcher de « bigner » de l’œil, et en 1925 soit la même année où Robert Churchill (2) popularisait (dans « comment tirer » sa fameuse méthode de tir instinctif, S. Morin (dans « les trucs du chasseur ») était catégorique : « beaucoup de chasseurs visent un œil fermé, cette manière qui parait instinctive est mauvaise, le chasseur en se privant d’un œil diminue de 50% sa force et son pouvoir visuel. Nous conseillons donc comme un truc infaillible et excellent de viser en ayant les deux yeux bien ouverts. La visualité est complète, le chasseur aperçoit l’horizon, le terrain, le gibier et apprécie mieux la distance et la rapidité. Par cette manière il est plus rapide et bonifie de 50% son tir ».

Pour un droitier épaulant à droite il sera difficile de supprimer la dominance oculaire de ce côté, mais on se rend compte qu’à la longue, elle n’a plus d’importance quand le subconscient prend le relais. Quand on épaule, un tas d’informations arrivent à toute vitesse et si comme on dit : « moins on voit les canons mieux on tire » c’est parce ce que le subconscient fonctionne tout seul, sans contrôle, utilisant des images qu’on a pas conscience de voir et qu’abusivement on qualifie de « tir réflexe » ou « au coup d’épaule ». Si la conscience et la perception prennent le pas : on voit le canon, on y ajoute un enchaînement de techniques plus ou moins vite, et pas forcément dans le bon ordre et on entre dans les difficultés évoquées plus haut quand on change souvent d’arme, ou de mode de chasse, par exemple de la plume au poil : faisan-lapin, ou perdrix-bécasse.

Si décontenancé par une arme inhabituelle notamment habitué au plan de visée canon unique, si on cherche à positionner le canon dans l’espace, on force le cerveau conscient à utiliser l’œil préférentiel et on barre la route au subconscient qui, lui, s’occupe de tout en binoculaire, comme un ordinateur. Le canon a disparu mais on sait où il est sans le voir et on va plus vite que la technique péniblement apprise ou reprise avec une arme inhabituelle quand il faut anonner queue-tête-pan. Il faudrait donc préférer garder ce tir « au feeling » où le subconscient prend le pas sur la technique, ce qu’on peut constater au football quand M’Bappé dribble et se concentre plus sur les poteaux adverses que sur son pied ou la position du ballon, ni même tenir compte des joueurs qui courent dans tous les sens autour de lui sans le distraire de ses automatismes.

Le stress ou le « feu de l’action » peuvent faire douter et s’emmêler les pinceaux certes, mais justement, l’empilement de techniques plus ou moins bien retenues n’arrangera pas les choses, en plus avec une arme à la conformation flottante. Avec une arme d’habitude le « montage » sera au moins correct et on saura toujours à peu près où se trouve le canon même flou ou en vision périphérique, notion encore plus importante si le gibier est proche : lapin, bécasse. A la chasse la chose la plus importante est déjà de voir le gibier notion où les écarts sont très importants à constater sur les différences dans un groupe d’amis, et où la perte est considérable si on avance en âge. Les théories de tir au pigeon d'argile « calm eyes » (de concentration mentale et visuelle sur un petit objet pour faire une mise au point douce avant d’appeler) donne un large champ de vision, (un peu comme quand on conduit) permettant d’affiner les distances, et d’apprécier la vitesse de déplacement qui est essentielle car, vous l’aurez constaté tous, on rate rarement devant. Après « c’est la Chasse » comme on dit et parfois, la chance est aussi de mise, et face au retour en force de la spiritualité, notre tradition nous offrira toujours les invocations et cierges au bon St-Hubert…ce qui ne mange pas de pain, fut-il de messe !

1/ Voir archive du 16 avril 2025.

2/ Voir sur Robert Churchill qui, pour rester en forme tirait au minimum 150 plateaux par jour, archive du 17 septembre 2021.

 

 

 

28 avril 2025

4 sept. 1887 : 3 morts un blessé grave en 1 minute !

Look de cow-boy romantique, longue chevelure blond-roux qu’il rangeait parfois sous son chapeau, le shérif Commodore Perry Owens était un homme de petite taille parlant doucement avec l’accent traînant de l’Oklahoma, qu’on aurait eu tort de sous-estimer. Sur cette photo de 1886, à en juger par le matériel employé, Springfield Trapdoor 1873 Officier et pistolet Colt dans une position rare (1) il prenait son rôle très au sérieux, mais c’est avec la Winchester 1876 en 45/60 (2) qu’il se fit connaître dans un des épisodes sanglants de la guerre de la Pleasant Valley (Arizona).

En dix ans, elle fit une trentaine de morts (le dernier en 1892), opposant deux familles d’éleveurs bovins (Graham et Tewksbury), montées les unes contre les autres par un magnat plus puissant (Stinson) dans laquelle les moutons jouèrent certes un rôle (3) mais qui ne fit qu’exacerber les choses. Tous les ranches amis ou alliés étaient en conflit, le secteur loin de tout abritait aussi des voleurs de chevaux et de bétail, des fugitifs, et sous la perpétuelle menace des Indiens Navajos qui pillaient allégrement tout le monde. Depuis 1884, l’Atzec land and cattle company était avec 60 000 têtes, et une centaine de cow-boys, le second élevage des USA, une masse de bétail qui attirait toutes les convoitises. Originaire du Tennessee (1852-1919), C.P.Owens avait suivi ses parents en Indiana, avait été embauché à 13 ans comme chasseur de bisons pour nourrir les cheminots, puis cow-boy en Oklahoma et au Nouveau-Mexique où, ambidextre, il régalait les copains de tirs au fusil à la hanche.

Il avait débarqué dans la région en 1881 comme contremaître dans un gros ranch, se heurtant aux Navajos, et se trouvant même inquiété par les affaires indiennes pour le meurtre d’un jeune, sans doute en pleine épreuve d’initiation (4). Elu shérif du comté d’Apache, en 1886 (5) avec le soutien des éleveurs bovins, des Mormons, et des colons mexicains sur une énorme surface (55 000 m2) il tenta de rester neutre dans la guerre des clans qui se passait au Sud, le chaos touchait quand même sa juridiction, la petite ville de Holbrook en 1886 ayant connu 26 morts violentes pour 250 habitants (5000 actuellement). Dès son entrée en fonction il hérita de 14 mandats d’arrêt non exécutés par son prédécesseur, et déjà là-dedans, les dernières péripéties du fameux « règlement de compte à O.K.Corral » (26 octobre 1881)…On ne pouvait rêver meilleure entrée en matière pour un shérif débutant !

Les deux derniers survivants (Ike et Phineas) du gang Clanton, étrillés par les frères Earp et le fameux « Doc » Holliday étaient venus se mettre à l’abri au Nord, sans perdre leurs mauvaises habitudes, tuant un éleveur, puis éliminant un témoin gênant de leurs vols de bétail. Owens avec une solide équipe de trois adjoints, et un détective relevant du syndicat des éleveurs éliminèrent Ike lors de son arrestation (14 mai 1887), les deux membres restants étant tués plus tard par des ranchers lors d’une énième tentative de vol de bétail. La situation n’était pas facile pour les forces de l’ordre, trois shérifs venaient d’être tués par les Navajos, quand il fallut s’occuper d’un nouveau clan Blevis ou « Cooper », (un alias pour dérouter les recherches), arrivé en 1885 du Texas où ses membres étaient déjà poursuivis pour meurtre. Ils étaient affiliés dans la guerre de Pleasant Valley aux Graham, et l’ainé du clan, Andy, passait pour être un bon tireur et un tueur froid.

Poussé par ses administrés, nanti d’un vieux mandat, et sachant que l’aîné du clan était chez sa mère Mary à Hollbrook, il perturba la réunion dominicale car il y avait à l’intérieur de la petite maison en bois (voir photo ci-contre) une douzaine de personnes : celui qui était recherché, ses frères John et son épouse Eva, Sam son demi-frère, une amie et son bébé, deux fillettes, et deux invités. Avant de frapper à la porte jetant un regard par les fenêtres il put voir qu’il avait déjà été repéré, les armes étant déjà sorties. Andy ayant refusé de suivre le shérif, ce dernier ne prit aucun risque tirant à la hanche avec la Winchester 76 à travers la porte, le touchant au ventre. Son demi-frère John tira dans l’embrasure de la porte, mais ne fit que tuer le cheval attaché devant la maison, et en pivotant rapidement Owens le toucha à l’épaule. Le « lawman », recula alors très vite pour se dégager et avoir une meilleure vue d’ensemble de la situation, et de ses adversaires potentiels, et voyant Andy tituber, tira encore à travers les murs pour le toucher cette fois à la hanche. C’est là que sortit, traversant une fenêtre, l’invité Moses Roberts, malheureusement pour lui, pistolet dans une main, chapeau dans l’autre, transpercé lui aussi de part en part. L’homme de loi, eût le temps de recharger posément quand, échappant à sa mère qui tentait de le retenir, surgit le jeune Samuel, 15 ans, qui s’était emparé du pistolet d’Andy tombé au sol, malgré les cris de sa mère « ce n’est qu’un enfant, shérif, ne tirez pas dessus », il fut tué dans ses bras. La fusillade n’avait pas duré une minute : cinq balles, trois morts et un blessé grave estropié à vie.

Battu aux élections l’année suivante CP Owens fut nommé US Marshall en 1893, puis shérif du comté de Navajo nouvellement créé en 1895, l’anarchie ambiante de l’état naissant d’Arizona ne permettant son officialisation qu’en 1912. Retiré à San Diego, (Californie) à la fin de sa vie Commodore (6) Perry Owens reconnaissait avoir tué 14 personnes dans sa carrière…

1/ Fin 1880, l’étui suspendu était rare, c’était plutôt celui à boucle mexicaine sur ceinture étroite qui était utilisé. Là on est dans l’étui « buscadero » hollywoodien à double ceinture de munitions qui semble trop long pour le Colt SAA de 7,5 pouces. On peut penser plutôt à un canon de 9,5 ou 10 pouces.

2/ Ce calibre ne se fit que pour le modèle 76 : 11,43 mm, balle de 300 grains (19,44 grammes) et 420 m/s, bien suffisant à dix mètres pour traverser les murs en bois de la bicoque et ceux qui se cachaient derrière.

3/ Dans ces pays secs, les moutons qui rasent l’herbe n’étaient pas les bienvenus, les éleveurs bovins tuèrent les animaux et les bergers basques qui les accompagnaient !

4/ Le passage à l’âge adulte était celui du guerrier qui après des cérémonies souvent épuisantes, obligeaient l’impétrant à des exploits comme nonobstant le danger face à des hommes armés, voler du bétail au nez et à la barbe de ses propriétaires.

5/ Dans la fête qui suivit son élection avec alcool coulant à flots, et pétarades nombreuses, un imprudent qui s’était tiré une balle dans la main, reçut ensuite une balle dans le pied de la part d’un ami !

6/ Prénom qui ne correspondait à aucun titre militaire, sa mère l’ayant ainsi baptisé en hommage au marin Matthew Perry (1794-1858) qui força au même moment (1853) l’ouverture du Japon au monde.

 

25 avril 2025

Trop "court", le 22 Short nous laisse-t-il...en slip ?

Etonnant de voir que ce calibre, précurseur de longue date du Long Rifle (1), se retrouve encore sur les étagères de nos armuriers non ? Jusqu’en 1960 il était moins cher et remplaçait le vrac actuel à 5 euros la boîte pour plinker, réguler, voire tirer en compétition (2) et les carabines « cheap » de l’époque stipulaient bien : bosquettes (3), court, long, et long rifle. Eh bien, justement, comme on possède un de ces rossignols, filons acheter une demi-douzaine de « short » pour voir ce qui se passe.

Si on examine la balistique des deux munitions, on peut s’étonner d’un tel écart de compatibilité puisqu’on passe d’une balle de 29 à 40 grains, donc plus légère et sensible au vent latéral, qui chute de 4% dès 50 mètres car moins rapide (286 m/s) et presque deux fois moins puissante à cette distance : 70 joules contre 105. Face aux subsoniques désormais nombreuses sur le marché (4) elle ne peut donc rivaliser avec les munitions modernes actuelles pour armes longues. Le taux de torsion universel de 1/16 est un compromis d’ailleurs contemporain du passage au « long rifle » en 1887 afin de stabiliser la balle plus lourde mais surtout plus longue, imposant une rotation plus rapide.

Le taux de 1/20 du Short était déjà un compromis entre les poids de balles (29 à 33 grains), celui de 1/24 étant même le mieux adapté que l’on retrouve sur les carabines « gallery » de tir réduit (Winchester 1885, Ballard, Stevens), « pompes » Winchester 62 ou 90 (photo ci-dessus) ou sur celle plus grand public de la semi-auto FN conçue par J.M. Browning. Comme l’ont prouvé les travaux de Scott Volquartsen, le spécialiste des canons custom 22, ces histoires de taux de torsion sont moins importantes que les problèmes de chambre, et du « saut » de la balle avant de prendre les rayures, né de l’espace libre bien plus important avec le Short qu’avec le Long Rifle. Pour ce dernier d’ailleurs, les armes « match » visent à le réduire au minimum, c’est dire !

La balle, plus courte et légère qui prend plus ou moins bien le chemin du canon après ce saut « dans le vide » pose plusieurs problèmes qu’il faut prendre en compte si on veut utiliser souvent le Short. D’abord la précision, puis les résidus de poudre et de plomb qui vont renforcer l’apparition du fameux anneau de carbone en entrée de chambre, qui rendra l’extraction difficile. Cette pièce sera déjà plus sollicitée du fait de l’étui plus petit pouvant se glisser dans l’intervalle, et l’étanchéité en pâtir, amenant de curieux « retours de flamme » que l’on constate pour les mêmes raisons avec les bosquettes.

Ce phénomène n’est pas innocent, et alerte par des différences de niveau sonore entre les détonations, des particules de poudre et de gaz allant vers le visage (d’où préconisation voire obligation du port de lunettes de protection sur certains stands), des traces de stress et de carbone à hauteur du col du minuscule étui. Les écarts de qualité de fabrication sont aussi en cause : munitions sous-chargées qui empêchent d’obturer ou sceller, laiton trop dur pour se dilater correctement, chambre trop grande pour munition sous-dimensionnée ou abimée par trop de tirs « à sec », comme sur certaines carabines d’entraînement militaires de surplus. A force de percuter à vide, la pointe s’émousse à frapper les bords de la chambre qui se creuse de son côté, d’où les « fuites »…Problème à solutionner, dès qu’il apparaît, c’est-à-dire assez souvent quand on passe du Long au short (5) en couvrant la culasse d’un bout de tissu à portée de la main : gant, lingette.

Le bruit moindre n’a plus l’importance qu’il avait dans les années 50-60 où réducteurs de son et balles subsoniques n’étaient pas encore généralisées, mais on fait mieux en puissance que l’air comprimé et pour les nuisibles ça passe encore en étant moins susceptible de percer des trous dans le toit en fibro, et de finir dans le jardin en tirant sur un gros rat noir embusqué au fond de la vieille remise. La précision est beaucoup moins fiable, et ne plus considérer la distance 50 mètres comme point de réglage, plutôt 15-20 m et encore (voir carton ci-dessus à g.) et un groupement d’une dizaine de centimètres voire moitié moins en s’appliquant (6)…ce qui pourra quand même toucher un lapin boulottant vos laitues à 15-20 mètres.

C’était suffisant autrefois pour apprendre aux débutants à bien tirer sans trop de danger et apprécier la distance en tir fichant, par exemple sur une pie voleuse bondissant autour des poussins, mais la précision est loin d’égaler une munition long rifle même médiocre. Reste la nostalgie d’une époque où il existait de belles carabines verrou à chargeurs tubulaires permettant de tirer toute la semaine ( 23 coups ! ) sans recharger, où les « automatiques » (comme cette Gevarm ci-dessous) elles-mêmes étaient compatibles (7). La manipulation actuelle une par une, du petit bougre avec nos vieux doigts engourdis par l’arthrose, nous fait lever nos yeux las « pop…pingpop…ping» vers cette horloge du temps qui défile, dans un bruit de claquement de doigt, comme la pluie, sur la tôle au fond du jardin, et le temps qui passe…

1/ Voir archive du 2 février 2022.

2/ Le tir olympique de vitesse employa le 22 Short jusqu’à fin 2004, ce qui explique sans doute sa survie face au « Long » (1871 pour encaisser le pourcentage considérable de poudre noire : de 3 à 5 grains), à l’« Extra Long » (1880, 6 grains de PN, mais les premières PSF et une balle de 40 grains). Les Winchester Rimfire et Remington Special identiques (1890), étaient moins abouties et précises que le Long Rifle qui, depuis trois ans, avait déjà gagné la partie.

3/ Voir archive du 15 mars 2022.

4/ Voir archive du 14 avril 2025.

5/ Sans nuire à la sécurité générale de l’arme, le Short ayant une pression admissible moindre que le LR (21 000 contre 25 000 psi).

6/ Les fusils dédiés « gallery » comme le single Winchester 1885 conçu par J.M. Browning pouvaient tenir 3 pouces (7,62 cm) à 50 mètres.

7/ Aucun enrayage par exemple dans un chargeur CZ où les 5 coups s’empilent et s’alimentent sans faille du Long au Short.

 

 

21 avril 2025

Le réticule T.K. Lee : fine dentelle et point de croix

Pas trop cousu de fil blanc puisqu’il utilisait celui de la « veuve noire » (1), une araignée minuscule pouvant néanmoins vous envoyer aux urgences, sinon à la morgue ! Et comme cette dernière a sur le dos un « point rouge », il ne faut pas s’étonner que l’idée de les illuminer à l’identique ait fait florès ensuite. Ce réticule particulier « T.K.Lee Dot » est contemporain de la démocratisation des optiques, après la Grande Guerre.

L’idée du « point » contre la « croix de cheveux » date des tranchées et des « lentilles » Gibbs et Martin concurrençant les premières optiques militaires utilisées sur le fusil Springfield (2) pour être plus vite sur la cible et plus facile à monter au front. Le tireur « Tackhole » Lee (3) eut l’idée au début des années trente de l’adapter aux lunettes que l’emploi de l’aluminium permettait de démocratiser, en utilisant la toile de l’araignée latrodecte qui peut s’étirer sur 25 % de sa longueur sans se rompre. Meilleure encore que le kevlar on ne comprend que depuis une quinzaine d’année cette matière qu’on n’arrive toujours pas à synthétiser, et qui servit aussi pendant la guerre à la fabrication des périscopes ou du viseur Norden qui équipait les « forteresses volantes ».

Fondant sa société en 1936, Lee à partir de Birmingham (Alabama), comme Leupold ou Premier pouvait personnaliser ses optiques avec un ou plusieurs points de résine et eût comme clients Jack O’Connor ou le chasseur de tigres Herb Klein. Le « point » pouvait varier de 2 à 6 MOA permettant une acquisition rapide avec rien pour vous distraire ou vous détourner de la cible, mais en contrepartie difficile à discerner dans la pénombre ou dans un environnement sombre à l’arrière-plan. On préconisait donc si on avait du mal à imaginer la taille du point convenant à sa lunette de faire un cercle noir de la taille suggérée sur une feuille de papier blanc et de le regarder dans le scope à 100 m pour déterminer son choix !

Dans la foulée de Bill Weaver en 1930 avec son modèle 330 puis K2 et K3, la Lyman Alaskan (1939-1957), la Redfield Bear Cub (1956-1959 après rachat de Kollmorgen), la chasse américaine utilisant encore massivement le 30-30 pouvait se contenter du grossissement X2 à X4 et tâtonnait encore en matière de réticules avant que Leupold, pionnier du chargement azote contre la buée depuis 1950 popularise (1962) le « Duplex » (ci-contre à dr.) aplatissant les fils de la croix pour diriger le regard vers le centre en cas de faible luminosité et affiner la visée. Ce réticule pouvait aussi faire télémètre et en 1965, avant le Mildot, les Marines l’utilisaient encore avec la X3-9 Hi-Lux entre 150 et 550 mètres.

Le premier plan focal ne facilitait pas l’utilisation du point Lee : 2 MOA représentant 5 cm à 90 mètres ne permettait guère d’aller plus loin car il couvrait alors la cible, et il fallait jongler par exemple 3 MOA à X 4 ou 2 MOA à X 6-8 avant de disposer du second plan focal qui, alors, faisait grossir le point. Il eût cependant ses partisans pour le tir aux silhouettes métalliques, ou le varmingting, notamment des coyotes. La battue telle qu’on la connaît n’étant pas pratiquée aux USA, ce « point » gagnait à être éclairé, ce que la technologie fait maintenant partout, et il est peu à peu entré dans les mœurs (4) sous la forme des « red dots ». Aux distances ordinaires du tir dans notre pays, le grossissement X 4 devrait suffire partout sauf peut-être en montagne, et la sophistication (et le prix ! ) des scopes en fait malheureusement des objets de luxe, à l’opposé du mouvement de popularisation de l’après-guerre dont ce réticule Lee-Dot était le témoin.

 

1/ De la famille des latrodectes : sa spécialiste, l’entomologiste californienne Nan Songer (1892-1956) fut médaillée pour sa participation à l’effort de guerre et elle avait transformé plusieurs pièces de sa maison en brrr…. « élevage » ! Son ranch était top secret, seul le fil de cette araignée venimeuse dure à manipuler, était capable d’encaisser le froid glacial qui rendait cassantes en haute altitude les croix de cheveux du viseur Norden que le navigateur devait impérativement détruire en cas d’atterrissage forcé étant secret militaire. Sur le « bomb run » au-dessus de l’Allemagne, tout l’avion passait momentanément sous le contrôle de ce précurseur des ordinateurs.

2/ Dès 1908 le fusil Springfield (fortement inspiré du Mauser qui gagna d’ailleurs son procès en demande de royalties) fut équipé de la lunette Warner-Swasey (X 6), les Marines optant un an plus tard pour la Winchester A5 (X 5) rachetée par Lyman en 1928. Le Springfield ne fut retiré officiellement du service qu’en 1974, les 588 derniers ferraillés seulement sous administration Clinton.

3/ Thomas Kirkpatrick Lee (1888-1957), grand tireur aux trois armes, créateur du wildcat 224 Lee-Tomic à partir du 257 Roberts, il travailla aussi avec Jerry Gebby (qui fit avec Newton le 22-250) sur le 224 Senior-Varminter.

4/ Il y a encore pas si longtemps, dans nos sociétés communales, les « anciens » voyaient d’un mauvais œil…c’est le cas de le dire, ces aides à la visée « qui ne mettaient pas tout le monde a égalité » ? C’est-à-dire, de tirer comme eux…comme des pieds !

 

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